Dans un palmarès, il y a des victoires qui laisseront un souvenir impérissable, en plus d’être consignées dans le livre d’or de l’épreuve. Julian Alaphilippe avait déjà connu ça sur la Flèche Wallonne, mais ce n’est pas faire offense à nos amis belges que de placer la “Classicissima” dans une galaxie supérieure. En état de grâce, le Français s’est payé les monstres sacrés du peloton, pour l’un des plus beaux tops 10 de ces dernières années.
Impitoyable dans la Via Roma
Quand les charmes touristiques d’une vieille dame de 110 ans défilent sous le soleil printanier, il serait si facile de se laisser déconcentrer par la portée de l’événement. Moins par les bêtises de quelques irresponsables au sommet du Capo Berta, mais par la détermination de tout un chacun dès que la route s’élève, prêt à affronter le Poggio comme la montée d’une vie. Peu déstabilisés par l’étrange attaque de Niccolo Bonifazio dans la descente de la Cipressa, les Deceuninck – Quick Step ont repris le costume du père fouettard, qu’ils étrennent si bien. Gilbert et Stybar ont asphyxié tout le monde dans les premiers lacets, et quand on a vu le champion d’Italie Viviani se tortiller à l’arrière du peloton, tout le monde a compris. C’était Alaphilippe ou rien. Nerveux, sans doute, il n’a pas tout à fait dégainé le premier, laissant cet honneur à Simon Clarke. Mais il a été le premier des gros, quand même, à oser sortir. Parti très fort dans les pentes les plus dures, il a bouché le trou, avec de sacrés clients sur son porte-bagage, pendant que ses équipiers s’étaient tous garés, pour mieux frissonner à travers les oreillettes.
Dix minutes plus tard, on avait donc un sprint de costauds, comme en 2011. Sûrement plus simple à gérer qu’un sprint massif, mais plus compliqué qu’un sprint à deux ou à trois. Il y a deux ans, d’ailleurs, Alaphilippe n’avait pas pu sauter Kwiatkowski et Sagan, et s’était contenté d’un premier podium qui l’avait déçu. Interrogé à chaud avant de savourer sur le podium, le Français l’a redit au journaliste de la Rai. « Je ne voulais plus terminer deuxième ». Il n’y avait pas d’urgence pour un coureur qui termine plus souvent vainqueur que placé. Mais qui n’était décidément pas intimidé au moment de débouler sur la via Roma. Sa gestion des six cent derniers mètres fut imparable. Pas pris à défaut par Mohoric, il a enterré Sagan en accélérant lorsque le Slovaque regardait ailleurs. Quant à Matteo Trentin, peut-être intrinsèquement plus rapide, il s’était condamné tout seul en partant en facteur un peu plus tôt. Et voici « Alaf’ » fort d’un palmarès de “fuoriclasse”, au terme d’un mois de mars exceptionnel.
Une victoire à donner le tournis
Strade Bianche, deux étapes sur Tirreno-Adriatico, et Milan-Sanremo, il n’y en a eu que pour lui depuis quinze jours. Comme s’il avait fait de cette quinzaine son objectif numéro un de l’année, alors qu’il s’agit plutôt des classiques ardennaises. Mais au moment de faire les comptes en décembre, personne ne lui reprochera d’en avoir fait un peu trop les premiers mois de l’année, tant cela valait le coup. Sa dynamique ascendante date déjà de plusieurs années, mais cette fois-ci, il semble avoir éclipsé les frères ennemis Sagan-Kwiatkowski qui se sont taillés la part du lion sur les plus belles courses d’un jour. Même le vétéran arc-en-ciel Valverde, protagoniste dans le final, n’a rien pu dire. Le top 10 parle pour lui-même, et les temps d’ascension du Poggio aussi. Comment en aurait-il pu être autrement avec un casting de rêve comportant Nibali, van Aert, Naesen, Trentin, ou encore Dumoulin ? La densité exceptionnelle de non-sprinteurs au départ de Milan laissait entrevoir un grand feu d’artifice final. On a été gâtés. Voire privilégiés, si on note que les deux derniers Monuments ont été remportés par deux coureurs français différents.
