Largement en retrait sur les classiques ardennaises, Alejandro Valverde semble céder la place à la nouvelle génération. À 39 ans depuis la semaine dernière, le Murcian conjugue de moins bonnes jambes à une approche différente pour sa fin de carrière. Il veut se tourner vers de nouveaux objectifs, où le plaisir rentre un peu plus en ligne de mire.

Dures dures ardennaises

Dimanche sur Liège-Bastogne-Liège, à un peu plus de cent kilomètres de l’arrivée, Alejandro Valverde rentrait dans la voiture de son équipe. Caché par son imperméable, le porteur du maillot irisé quittait la course prématurément, presque dans l’indifférence générale. Les conditions n’aidaient pas, mais l’Espagnol n’avait visiblement pas assez récupéré de sa dernière semaine compliquée. « Il est plus proche de ses 40 ans que des 30 et il récupère bien moins vite, c’est incontestable », explique Christophe Moreau qui l’a côtoyé à la Caisse d’Épargne. Quand certains réalisent une campagne exceptionnelle, à l’instar de Jakob Fuglsang sur tous les podiums, Valverde prend le chemin inverse. Petit florilège de chiffres. Sur l’Amstel Gold Race, il terminait 66e : il n’était pourtant jamais sorti du top 50 depuis presque trois ans, soit 208 jours de course. Sur la Flèche Wallonne, le maître des lieux de la dernière décennie arrivait 11e en haut du mur de Huy, une première depuis 2012. Une saison où il revenait de suspension et était tombé sur le Tour de Catalogne, un mois plus tôt. Enfin sur Liège, il a connu son premier abandon en 14 participations.

Au terme des classiques, soit après quatre mois de compétition cette saison, l’Espagnol ne compte donc qu’un seul petit succès dans la besace, acquis sur l’UAE Tour. Un bilan famélique pour lui, habitué à gagner énormément. La dernière fois qu’il affichait un total aussi faible à ce stade de l’année, c’était en 2002, lors de sa première saison chez les professionnels. C’est le grand écart. Du côté de Movistar, on s’est donc appliqués, depuis quelques semaines, à trouver des explications à cette panne de résultats. Raison finalement invoquée : un surplus d’entraînement et des sollicitations en hausse auprès des publicitaires, cet hiver. On pourrait aussi citer le scénario de certaines courses, pas forcément à son avantage. A Liège par exemple, le parcours était fait pour favoriser des attaques lointaines, alors que Valverde avait pris l’habitude d’attendre la côte d’Ans pour régler tout le monde – en 2015 et 2017 particulièrement. Mais ça fait léger comme excuse, surtout que l’Espagnol, pour le coup, a baissé pavillon bien avant la bataille, dimanche.

Lucide et pas encore à la retraite

Mais Valverde, par son expérience, incite à la prudence. Il a souvent été enterré. Il est toujours revenu décrocher de grandes victoires. « Il fait partie de ces coureurs tellement brillants que dès qu’il ne gagne plus, la saison paraît un peu terne, voire terminée », explique Moreau. Sur Milan-Sanremo, la classique des sprinteurs, l’Espagnol a terminé septième. Deux semaines plus tard, sur le Tour des Flandres, il prenait la huitième place. Pas si mal pour un presque quadra. D’ailleurs, son expérience en Belgique est symbolique. C’était une première pour l’Espagnol, désireux de découvrir une nouvelle atmosphère, de sortir de ses schémas habituels, et qui se sent presque investi d’une mission depuis qu’il porte le maillot de champion du monde. Régulièrement, d’ailleurs, le sujet revient en interview. « C’est la plus belle victoire de ma carrière, celle dont j’ai rêvé durant toutes ces années » avouait Valverde en octobre dernier. Il ne dit pas autre chose, depuis.

Son soulagement d’enfin décrocher ce titre mondial a peut-être entraîné une forme de décompression, après quatorze années dans le peloton professionnel. « Il marque le pas physiquement, physiologiquement, analyse Christophe Moreau. Et puis il y a peut-être aussi une lassitude mentale. » Le Murcian a pris du recul et a gagné en sagesse, lui qui n’en manquait pourtant pas. Il a même parlé de retraite, chose qu’il refusait jusqu’alors, évoquant 2021 comme ce qui sera sa dernière année. Alejandro Valverde ne se voile pas la face. Il sait qu’il n’est pas éternel et se permet même d’en parler. « Il y a d’autres bons jeunes, évidemment, les générations changent, mais je crois que ces deux-là (Teuns et Alaphilippe) sont les plus forts. Et Alaphilippe a déjà fait la preuve de son grand talent », déclarait-il sur Eurosport en 2018. On le reverra dès l’an prochain sur les ardennaises, c’est certain. Mais sans doute plus jamais comme on l’a connu.

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