Tous les épisodes :
Le système Armstrong, plus vraiment confidentiel (1/4)
Le septième Tour, la retraite et « le mensonge » (2/4)
Landis et Hamilton, lieutenants trop bavards (3/4)
Tygart envoie Armstrong chez Oprah (4/4)
En janvier 2013, Lance Armstrong passe aux aveux. A la télévision chez Oprah Winfrey, l’Américain, retraité depuis plus de deux ans et déjà rayé des palmarès par l’UCI, reconnaît s’être dopé lors ses sept victoires dans le Tour de France. Le Texan s’est retrouvé au pied du mur suite à une longue enquête de l’USADA et de son directeur Travis Tygart.
Cinq fois oui
Le moment est solennel. Plus que l’Amérique entière, c’est le monde qui veut savoir. Non pas savoir si Lance Armstrong s’est dopé, mais savoir ce qu’il compte dire sur le sujet. Dès les premières minutes, Oprah Winfrey va à l’essentiel.
« Oui ou non, avez-vous déjà pris des produits interdits pour améliorer vos performances ? »
« Oui ou non, une de ces substances interdites était-elle de l’EPO ? »
« Avez-vous déjà eu recours au dopage sanguin pour améliorer vos performances ? »
« Avez-vous utilisé d’autres substances interdites comme la testostérone, la cortisone ou les hormones de croissance ? »
« Oui ou non, avez-vous utilisé des produits interdits ou eu recours au dopage sanguin lors de chacune de vos sept victoires sur le Tour de France ? »
Cinq questions auxquelles Lance Armstrong est prié de répondre par « oui » ou « non ». Cinq fois, il répond « oui ». L’Américain avoue. Quasiment quatorze ans après son premier maillot jaune sur le Tour de France, il reconnaît avoir triché. Ce n’est pas tout à fait le point final, mais presque. « La vérité est avérée, dit Damien Ressiot, ancien journaliste à L’Equipe qui a révélé « Le mensonge Armstrong » en 2005. Mais quand je vois ça, j’aimerais savoir comment il gère cette vérité. Lance Armstrong, comme mec, m’intéresse beaucoup. Parler de ça avec lui m’intéresse beaucoup, même s’il ne se départi pas de son cynisme insupportable. »
Des aveux choisis
La personnalité du Texan, c’est ce qui continue d’alimenter les discussions et les analyses qui suivent ses aveux. A-t-il tout dit ? Définitivement non. En ne parlant pas de ceux qui l’ont couvert, en refusant de mouiller qui que ce soit, en niant aussi s’être dopé avant son cancer intervenu en 1996, il ne fait pas toute la lumière, loin de là. Cet entretien est un soulagement pour lui. Mais faire acte de transparence lui coûterait trop – au propre comme au figuré. Beaucoup parlent d’aveux choisis. « L’entretien n’est pas allé assez loin », regrettera David Walsh, co-auteur de L. A. Confidentiel, auprès de la BBC. Armstrong, acculé et par peur du parjure, confesse seulement ce qui ne peut plus être nié.
Le responsable de ces aveux porte un nom : Travis Tygart. Le directeur de l’USADA, l’agence anti-dopage américaine, n’a pas éveillé les soupçons au sujet de Lance Armstrong. Mais il a réuni tous les éléments qui devaient permettre de le faire tomber. Tout ce qui était sorti presque dix ans plus tôt dans L. A. Confidentiel se retrouve là, en plus détaillé, avec davantage de témoins. Tout le travail de Jeff Novitzy, agent de la FDA (Food & Drugs Administration) est repris lui aussi. Travis Tygart réunit les pièces du puzzle. Frankie Audreu, Floyd Landis et Tyler Hamilton ont déjà expliqué ce qu’ils savaient, publiquement ainsi que face à la justice. Les autres vont suivre : David Zabriskie, Levi Leipheimer, Christian Vandevelde, Tom Danielson, Michael Barry et même George Hincapie, le grand ami de Lance Armstrong.
Contre-attaque avortée
Fidèle à lui-même, le Texan va d’abord faire face. « Au contraire de beaucoup de mes accusateurs, j’ai couru comme athlète pendant 25 ans sans avoir de pic de performance, j’ai passé plus de 500 contrôles – moins en réalité, ndlr – sans jamais être positif, explique Armstrong sur son site internet. Que l’USADA ignore cette différence fondamentale et m’attaque au lieu des dopés avérés dit davantage au sujet de l’USADA, de son manque d’équité et de cette vendetta que de ma culpabilité ou de mon innocence. » En juillet 2012, les avocats d’Armstrong iront même jusqu’à attaquer l’USADA en justice, en vain. Ils abandonneront les charges quelques semaines plus tard.
