Thibaut Pinot, Julian Alaphilippe. Les deux hommes forts du cyclisme français ont livré une nouvelle démonstration dans l’ascension du Col du Tourmalet. Le premier a éliminé tous ses rivaux à la pédale pour s’offrir une 3e victoire d’étape sur le Tour de France, le second a trouvé des ressources insoupçonnées pour accentuer sa domination au classement général.

Un jaune de plus en plus vif

Si le scénario du contre-la-montre de Pau était un rêve pour le cyclisme français, comment qualifier celui de cette 14e étape entre Tarbes et le légendaire Col du Tourmalet. Tout au long des 20 kilomètres d’ascension et des 1400 mètres de dénivelé positif, Julian Alaphilippe s’est accroché à la roue des meilleurs grimpeurs du monde. Parfois à la limite de la rupture dans le dernier tiers du col, le maillot jaune a résisté jusqu’au bout là où presque tous les spécialistes de ce type de routes ont flanché. Inconcevable au départ de l’étape, le (désormais seul et unique) leader de la Deceuninck-Quick Step compte désormais 2 minutes et 2 secondes d’avance sur le 2e du classement général, Geraint Thomas.

Ce dernier est un des nombreux battus du jour. Malgré une préparation tronquée, le vainqueur sortant semblait plus en jambes que ses rivaux lors des 13 premières étapes. Sauf que sur la route vers le sommet du Tourmalet, le Gallois n’a jamais été en mesure de prendre les commandes de la course, laissant cette responsabilité à la Groupama-FDJ de Thibaut Pinot et la Jumbo-Visma de Steven Kruijswijk. Pire encore, il a craqué dans le dernier kilomètre, offrant 30 secondes de plus au matelas du maillot jaune français. Plus à l’aise aujourd’hui, Egan Bernal, revenu à moins d’une minute de Thomas au général, redevient mécaniquement le co-leader de l’équipe Ineos. Quand bien même, on aurait pu se montrer sceptique sur les chances d’Alaphilippe au général, il faut humblement reconnaître qu’il a la possibilité de défendre sa tunique sur tous les terrains. La route sera encore bien longue et difficile, mais envisageable vue la teneur des derniers jours de course.

Pinot, patron des Pyrénées

Cette lutte palpitante pour le maillot jaune ne doit pas nous faire oublier l’autre enseignement majeur de la journée : la victoire majestueuse de Thibaut Pinot au sommet du col du Tourmalet. Le Franc-Comtois avait annoncé qu’il tenterait quelque chose et il a tenu parole. Soutenu par un brillant David Gaudu, auteur d’un relais colossal sur le 2e tiers de l’ascension, le leader de la Groupama-FDJ n’a jamais concédé le moindre mètre sur ses adversaires directs, laissant sur place les derniers prétendants à la victoire d’étape à 200 mètres de la ligne. Frustré par les 100 secondes perdus à Albi à cause d’une bordure, Pinot a pu exulter à juste titre en remportant une 3e étape sur le Tour de France. « Depuis le départ, j’y pensais à celle là, confirme t-il, visiblement ému, au micro de France Télévisions. Le Tourmalet c’est mythique. C’est ça le vélo que j’aime. » L’opération au général n’est pas encore grandiose (+1 place, 6e à 3’12’’), mais la porte vers un podium à Paris s’ouvre de nouveau malgré la fameuse bordure de lundi dernier. « C’était injuste, on ne méritait pas ça. Je suis en forme et j’espère garder ça jusqu’à Val Thorens. »

Bien loin de l’euphorie provoquée par le tandem Pinot-Alaphilippe, Romain Bardet, en deçà de ses ambitions depuis Bruxelles, a confirmé aujourd’hui qu’il vivait bien le pire Tour de France de sa carrière. L’étape, courte et dense, a rapidement poussé le leader de l’équipe AG2R dans le rouge, concédant déjà plusieurs minutes sur le groupe maillot jaune lors de l’ascension du col du Soulor. Parmi les battus du jour (Nairo Quintana, Adam Yates, Dan Martin), il est celui qui a récolté la note la plus salée (20 minutes et 19 secondes). L’espoir d’accrocher ne serait-ce qu’une place d’honneur sur le général est désormais illusoire. Bardet et Pinot continuent d’avoir des trajectoires contraires sur les routes du Tour : quand le premier glanait 2 podiums en 2016 et 2017, le second bâchait avant l’arrivée sur les Champs. Ces 3 dernières années, il était le seul à incarner la possible succession de Bernard Hinault au palmarès du Tour de France. En 2019, en attendant des jours meilleurs pour l’Auvergnat, la France possèdent 2 superbes atouts à faire valoir et huit jours pour prolonger ce rêve pratiquement irréel.

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