Il est des garçons pour qui la vérité d’une saison n’est pas celle de la suivante. Et puis il y a Alejandro Valverde, pour qui les années se suivent et se ressemblent, toujours dans l’excellence. Alors qu’il approche de la quarantaine, l’Espagnol est en passe de décrocher un nouveau podium sur un grand tour. On ne l’aurait franchement pas prédit avant le départ.

Insensible aux années

Il y a encore trois semaines, quelques jours avant que ne s’élance la Vuelta, on avait du mal à mettre des mots sur le rôle qu’allait tenir Alejandro Valverde. Avec Richard Carapaz et Nairo Quintana comme coéquipiers, on l’imaginait lieutenant de luxe, pas vraiment capable de se détacher complètement du classement général, mais en marge de la lutte pour le maillot rouge, tout de même. Les circonstances ont fait que, finalement, Valverde fait du Valverde. Carapaz a déclaré forfait, Quintana n’offrait pas toutes les garanties nécessaires, alors le Murcian a joué placé sur les dix premiers jours de course, persuadé que tout s’éclaircirait après le contre-la-montre, où Quintana, pourtant leader, a sombré. Depuis, le bientôt quarantenaire, 39 ans pour encore quelques mois, ne cesse de bluffer son monde. Primoz Roglic semble intouchable depuis dix jours, mais son premier poursuivant est bien le champion du monde.

« Papy, tu n’as pas dit ton dernier mot », plaisantait un reporter espagnol, il y a quelques jours, en s’adressant à l’Espagnol. « Non, pas encore », souriait l’intéressé. Cela fait un moment que les moins optimistes ont prédit le déclin de Valverde. Plusieurs années, pour être plus précis. Mais ça ne vient pas. Le bonhomme a connu un printemps plus délicat qu’à son habitude, cette année, mais avait décidé d’honorer comme il se doit le maillot arc-en-ciel décroché en Autriche, il y a bientôt un an. C’est finalement sur ses routes, là où il a gagné le seul grand tour de sa carrière, qu’il aura donc réussi à se sublimer, quel que soit le résultat final à Madrid, dimanche. A quatre jours de l’arrivée, Alejandro Valverde, une victoire d’étape, est troisième du général – derrière un Quintana qui a su prendre la bonne échappée, mercredi – avec pas loin d’une minute d’avance sur Tadej Pogacar.

Ne pas craquer, cette fois

On a presque envie de dire que c’est aussi bien que lors de ses meilleures années, mais si les positions restent figées, ce sera même mieux que ces dernières saisons, car le dernier podium du garçon sur la Vuelta remonte à 2014. En montagne, Valverde n’a même pas eu à rougir face à Roglic et Pogacar, peut-être un peu plus costauds, mais qui ont rarement fait craquer le vétéran. On a compris assez tôt, d’ailleurs, que le garçon serait dans la course, une impression confirmée par sa victoire à Mas de la Costa. Chez Movistar, aussi, on a réalisé que le patron en interne s’appelait Valverde, et on peut parier que le rapproché de Quintana n’y changera rien. Dans le cœur d’Unzué, c’est l’Espagnol qui compte le plus. Sur la route, c’est aussi le plus fiable, et le Colombien, qui a repris du temps grâce à une échappée, a peu de chances de tenir la cadence sur les dernières étapes de montagne, s’il garde le niveau de sa deuxième semaine. Le champion du monde, lui, va devoir gérer ses vieux démons. Il y a un an, dans les mêmes conditions, il avait perdu son podium à seulement vingt-quatre heures de l’arrivée. Un deuxième échec du genre ferait tâche.

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