« Enough is enough », explique alors l’Américain. Il ne reconnaît pas encore sa culpabilité mais reconnaît qu’il ne veut plus se battre. En vérité, Lance Armstrong espère qu’en ne poursuivant pas l’USADA, le dossier monté par Travis Tygart ne sera pas rendu public. Nouvelle erreur de jugement de l’Américain. En octobre 2012, les plus de 1000 pages rédigées par l’agence américaine anti-dopage sont publiées. Vingt-six témoins sont cités, parmi lesquels onze anciens coéquipiers de Lance Armstrong, racontant ce que l’USADA décrit comme « le plus sophistiqué, professionnel et fructueux programme de dopage que le sport n’ait jamais vu ». Avant même les aveux de l’Américain chez Oprah Winfrey, le monde est informé. Et le monde prend ses dispositions.
Cynique pour l’éternité
Dans le milieu, certains défendent le Texan – Miguel Indurain, Alexandre Vinokourov, Alejandro Valverde. L’UCI, elle, ne peut plus couvrir l’Américain. Quelques jours après la publication du rapport de l’USADA, elle annonce retirer à Lance Armstrong tous ses résultats depuis 1998. De 1999 à 2005, le Tour de France se retrouve alors sans vainqueur. Une décision inédite. Travis Tygart, l’homme qui a incarné la chute de l’idole, reçoit lui plusieurs menaces de mort. « L’opinion américaine doit être partagée, forcément, reconnaît-il dans L’Equipe. Certains m’en veulent terriblement et d’autres comprennent qu’il n’y a pas d’autre choix que de faire respecter les procédures, pour Armstrong comme pour tout autre citoyen. »
Pour l’Américain débute un long processus de réhabilitation, loin d’être terminé sept ans après. « Je vais passer le reste de ma vie à m’excuser », avait-il dit à Oprah Winfrey lors de ses aveux. Il n’a pas arrêté depuis. Face à la presse ou intimement, il a rencontré certains des acteurs qu’il a parfois humilié pendant plusieurs années. Tous n’ont pas réussi à lui pardonner. Ce qui n’empêche pas qu’Armstrong continue de fasciner. Les journalistes qui ont tenté de le faire tomber reconnaissent presque unanimement que l’homme était intéressant. « Avec ce type-là, on avait des interviews brillantes, assure Pierre Ballester, co-auteur de L. A. Confidentiel. J’aimais parler avec lui. » Damien Ressiot, lui, veut croire, surtout, qu’Armstrong est sur la bonne voie. « Depuis un certain temps, et notamment depuis l’entretien avec Oprah, il est quand même sur le terrain de la vérité », note-t-il. Avant d’ajouter : « Même s’il reste aussi sur celui du cynisme. » On ne changera jamais complètement Lance Armstrong.
Juillet 1999 : Révélation par Le Monde d’un contrôle positif d’Armstrong à un corticoïde pendant le Tour de France. L’Américain le justifiera avec une ordonnance antidatée pour une crème contre les hémorroïdes.
2001 : David Walsh révèle avant le départ du Tour dans le Sunday Times les relations entre Lance Armstrong et le Docteur Michele Ferrari.
Juin 2004 : Publication de L. A. Confidentiel par Pierre Ballester et David Walsh.
Août 2005 : Publication dans L’Equipe d’une enquête de Damien Ressiot où sont révélés six échantillons positifs de l’Américain lors du Tour 1999.
Juin 2006 : Témoignages de Frankie et Betsy Andreu face à la justice, puis dans L. A. Officiel (en octobre 2006), deuxième ouvrage de Pierre Ballester et David Walsh.
Mai & juillet 2010 : Témoignages de Floyd Landis dans le Wall Street Journal incriminant Lance Armstrong.
Mai 2011 : Témoignage de Tyler Hamilton dans l’émission 60 Minutes de CBS, incriminant Lance Armstrong. Hamilton publiera ensuite en septembre 2012 son livre The Secret Race, encore plus détaillé.
2012 : Témoignages auprès de l’USADA de nombreux anciens coéquipiers de Lance Armstrong parmi lesquels George Hincapie, Levi Leipheimer, Christian Vandevelde, David Zabriskie, Tom Danielson ou Michael Barry.
Octobre 2012 : Décision de l’UCI de retirer ses sept Tours de France à Lance Armstrong et de le radier à vie après transmission du rapport de l’USADA.
Janvier 2013 : Aveux de Lance Armstrong à la télévision dans une interview accordée à Oprah Winfrey.
l’USADA décrit comme « le plus sophistiqué, professionnel et fructueux programme de dopage que le sport n’ait jamais vu »
C’est bien ça qui a decrédibilisé l’USADA à mes yeux… Cela prouve qu’ils voulait juste se faire un nom et du fric sur le dos d’armstrong, qu’ils ne connaissent rien ni au dopage, ni au cyclisme. C’est seulment pour ca que on a pu avoir un semblant de justice, alors que pour l’affaire puerto les espanyols se sont pressés de detruire tout les échantillons et tout le sport national les remercient pour ça.
