Réduire les grands tours. Quelle drôle d’idée. Certains l’ont déjà proposé, imaginant le Giro et la Vuelta longs de deux semaines seulement. David Lappartient, le président de l’UCI, a mis sur la table une sorte de compromis : deux semaines plus un week-end, soit dix-sept jours. Pas vraiment mieux.

Changer, pour quoi faire ?

Pourquoi donc faudrait-il changer quelque chose ? Le cyclisme est trop difficile ? L’argument n’est pas recevable en 2018. Oui, le calendrier est plus chargé qu’il ne l’était il y a vingt ou trente ans. Mais tout est aussi plus facile. Sur le vélo, les équipiers abattent un travail toujours plus pointilleux et rigoureux, les leaders comptent leurs coups de pédale. En dehors, les transferts sont plus rapides, les hébergements de meilleure qualité. Alors oui, un grand tour reste un défi hors norme, une aventure que certains redoutent, légitimement. Mais pas plus qu’avant. D’ailleurs, chez les coureurs, quelqu’un s’est-il plaint qu’une course de trois semaines dure trois semaines ? S’accrocher aux traditions par peur du futur est stupide. Mais vouloir l’évolution pour l’évolution l’est encore plus. Certaines épreuves du calendrier méritent d’être repensées, et on encourage même l’UCI à toucher deux mots à ASO au sujet du format actuel de Liège-Bastogne-Liège. Mais laissons le Giro et la Vuelta.

Bien sûr, les deux épreuves ne sont pas parfaites. Mais remettre en question leur longueur, c’est considérer qu’elles manquent d’intérêt sur la durée. D’autant que dans sa proposition, David Lappartient précise bien qu’il n’est pas question de toucher au Tour de France, « car c’est la vitrine mondiale, l’évènement global du cyclisme ». Pourtant, quasiment chaque année, c’est le même refrain : la grande messe de juillet est cadenassée, parfois même frustrante, alors que ses homologues de mai et d’août nous offrent autrement plus de spectacle et de suspense – on laissera chacun juger de l’émotion qu’il ressent devant chaque épreuve. Alors ça, on en fait quoi ? On ne le prend pas en compte ? Le Tour de France a toujours eu un traitement à part, difficile à contester. Mais c’est suffisant comme ça. Pas besoin de vouloir creuser encore davantage l’écart qui existe entre les trois grands tours.

Discutez, oui, mais c’est tout

Réduire Milan-Sanremo de trente kilomètres serait absurde, idem pour Paris-Roubaix. Pourquoi donc le faire pour un grand tour ? L’idée est saugrenue. Presque heureusement, on peut compter sur Mauro Vegni, l’organisateur du Giro, pour que cette proposition reste justement à l’état de proposition. Lui qui s’est toujours dit ouvert veut que les changements, s’il y en a, concernent les trois grands tours. On peut aussi saluer David Lappartient, qui ne veut apparemment rien imposer. « Qu’on en discute, sans forcer personne », a-t-il simplement demandé dans son interview accordée à La Stampa. Nous voilà un tout petit peu rassurés, en vérité. Que les trois grands tours se ressemblent le plus possible, c’est faire honneur à l’Italie et l’Espagne, les respecter en tant que nations historiques du cyclisme. Réduire leurs grands tours, c’est vouloir créer une véritable hiérarchie. Leur montrer qu’ils ne valent pas la France et son Tour. Comme si l’épreuve du mois de juillet ne bénéficiait pas d’assez d’avantages.

Buy me a coffeeOffrir un café
La Chronique du Vélo s'arrête, mais vous pouvez continuer de donner et participer aux frais pour que le site reste accessible.