Les Transalpins retiendront qu’il s’agit du premier coureur Quick-Step à s’imposer chez eux depuis Filippo Pozzato en 2006, une éternité pour une formation qui marche sur l’eau. Mais dans l’Hexagone, on jubile de voir cette génération dorée briller sur tous les terrains. Parce que pendant vingt ans, du sacre de Laurent Jalabert à celui d’Arnaud Démare, les Tricolores ne mettaient pas un pied devant l’autre sur la “Primavera”, et que désormais, ils viennent de s’adjuger deux des quatre dernières éditions. Peut-être parce que plus que jamais, cela paraît bien parti pour se prolonger, tant Alaphilippe hérite déjà d’une pancarte grosse comme une maison pour Liège-Bastogne-Liège en avril, et avant ça l’Amstel et la Flèche. Inutile de prédire, sans chauvinisme, que l’atmosphère sonore autour du bus de son équipe sur les routes du prochain Tour de France sera retentissante. Tout s’offre à lui, et Patrick Lefevere le sait bien. L’image de ses quatre coéquipiers main dans la main au moment de franchir la ligne une minute après l’illustre à merveille. Le patron, c’est bien Julian.
Très bel article pour mettre à l’honneur la superbe victoire d’Allaphilippe ! Une solide équipe autour de lui , les jambes de feu , la justesse tactique et hop l’affaire était dans le sac . Quand on pense que Julian n’a que 26 ans on se dit qu’il a encore l’avenir devant lui et qu’il n’est qu’au début d’une immense carrière . Deceunink quick step est intraitable sur les classiques cette saison cela promet pour la suite du printemps !
Je n’ai pas compris pourquoi Trentin n’a pas attendu le sprint.
Vous n’êtes pas le seul.
Il s’enterre tout seul c’est fou, c’était le plus rapide au sprint à mon avis ( Sagan un peu court au niveau de la forme)
Si on est sévère, on peut même dire qu’il fait deux années de suite la même erreur. Il avait placé le même démarrage au même endroit l’an dernier en espérant reprendre Nibali, alors qu’à mon avis (simple béotien), il aurait pu claquer le podium voire mieux “si” le Sicilien était repris.
Sa condition de début 2019 était vraiment impressionnante, à voir si il peut jouer les premiers rôles sur le Tour des Flandres par exemple.
On lui tombe dessus, mais c’était pas si mal joué de sa part. Sans un Van Aert qui fait l’effort pour le groupe, Trentin avait fait le trou et Sagan n’allait pas boucher le trou.
Il sera à suivre sur les flandriennes, dès Gent – Wevelgem.
Les mecs se connaissent bien et Trentin n´est pas un débutant; je pense que s´il a tenté le coup c´est qu´il savait sa pointe de vitesse insuffisante pour cette gagne .
Quelle belle fin de course ! Ce petit groupe de 7 coureurs échappés dans le Poggio déclenche, après l’orage lactique de la fin d’ascension, une phase tactique. Comment ne pas se régaler devant un si beau spectacle ? Superbe millésime avec un superbe vainqueur.
Et que penser du 6e ? Wout Van Aert à un tel niveau, il fallait l’imaginer ! Qui l’arrêtera dans les Flandriennes, celui-là ?
Du vélo enthousiasmant !
l’orage lactique. très belle image.
Peut-être Naesen ?
Finalement, celui qui m’a le plus surpris aujourd’hui !
oui je suis d’accord c’est Naessen qui a le plus surpris! ca tombe bien j’aime bien ce coureur ! On ne peut pas dire que la victoire de Julian est une surprise , il etait mentionné par tous comme le favori. Je ne suis pas non plus étonné par Van Aert, je m’attendais a sa présence dans les meilleurs en haut du Poggio
van Aert, Clarke et Mohorič sont les belles surprises de ce groupe de costauds ! Bluffé par Julian aussi, son sprint à Tirreno n’était donc pas un coup du hasard, il a bien progressé dans cet exercice. Après cette victoire, difficile d’imaginer quelles sont les limites du garçon !
