Geraint Thomas est vexé. Il se trompe sûrement, mais il pense que ce dimanche sur la dernière étape du Dauphiné, l’équipe AG2R s’est mise à rouler lorsqu’il a crevé, à une quarantaine de kilomètres de l’arrivée. Il en a touché quelques mots à Bardet, signe d’un début de tension. Et ce n’est finalement pas plus mal à l’approche du Tour.

Une menace qui prête à sourir

« Je n’oublierai pas. » Les mots de Geraint Thomas à l’oreille de Romain Bardet, une fois le trou bouché après sa crevaison, montrent que le garçon s’est fait une petite frayeur. A l’arrivée, le Gallois expliquait les raisons de son amertume. « Quand nous sommes finalement revenus, quelques uns des gars – Adam Yates, Dan Martin et Bob Jungels – ont dit la même chose : qu’ils avaient vu quelqu’un (d’AG2R) parler à la radio et qu’ils ont ensuite accéléré. » La vérité, c’est que les coéquipiers de Romain Bardet avaient enclenché la machine légèrement avant le problème mécanique du Britannique. Tant pis, en allant parler au Français, le maillot jaune du Dauphiné a créé quelques braises. Le feu n’est pour le moment pas bien grand, et d’ici le départ du Tour, dans presque un mois, tout ce beau monde risque de se faire bien discret. Mais quand l’heure de la bataille arrivera, les acteurs se remémoreront cet épisode.

Certains, sans doute trop hâtivement, ont fait la comparaison avec Lance Armstrong et son armada de l’US Postal. Ca n’a pas grand chose à voir. L’Américain, patron incontesté du peloton en son temps et surnommé le « Boss », avait écrasé des équipiers sans pouvoir, Christophe Bassons et Filippo Simeoni en tête. Il avait aussi agi de sang-froid, à des moments où la course ne se jouait absolument pas. Geraint Thomas, lui, a seulement mis en garde Romain Bardet, un leader qui jouit au moins d’un statut aussi important que lui, deux fois sur le podium du Tour de France quand Thomas n’a jamais fait mieux que quinzième sur un grand tour. Surtout, sa réaction est intervenue après plusieurs minutes d’effort où il a pu penser, un instant, qu’il était en train de perdre le Dauphiné. Dans le feu de l’action, sans trop réfléchir. Parce que s’il l’avait fait, il aurait sans doute remarqué que dans les cols de juillet, Bardet a autant de chances de lui faire mal que l’inverse.

De bon augure

Alors on ne va pas se plaindre que ce petit accrochage ait eu lieu. S’il peut être un nouvel élément d’inimitié entre Sky et AG2R, ça n’en rendra la bagarre du mois prochain que plus intéressante et les coups de Trafalgar plus probables. Parce que malgré les efforts de certains à cacher d’éventuelles tensions, les déclarations de Romain Bardet à l’encontre de Chris Froome depuis le début d’année, quoi qu’on en dise, favorisent la naissance d’une vraie rivalité qui n’existait que très peu jusqu’ici entre les deux hommes. « Si j’étais dans sa position, je n’envisagerais tout simplement pas d’être au départ du Tour de France et j’aurais honte de me retrouver lié à une telle affaire », disait en effet le Français au Het Nieuwsblad il y a quelques jours. L’épisode de dimanche n’était donc, en réalité, pas le premier dans cette guéguerre encore assez tranquille entre deux des équipes prétendantes au prochain maillot jaune. Et on préfère cette honnêteté plutôt que l’amitié factice qu’ont pu nous vendre certains ces dernières années.

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