A peine Egan Bernal parti, un autre coureur colombien a émergé chez Androni. Plus jeune de seulement quelques mois, Ivan Sosa est la nouvelle perle de Gianni Savio. Un phénomène à protéger, qui n’a pas couru le Giro mais qui a décroché la semaine dernière sur l’Adriatica Ionica sa deuxième victoire chez les professionnels.

Sans se presser

Il suffit de creuser un peu pour se rendre compte que tout est lié. Ancien sélectionneur de la Colombie et du Vénézuela, Gianni Savio, le manager d’Androni, a gardé d’excellentes relations en Amérique du Sud. Alors le nom d’Ivan Sosa lui est rapidement remonté aux oreilles, à l’époque où le garçon avait simplement remporté une étape de la Vuelta de la Juventud. Il se trouve que son agent, rapidement, devient Paolo Alberati, qui gère aussi les intérêts d’Egan Bernal. La connexion avec l’équipe italienne s’est donc faite presque naturellement. Et les résultats n’ont pas tardé. Sur le Tour des Alpes, au mois d’avril, Sosa et ses vingt ans font sensation. Dans les cols, le Colombien tient la roue des cadors Froome, Pinot ou Pozzovivo. Troisième des deux premières étapes, leader le temps d’une journée, le garçon impressionne. Mais ses dirigeants restent calmes. « Beaucoup de monde me disait qu’il fallait l’aligner sur le Giro, mais j’ai dit non, il était trop jeune », tranche Savio.

Le manager transalpin veut que sa pépite progresse pas à pas. « C’est une chose d’être bien sur quatre ou cinq étapes, c’est autre chose sur une course de trois semaines, dit-il sans sourciller. L’envoyer sur le Giro, c’était prendre le risque de le brûler. » Pourtant, sportivement et médiatiquement, le garçon aurait pu attirer la lumière sur Androni. Le choix, clairement, est donc fait dans l’intérêt du coureur. « Ivan est un garçon humble, note Savio. Il n’y a pas eu de discussion, il m’a dit si tu penses que c’est mieux pour moi, alors ok. Il veut apprendre, suit mes conseils, me fait confiance. » Ça n’a pas été le cas de certains coureurs passés par l’équipe italienne, un peu plus pressés, moins à l’écoute, « qui se sont montés la tête », dit le manager. Tous n’ont pas eu la carrière qu’on leur prédisait.

Dans les pas de Bernal

Sosa, lui, va doucement. Il n’a pas encore goûté au World Tour, et ce n’est pas une obsession. Quand il vit en Italie, il est accompagné des deux autres sud-américains, le Costaricain Kevin Rivera et surtout le Colombien Rodolfo Torres, 31 ans et plus expérimenté. « C’était difficile de venir vivre ici, d’être loin de chez moi, disait-il y a quelques mois. Mais je savais que je devais construire mon avenir en Europe. » Gianni Savio, qui connaît bien la mentalité sud-américaine, laisse le soin à ses coureurs de rentrer régulièrement au pays. Deux mois en Italie, avec des blocs de course, puis un retour en Amérique du Sud où ils peuvent parfaire leur condition physique en altitude, voilà le topo. « Il faut trouver un équilibre », dit le manager, pointant du doigt ces équipes qui demandent à de jeunes coureurs de venir s’installer toute l’année en Europe.

Pour le moment, tout fonctionne donc à merveille. Sosa a décroché sa première victoire au début du mois, en Roumanie, puis la deuxième sur l’Adriatica Ionica, la semaine dernière. Le plan suit son chemin. Et les comparaisons avec Egan Bernal continuent. « Ce sont tous les deux d’excellents grimpeurs, reconnaît Savio. Mais la différence, c’est que Bernal était déjà prêt pour le contre-la-montre, Sosa pas encore. Il doit beaucoup progresser dans ce domaine. » Le garçon a encore le temps. Le manager italien espère le conserver encore un an, au moins. Ce serait, d’après-lui, dans l’intérêt du coureur. Parce qu’il remet toujours cette donnée au centre du débat. Il sait, ensuite, qu’il ne pourra retenir sa pépite très longtemps. Mais il aimerait bien, quand même, avoir l’occasion de le voir découvrir une course de trois semaines sous ses couleurs.

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