Astana s´est bien trouée sur ce final .
Chapeau Alaph encore une !
Paf en plein dans le mille malgrés la grosse pancarte. Il a magistralement manoeuvré la crème du gratin. Il court comme un vieux briscar maintenant; placement, coup d´oeil, décision, coup d´avance; que de progrés. Ce garcon à maintenant le potentiel pour devenir champion du monde; Il demontre une fois de plus qu´une bonne pointe de vitesse est un atout maitre pour se batir un palmarés de legende sur ces classiques tant convoitées .
Assurément, “LE patron, c’est bien Julian”, tout est dit ! Quel champion et… quelle équipe, encore une fois ! Si la victoire “chanceuse” de Démare pouvait quand même susciter quelques commentaires (chutes et problèmes mécaniques de principaux rivaux dans les derniers hectomètres), celle-ci, décrochée de main de maître, ne souffre aucune contestation. C’est la magnifique victoire d’un déjà immense champion qui cache malheureusement la pauvreté du cyclisme français de ce début de saison au plus haut niveau (mis à part… son coéquipier Sénéchal). Oui oui, je sais, tous les autres attendent LE Tour pour finir premier… français mais ne brillent pour l’heure que par leur paroles.
Quand à Van Aert, j’ai hâte de le voir sur Paris-Roubaix et les Flandriennes. En cyclo-cross, bien sûr, mais aussi déjà sur quelques courses l’année dernière il avait exprimé son talent (3è des “Strade Bianche”, sa “première” course) et son potentiel. N’oublions pas que c’est sa première véritable année de “routier” ! Il promet ! Et nul doute que ce magnifique Milan San-Remo nous promet un bien beau printemps de vélo ! :)
Vous êtes dures avec les français (hormis Alaphilippe et Sénéchal). Bardet ne pouvait pas espérer beaucoup mieux qu’une 5e place sur Paris-Nice, Pinot a plutôt bien démarré sa saison, Madouas, Molard, Vuillermoz, Turgis ou Calmejane se sont montrés à leurs avantages ces dernières semaines (ok essentiellement sur le calendrier français), les sprinteurs sont relativement en retrait… Surtout, je trouve ça encore un peu tôt pour faire un premier bilan : quelles sont les courses passées “qui comptent” à l’heure du bilan de fin d’année ? Le weekend d’ouverture des flandriennes, les Strade, Paris-Nice, Tirreno, Milan-San Remo. Alors on peut regretter que seul Alaphilippe ait pu véritablement tirer son épingle du jeu. Qu’aujourd’hui encore, il n’y ait pas eu d’autres français dans ce groupe de costauds, dans cette dream team, mais rappelons que seuls la Belgique et l’Italie, ont deux coureurs placés.
Oui, c’est vrai, je suis sans doute un peu sévère… Il y a eu aussi Laporte (leader de la cofidis) au “Tour de Provence” (si je ne me trompe pas)…
Gaudu fait 3eme aux Émirats et Pinot/Bardet font tous les deux 5 sur leur première WT de la saison, ça reste quand même très honorable.
Le premier qui attaque sur Poggio c’est Bettiol, pas Clarke:
https://twitter.com/EFprocycling/status/1109499236918267910
– Top 10 royal !
– Valverde “que” 7e ? Quand je l’ai vu dans le groupe j’étais pourtant pas serein.
– 1ère victoire sur un Monument en disque il me semble.
Premier post mais put*** quel bel article.
Je me suis dit la même chose en le lisant.
il peut nous en refaire un aussi bon pour la Doyenne .
Gilbert et Stybar ont été monstrueux, ils vont faire mal dans les flandriennes
Le gros raté c’est tout de même Van Avermaet
Naesen a couru au millimètre, mais trop esseulé et un poil pas assez rapide (mais en progrès). Sera-t-il suffisamment épaulé pour le Ronde ? Superbe.
Quand est-ce que Tim Declercq sera-t-il désigné pour courir pour lui-même ?