Il y a des images qui font peur. L’effrayante chute de Richie Porte en est une. Il y a des images qui font mal au cœur. La détresse d’Alberto Contador, à la dérive dans le Mont du Chat, en est une. On promettait le pire aux coureurs, le pire est arrivé. Aujourd’hui, la course au jaune s’est clarifiée dans la torpeur. Avec Froome en patron.

Des épaules

Avant la terrible chute de Richie Porte, c’était l’image forte du jour. Fabio Aru attaquant à six kilomètres du sommet après avoir vu, incontestablement, Chris Froome appeler sa voiture pour un problème avec son dérailleur électrique. Seuls Nairo Quintana et Richie Porte pouvaient alors suivre l’Italien. Une fois devant, le champion d’Italie pestait contre un manque de soutien flagrant de la part de ses deux compères, mais eux refusaient d’éliminer le triple vainqueur du Tour de manière déloyale. Quelques minutes plus tard, Chris Froome revenait dans le groupe des leaders mettre un coup d’épaule à Fabio Aru. Un avertissement franc. Dans l’esprit, le Britannique rappelait qui était le patron de la course. Le vainqueur de la Planche des Belles Filles ne l’avait pas respecté.

En enfonçant son rival italien vers les spectateurs, Chris Froome montrait aussi qu’il est autre chose que le gentil homme en jaune qui cause français et sourit si souvent à la foule au départ des étapes. C’est un champion, un cannibale qui n’accepte pas la contestation. En conférence de presse, maniant une langue de Molière en chêne, le Britannique refusait d’imputer la faute à Aru. « Je n’avais pas vu qu’il avait attaqué, j’ai juste perdu le contrôle de mon guidon (pour le coup d’épaule). » En substance cependant, le boss distribuait les points à ceux qui avaient respecté sa tunique, son statut : « Je remercie les autres coureurs de ne pas attaquer quand j’ai dû changer de vélo, ça c’est du sport. » Quand la question sur Aru est revenue, Chris Froome a quitté la conférence de presse en claquant la porte.

Des jambes

Dans l’ascension du Mont de Chat, Fabio Aru a attaqué, Jakob Fuglsang s’est échappé, Richie Porte a essayé. Mais personne, pas même la tactique à deux têtes d’Astana, n’a réussi à faire douter un Chris Froome impérial bien qu’isolé. La descente et Romain Bardet s’en sont alors occupés. « J’ai cru, à un moment, que Romain Bardet allait gagner du temps dans la descente, mais on a bien travaillé derrière lui. » Là encore, Chris Froome a su organiser la poursuite. Les chutes de Porte et Martin auraient pu complètement perturber le Britannique, elles ne l’ont même pas fait ralentir. Ménageant les ego de chacun pour aller chercher son dauphin de 2016, il a encore une fois démontré que son aura est réelle. À sa main dans la montée, plutôt à l’aise dans la descente, troisième au sprint, Chris Froome a déjà frappé fort.

Aujourd’hui, le nombre de rivaux a chuté dramatiquement. Richie Porte et Geraint Thomas out, Contador défaillant, Quintana en dedans, il ne reste guère plus que Fabio Aru et Romain Bardet, en difficulté plusieurs fois pendant la montée du Chat, pour contester la victoire au boss Froome. Le surprenant vainqueur Rigoberto Uran, au niveau de ses meilleurs Giro, pourrait aussi se mêler à la lutte. À eux trois, ils ont une petite Vuelta et quatre deuxièmes places sur les grands tours dans les bagages. Gageons que le requin ne coule pas les trois dauphins trop aisément.

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