Pas forcément attendu comme tel, le coup d’envoi du 103e Tour d’Italie n’a laissé aucun répit aux favoris qui s’imaginaient traverser la Sicile sans y laisser leurs plumes. Du contre-la-montre atypique à l’étape du jour, disputée à bloc, les quelques certitudes dont disposaient les observateurs se sont quasiment envolées, laissant un parfum de fraîcheur s’emparer de la course rose.
Les habitués bousculés
Dès le premier jour, la jeunesse, qui ne cesse de brûler les étapes depuis les victoires d’Egan Bernal et Tadej Pogačar sur les deux derniers Tour de France, a pris le pouvoir. Derrière Filippo Ganna, premier leader, João Almeida, Mikkel Bjerg, Tobias Foss ou encore Matteo Sobrero trustaient un top 10 coloré par une moyenne d’âge de moins de 26 ans. Les compteurs déjà bien enclenchés, la seconde étape, vers Agrigente, nous rappelant le sacre mondial de Luc Leblanc en 1994, a peut-être annoncé un scénario qui s’est encore répété ce lundi, à Villafranca Tirrena. Motivé et chouchouté pour sa première participation au Giro, un comble pour celui qui débuta sa carrière chez Liquigas et maîtrise la langue de Dante, Peter Sagan a buté sur un os. Samedi, il s’appelait Diego Ulissi, et aujourd’hui, c’était au tour du champion de France, Arnaud Démare, de le priver sur la ligne d’un succès qu’il avait pourtant provoqué en faisant exploser Fernando Gaviria dans l’unique col de troisième catégorie.
Le Slovaque compte désormais deux fois plus de deuxième place que de victoires sur les étapes de grands Tours, mais peut se vanter d’être dans le coup, après un Tour de France peu reluisant. Car dans une épreuve où la foudre est toujours prête à s’abattre sur quelques malheureux, bien d’autres ont déjà pris la porte. Miguel Ángel López et Aleksandr Vlasov laissent Jakob Fuglsang livré à lui-même, tandis que Geraint Thomas, déjà victime d’une collision avec une moto au pied du Blockhaus en 2017, n’a pu éviter un bidon errant lors du départ fictif de la troisième étape. Montant l’Etna, la température s’est franchement réchauffée, tout comme ses plaies au bassin, le contraignant à finir dans le gruppetto, avant l’inévitable abandon. Simon Yates, promis en 2018 au triomphe romain comme tout nouvel imperatores qui se respecte, n’a toujours pas renoncé à une course qui lui échappe franchement depuis deux ans. Victime d’une inexplicable défaillance hier alors qu’il avait dominé Tirreno-Adriatico en septembre, le Britannique est pointé à 3’48’’ de la tête de course. Rédhibitoire ?
Mais rassurés
Avant d’embarquer sur le détroit de Messine pour rallier le continent, deux hommes peuvent s’estimer relativement épargnés. Pourtant, tout n’avait pas idéalement commencé pour Vincenzo Nibali et Steven Kruijswijk, certainement happés par l’éblouissante cathédrale de Monreale, que le régional de l’étape connaît pourtant si bien. En déficit de puissance dans la longue descente chronométrée vers Palerme, ces messieurs qui s’étaient livrés un duel éprouvant durant l’édition 2016 ont perdu 1’29’’ et 1’44’’ sur Ganna, champion du monde de l’exercice, et plus d’une minute sur Geraint Thomas, qui ne cessait d’impressionner jusqu’alors. Venu se replacer en patron dans le final de la seconde étape, le Sicilien de l’équipe Trek-Segafredo a fait taire les critiques sur sa faiblesse supposée en prenant la huitième place d’un final pour puncheurs, avant de faire bonne impression dans l’ascension de l’Etna. Au général, son retard sur Thomas et Yates s’est effacé, et le voilà sixième, seulement devancé par Bilbao et Kelderman.
Un petit peu plus loin, Steven Kruijswijk a aussi montré qu’il faudrait compter sur sa ténacité tout au long des trois semaines de course, et que sa chute au Dauphiné était belle et bien derrière lui. Jakob Fuglsang, qui devance le coureur de la Jumbo-Visma pour deux secondes, a évité les chutes et les mauvaises surprises, mais n’a pas vraiment de quoi pavaner, puisqu’il ne pourra compter que sur Oscar Rodríguez pour l’épauler dans les grands cols alpins. La « vieille garde » de favoris, qui comporte Rafal Majka et Domenico Pozzovivo, semble bien identifiée, et toute l’équation des jours à venir dépend des facultés de résistance des jeunes talents désinhibés qui croquent le talon de la Botte à pleines dents. Maillot rose alors qu’il ne devait être qu’un équipier de Remco Evenepoel, João Almeida ne devrait pas s’arrêter en si bon chemin. Troisième du Tour de Burgos, septième du Tour de l’Ain et troisième de la Semaine Coppi & Bartali, le Portugais ne peut plus sauter du train. Et n’en déplaise à l’UCI, la victoire du champion d’Équateur, Jonathan Caicedo, sur les pentes du célèbre volcan italien, nous conforte dans ce sentiment que les normes semblent ébranlées pour quelques temps. Et ainsi jusqu’à Milan ?
