Dix-neuf. C’est le nombre de jours qui séparent la première classique flandrienne, ce mercredi à La Panne, de l’arrivée à Roubaix, le 14 avril prochain, qui sonnera comme le tombé de rideau de la campagne des courses pavées. Les deux semaines et demies les plus passionnantes et les moins prévisibles de la saison. Encore plus cette année.

D’un pavé glissant à une épaisse poussière blanche

Il y a trois ans, au lendemain d’un Paris-Roubaix remporté par Mathew Hayman et après quasiment trois semaines de rebondissements, nous écrivions une « Ôde aux flandriennes ». C’est à la fin du bal qu’on paye les musiciens et cette année-là, s’il avait véritablement fallu sortir le chéquier, l’addition aurait été salée. Boonen, Cancellara, Sagan, Van Avermaet, Kwiatkowski, Vanmarcke, tous avaient répondus présents, tous s’étaient tirés la bourre, même si au moment de faire les comptes, certains repartaient bredouille. Depuis, tout a un petit peu changé, parce que le Belge et le Suisse, si souvent adversaires, ne sont plus là. Mais ils ont trouvé en Sagan et Van Avermaet, notamment, de nobles successeurs, désormais tous les deux titrés sur les Monuments pavés, et les deux semaines et demies qui vont aujourd’hui de La Panne – depuis le déplacement d’A Travers la Flandre – jusqu’à Roubaix restent les plus excitantes de l’année.

C’est tout l’amour d’un pavé glissant ou d’une poussière blanche qui s’envole dans le ciel, selon la météo du jour, qui nous revient en mémoire en cette fin de mois de mars. Comme si depuis l’an dernier, nous avions oublié. On a bien eu une piqûre de rappel, fin février, avec le week-end d’ouverture, qui n’a d’ailleurs pas manqué de spectacle. Mais c’est toujours un peu trop court pour vraiment s’y remettre. Pas suffisant pour avoir sa dose. Pire, c’est comme avoir le droit de voir ses cadeaux de Noël le 24 au soir, au pied du sapin, mais être forcé d’attendre le 25 pour les ouvrir. Et ce mercredi après-midi, c’est comme si tous les enfants de Belgique et d’ailleurs étaient autorisés, en même temps, à aller découvrir leurs nouveaux jouets. L’arrivée à La Panne, promise aux sprinteurs, n’offrira pas tout à fait la même mise en bouche qu’autrefois A Travers la Flandre, depuis déplacée entre Gand-Wevelgem et le Ronde, mais ça n’en rendra que meilleur le festin qui suivra.

Un cornet de frites à la main

Parce que les pavés sont imprévisibles et qu’on ne peut pas s’y cacher, dans un mauvais jour, les classiques qui arrivent révèlent les vrais patrons. La hiérarchie après Paris-Roubaix est sans nuance et elle ne place jamais d’usurpateur en haut du pavé. On peut gagner une flandrienne sur un coup de dés, mais pas dominer la campagne. Cet honneur est réservé à quelques forçats bien à part. Cinq ou six, jamais plus, en début de printemps, peuvent y prétendre. Depuis dix ans, on a parfois été capable de voir venir le patron des flandriennes. Sagan et Van Avermaet, ces dernières années, étaient par exemple attendus au tournant et ils ont assumé. Mais 2019 est un cru un peu particulier, sans doute plus ouvert qu’à l’habitude. Les prétendants ne sont pas plus nombreux, parce qu’on n’intègre pas ce cercle si facilement. Mais la hiérarchie, entre eux, est plus floue qu’à l’accoutumée.

Peter Sagan, assez discret depuis le début de saison, arrive avec moins de certitudes que les années passées, et désormais, il a déjà gagné le Tour des Flandres et Paris-Roubaix. Greg van Avermaet, avec un nouveau maillot sur le dos et toute la pression de son équipe, démarre lui la campagne sans avoir impressionné, depuis le début d’année, et toujours à la conquête d’une victoire sur le Ronde. Zdenek Stybar, Yves Lampaert et Philippe Gilbert doivent se partager un leadership vacant, chez Deceuninck-Quick Step, depuis le départ de Niki Terpstra chez Direct Energie, dont on attendra de voir s’ils peuvent peser sur ces classiques. Oliver Naesen, impressionnant il y a deux ans et de nouveau le week-end dernier sur Milan-Sanremo, pourrait revenir dans la bagarre, comme l’éternel Sep Vanmarcke, qui court encore derrière autre chose que des podiums. Reste à admirer et à profiter du spectacle. Si possible avec un cornet de frites dans la main gauche et une bière dans la main droite, debout dans un mont pavé.

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