La seule verité c’est tout simplement que ferrari était bien meilleur que les autres…
@Franck. Armstrong a bel et bien mis en place le système de dopage le plus organisé (connu) du sport pro. Les espagnols ont effectivement etouffé l’affaire puerto car tous leurs “champions” étaient impliqués. Mais le système Armstrong reste le plus élaboré, et, de plus, LA s’est comporté dans le peloton non pas comme le patron (comme l’on fait par exemple Merckx, Hinault , Coppi et d’autres encore) , mais comme un parrain mafieux (rappelons nous de Bassons). Il mérite très largement d’avoir été rayé de tous les palmarès. Ce type n’etait pas un sportif, juste un tricheur cynique, avide de pouvoir et d’argent.
sans mème le savoir le hazard fait que aujourd’hui ESPN va diffuser un documentaire sur Lance et lui mème y dit “je n’ai jamais créé le reseau de dopage le plus sophistiqué, c’ait banal dans le vélo ce genre de réseau, c’est juste que j’avais le meilleur medecin, c’est Eddy Merckx qui nous a présenter”
tout est dit, c’était evident mème avant cette déclaration pour ceux qui s’y conaissent un peu…
Si c´est Amstrong qui le dit on peut le croire ..
Quel écœurement… Cet homme a piétiné nos étés pendant des années. Le soulagement de sa chute ne m’a apporté aucun réconfort car le mal était fait. Les Tours saccagés ne reviendront pas. Même votre série d’articles, fort bien écrits et documentés au demeurant, me met mal à l’aise car elle me replonge dans ces années de rage contenue. J’ai été stupéfié du déni dont ont été capables une large proportion des spectateurs et téléspectateurs de ces années noires, aveuglés par leur envie de croire au mythe, et de croire qu’ils étaient eux-mêmes un peu plus forts en étant du côté du plus fort. Comme si encourager le “meilleur” faisait d’eux des acteurs de la victoire et qu’il en partageaient le mérite. J’ai également été médusé par ceux qui soutenaient l’amalgame en prétendant que tous étaient dopés et qu’Armstrong restait le meilleur. C’est méconnaître la modification de la hiérarchie provoquée par l’EPO qui n’apporte pas la même progression à chaque coureur professionnel. C’est méconnaître la différence de résultat entre une prise d’EPO et l’association EPO / transfusions / hormones et tout le reste. Sur le fond cela reste bien entendu du dopage, condamnable sans distinction. Armstrong insuffisamment dopé n’arrivat pas à… Lire la suite »
Hé oui un parfait miroir de nos modéles économiques où l´argent est roi ,où les requins se dévorent entre eux sans vergogne, où chacun souhaite une part du magot et ou, selon le niveau de son status, est contraint simplement de filocher sous peine de se faire ejecter du milieu qui le fait vivre .
Gentleman a tout dit
Le dopage n’est qu’un reflet de la mentalité d’Armstrong qui est un menteur né. Dans un article dont je n’ai plus la référence, un journaliste reprenait les impostures de la mythologie Armstrong. Entre autres, le fait qu’il se présentait comme “le plus jeune champion du monde de l’histoire” alors qu’il n’est que 3ème derrière Kares et Monseré.
Le journaliste recensait 4 ou 5 fausses infos, parmi lesquels “je n’ai jamais été contrôlé positif”, alors qu’il a été pris en 99 et a fourni un certificat médical a posteriori.
Amstrong aurait tout aussi bien put ne jamais tomber; la solidité de son système couplé à la puissance de l´UCI, ses nombreuses complicités, la force de ses partenaires financiers; ses appuis politiques, la force et les cotés pratiques de sa fondation ont faient de lui un intouchable pendant bien longtemps.
Mais il en voulait tjs plus.. Comme une sorte de spirale du pouvoir. Fricotant avec Geoges W Bush dans des sombres affaires de très gros sous; annoncant avec arrogance vouloir mettre la main sur le controle du cyclisme de haut niveau; nourissant des ambitions politiques . Ce fut je pense les principaux éléments détonateurs qui, malgrés les corruptions actives, ont poussés l´uci á l´enfoncer et le systeme de justice US à le confondre pour définitivement l´ecarter d´une trajectoire qui empietait trop sérieusement sur de bien gros poissons ..
Dommage de ne parler que d’Armstrong sur un peu tous les sites de cyclisme. Qui évoquera un jour les carrières des champions français oubliés de tous, les Laurent, Caritoux, Delion,Mottet et autres autrement plus sympathiques que le mortifère texan ?