Caicedo est équatorien, pas vénézuélien…
C’est corrigé, merci pour votre vigilance.
Super article, très bien écris et agréable à lire !
Oui Astana pas vernie avec aussi le covid de Lutzenko .. Dommage pour Vino qu´il n´ai pas reussi à garder Nibali ou Landa; surtout que le requin me semble etre le favoris numero 1 et qu´il n´a pas Roglic sur le porte bagage ..
Voilà un Giro qui s’annonce en tous cas (comme souvent !) bien plus intéressant et ouvert que le Tour !
effectivement la course s’annonce très ouverte, tant mieux pour le spectacle!
mais la raison de cela est un plateau incroyablement faible, surtout apres l’elimination sur chute de Lopez, Thomas et Vlasov. Le plus faible plateau pour un grand tour depuis très très longtemps.
La raison de cela est bien sûr le positionnement du giro dans le calendrier, nous retrouverons un niveau plus normal des l’an prochain
“un plateau incroyablement faible” !!!??? Fichtre, voilà qui devrait faire plaisir aux coureurs et aux quelques grands champions présents sur ce Giro, très mal placé, ça, j’en conviens ! Alors oui, c’est sûr, il n’y a pas les “stars” du Tour qui nous ont endormies et ennuyées pendant de longues semaines en nous offrant le spectacle affligeant d’une course (?) insipide, cadenassée et sans surprise (si ce n’est le coup de Trafalgar de Pogacar à la veille de l’arrivée à Paris) mais il y a quelques bons petits coureurs ;) quand même (je n’ose citer leurs noms !) capables de nous faire vibrer… Et ce début de Giro est plutôt prometteur ! C’est bien là l’essentiel, non ?
J’étais sceptique en début de saison quant au repositionnement condensé de toutes les courses. Finalement, ça permet de voir plein de choses inédites et c’est pas plus mal pour le spectacle. On ne va pas bouder notre plaisir !
Je ne suis jamais sceptique sur le Giro (concernant le plaisir à regarder cette course, le dopage c’est autre chose ;) ) Même si le plateau est en apparence moins relevé que d’autre course c’est pour moi presque toujours la plus belle course par étape de la saison. Ce qui montre bien que l’on a pas besoin d’avoir ceux qui vont le plus vite et des armadas pour avoir une belle course de cyclisme pleine d’ardeur et de tentative audacieuse.
Sur ce point j’avais été chagriné par une emission de roue libre qui affirmait que la décéption de l’année 2019 était le tour des Flandres car les chroniqueurs n’avaient pas vu une bagarre entre les “cadors”. Or moi je m’étais au contraire régaler à voir la victoire de Bettiol et EF1 lors de cette opus.
@DomdeLyon: que le tour soit ennuyeux, je suis tout a fait d’accord! Que le giro soit prometteur et esperons le passionnant, je suis la aussi d’accord! es-ce l’essentiel? plutot d’accord la aussi!
Il y a quelques quelques grands champions en course, toujours d’accord!
Il n’empeche, que si le tour est ennuyeux c’est justement parce que le niveau est TRES elevé! Et le Giro est passionnant car indecis et ouvert aux surprises plus que jamais c’est justement parce que le niveau est faible (bien sur c’est relatif, le niveau est plus élevé que sur les coures de l’Europe tour) . tout simplement parce que cette année plus que jamais, la quasi totalité des plus grands champions sont sur le tour. Alors oui, le plateau est très faible! d’ailleurs lorsque le nouveau calendrier est sorti, beaucoup ont dit que le giro etait sacrifié
Nibali et Fulgsang sont les deux grands favori aux départ de ce Giro et ils sont bien présent. Lopez sortait du Tour de France donc ne pouvait pas être competitif et allait avoir un rôle d’équipier, Thomas on ne sait pas vraiment quel niveau il a véritablement et Vlasov n’était pas vraiment le leader de l’équipe et réalise il me semble sa première course de 3 semaine et tout le monde n’a pas la chance d’avoir les même soigneurs que Pogacar (sur ce point je crois que vous serez d’accord). Il me semble d’ailleurs que ce dernier et adhérant à titre personnel au MPCC.
@Tywin: Personnellement j’adore Nibali , c’est vraiment un champion fantastique, mais il a 36 ans, il n’a clairement plus le niveau qui a été le sien.
Meme chose pour Fulgsang, il a 35 ans, sa meilleure perf sur un grand tour est 7 ieme en 2013
Le simple fait de mettre comme favori ces deux coureurs montre bien le faible niveau du giro,
Entièrement d’accord, et quand on voit le sprint d’aujourd’hui…les trains sont très faibles et les sprinters pas au niveau. Tant mieux pour Démare!
