L’ensemble de la rédaction de Chronique du Vélo a fait ses pronostics en vue du Tour. Nous avons chacun livré notre top 10, notre maillot vert et notre maillot à pois pour finalement établir notre propre classement. Jusqu’à la veille du départ, nous allons donc revenir sur chacun de ces protagonistes. Aujourd’hui, celui que nous avons désigné comme maillot vert : Peter Sagan.

Vittel, 4 juillet 2017. Peter Sagan a gagné la veille et s’imagine doubler la mise. Marcel Kittel est pris dans une chute à un kilomètre de l’arrivée, les chances du Slovaque sont décuplées. Mais un accrochage avec Mark Cavendish vient enrayer la machine. Sprint raté, exclusion du Tour, tout s’enchaîne. Un an après, le garçon revient pour reprendre l’histoire où elle s’est arrêtée.

Zabel a gagné un an

Avant l’épisode de Vittel, Sagan n’était pas loin de l’homme parfait, sur le Tour. Certes, il avait cumulé pas mal de deuxièmes places, surtout en 2015 – cinq, sans une seule victoire. Mais il avait porté le maillot jaune, remporté sept étapes et surtout ramené le maillot vert à Paris cinq fois en cinq éditions. Le record d’Erik Zabel, sacré six fois de suite entre 1996 et 2001, était à portée de main. Personne, en réalité, n’imaginait que le maillot vert puisse échapper à Sagan. Pas même l’Allemand, qui était alors résigné malgré un sourire de façade. « Ce n’est jamais agréable de perdre un record, je ne peux pas dire que je suis content, nous disait-il au moment du grand départ à Düsseldorf. Je suis même vraiment déçu. Mais si un jour je venais à perdre ce record – je dis si, mais ça va arriver cette année – je ne pourrais pas imaginer un meilleur coureur que Peter pour me le prendre. »

A l’époque, nous parlions d’adoubement. On a eu tort – comme beaucoup d’autres, mais ce n’est pas une excuse – de croire que tout était déjà écrit. Dans le fracas de la salle de presse de Vittel, les commissaires ont annoncé l’exclusion du champion du monde. Les suiveurs du Tour en auraient bondi de leurs chaises s’ils ne s’étaient pas déjà levés pour écouter attentivement l’annonce qui devait leur être faite. La course au maillot vert, sur un incident pas anodin mais qui suggérait une part d’interprétation, s’était vue relancée. On s’est alors pris à rêver d’un Arnaud Démare sortant vainqueur d’une telle bagarre. Il était dans le coup, jusqu’à terminer hors-délais à Chambéry. Marcel Kittel, dès lors, a tout raflé et semblait intouchable, jusqu’à abandonner à quatre jours de l’arrivée. Tout heureux de ces péripéties, Michael Matthews a hérité du paletot et l’a ramené à Paris. Rien de tout cela n’aurait été possible sans le Slovaque, finalement. Alors merci Sagan.

Jamais deux fois

En revanche, le garçon est habituellement bien peu partageur. Il n’y a qu’à demander à Mark Cavendish, Tom Boonen ou Alexander Kristoff, qui se sont tous un peu vus champion du monde à un moment, ces deux dernières années, avant de se faire souffler le maillot arc-en-ciel par un homme qui en avait déjà bien profité mais qui ne comptait pas encore s’en séparer. Alors dans quelques jours, dès le premier sprint à Fontenay-le-Comte, Sagan aura en tête de récupérer son bien : le maillot vert. Il n’est pas pressé, tout ce qui compte est de l’avoir à Paris. Mais 2017 était un accroc et doit le rester. Discret ces dernières semaines, malgré une victoire pour son retour en Europe lors du Tour de Suisse, Sagan a tout juste profité de ce mois de juin pour décrocher un sixième titre de champion de Slovaquie sur route. Il faut donc désormais remonter à 2011 pour trouver trace d’un Sagan portant en course un maillot non-distinctif, et la stat tiendra au moins jusqu’à l’an prochain.

Parce qu’en dépit de son détachement apparent, les records semblent compter pour lui. « Je m’en fiche », répondait-il en 2016 au Parisien, lorsque le journaliste lui demandait la trace qu’il aimerait laisser dans l’histoire du cyclisme. Mais le pense-t-il vraiment ? S’entêterait-il réellement à décrocher les plus belles courses du calendrier, les plus prestigieuses aussi, s’il ne prêtait aucune attention au palmarès et aux records ? Rejoindre Erik Zabel est devenu obligatoire, le dépasser sera la prochaine étape. Et pour ça, Sagan aura le temps. L’Allemand avait décroché son sixième maillot vert à 31 ans. Le Slovaque, lui, n’en a que 28. Mais là, on fait peut-être la même erreur que l’an dernier en croyant que tout est joué d’avance. Ce serait bête de se planter deux fois de suite. A moins que ce soit Sagan, justement, qui ne se manque jamais deux fois de suite.

Et vous, qui voyez-vous maillot vert à Paris ?

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