Je ne pense pas qu’un seul coureur du giro aurait pu faire un top 10 sur le tour cette année. Cela étant dit cela n’enlève rien a son intérêt dramaturgique mais le prestige en prend un coup
Qu´un seul coureur du Giro aurait pu faire un top 10 sur le Tour ! J´aime bien ce second degrés ..
Je ne doute pas que vous adorez Nibali mon cher henri tout comme moi. Cependant je ne peux vous suivre sur la faiblesse du plateau. Oui le plateau est relativement plus faible que le Tour de France. Toutefois le plateau ne me semble pas plus faible que les années antérieurs du Giro. Nibali est devant Roglic l’année dernière et je ne pense pas qu’il ait régressé de manière significative depuis l’année dernière. Fulgsang est particulièrement brillant depuis deux ans sur toutes les courses auxquelles il participe (classique et course par étape) devant tout le gratin mondiale (n’oublions pas qu’il tombe sur le tour ce qui peut biaiser notre analyse) et Kruijwick est quand même le troisième du tour de l’année dernière. Par ailleurs Démare est sûrement le meilleur sprinter cette saison et ce bat théoriquement contre des sprinters (peut être en méforme cette année) qui performaient l’année dernière ou tout du moins que l’on placé supérieur à Démare: Viviani et Gaviria et il se bat face aux champions des classements par point: Sagan et Mathews. Voila compte tenu de cette subjectivité je ne peux me résoudre à qualifier ce plateau d’incroyablement faible. Mais bon c’est peut être chipoter sur des… Lire la suite »
En effet pour Démare il est juste énormissime depuis la repris, au point qu’on peuyt regretter le chevauchement PR giro. Méforme des autres c’est sur, aujourd’hui dans les 10 il y a felline, molano, cimolai, vendrame, battaglin…il manque bonnifazio et on se fait la semaine coppi et bartali.
Au GC bilbao, kelederman, pozzovivo, konrad…allons.
Les seuls noms ronflants encore en course sont donc nibali, Kruijswijk et fulsang. D’accord je provoquais en disant qu’ils n’ont pas leurs places dans le top du TDF, mais de la a dire que ce giro est volcanesque, bon jeu de mot avec l’etna (:, il ne faut pas éxagérer.
Ces dernières années c’était sans conteste le grand tour le plus spectaculaire et ou l’on vibrait a chaque, mais cette année, au dela du plateau, on se fait royalement chi..
chacun son point de vue! une précision tout de même , je ne parlait que des coureurs pour le classement général, pour les sprint, le niveau est tout a fait conforme au plateau habituel avec cette année Demare, Gaviria, Viviani, Sagan, Mattews…
Un plateau incroyablement faible.. Et ca rapporte 6 like cette annerie.. Impressionnant !
Evidemment tout est relatif mais si on regarde le nombre cumulés de podiums en grand tour des coureurs encore en liste sur ce giro, on constate que ce nombre est très bas. A l’exception de Nibali (et Yates ou Kruisjwick dans une moindre mesure) combien ont réellement brillé sur les grands tours ? On attend toujours une confirmation de Fuglsang à 34 ans et Majka, Pozzovivo ou Kelderman n’ont jamais réussi à s’installer parmi les tous meilleurs même s’ils ont accompli quelques performances très honorables. Pour une course de légende comme le Giro, je trouve donc que le plateau est faible cette année. Le calendrier et l’abandon de plusieurs très bons coureurs dès les premiers kilomètres l’expliquent en grande partie. Le plateau sur le Tour était beaucoup plus relevé ce qui malheureusement ne garantit pas une plus bellle course. C’est même plutôt l’inverse et je m’attends à un très beau Giro (d’autant que les équipes sont beaucoup plus faibles, on a déjà pu le constater à l’Etna).
Toi tu ne dois pas connaitre grand chose au cyclisme!
Sommes nous véritablement obligé de nous abaisser à des invectives ?
Pas cool @paul cette remarque ! :( On peut ne pas être d’accord mais respecter le point de vue de chacun-e… et débattre dans des termes cordiaux !
oui effectivement, mais @highlander taxe mes propos “d’annerie”, d’ou ma réponse …
“Et n’en déplaise à l’UCI,”
J’ai dû raté un épisode, mais je ne comprends pas en quoi cette victoire ne plairait pas à l’UCI…
Même si une victoire de Démare me ferait aussi plaisir, j’aimerais beaucoup que Peter Sagan remporte le classement par points. Le slovaque et son équipe devraient en tout cas animer les étapes de plaine, ça va être sympa à suivre
Sur les maillots fantaisistes d’Education First : https://www.rtbf.be/sport/cyclisme/detail_tour-d-italie-ef-pro-cycling-recoit-une-amende-de-500-francs-suisses-par-coureur-pour-son-maillot?id=10600070
Fuglsang a en tout cas une sacrée opportunité d’obtenir enfin un podium en GT (ce serait quand même étonnant de voir un podium en GT la même année de Porte et Fuglsang, ces deux-là étant quand même habituellement peu en réussite sur trois semaines)
Deux coureurs qui ont commencé chez Saxo Bank des frères Schleck et Cancellara et qui avaient la pancarte de grand espoir.