Nous lui avions consacré un portrait grandeur nature pour ses premiers faits d’arme dans l’élite professionnelle, le Slovène Primoz Roglic s’est depuis bien affirmé. Âgé de 28 ans, celui qui dispute sa troisième saison en World Tour continue de surfer sur une dynamique ascendante ininterrompue. L’un des favoris du Tour de Romandie, chef de file charismatique de la LottoNL et déjà maillot jaune doit désormais viser plus haut, et n’a plus l’excuse du débutant.

Un immense chemin parcouru

Lorsque le garçon est en condition, la victoire lui échappe rarement. Cette saison, Roglic a déjà levé les bras à trois reprises, joli total, qui représente déjà la moitié de ses succès de l’an passé. Mais l’enfant de Trbovlje, à l’est de Ljubljana, se met à gagner différemment. Lui le spécialiste des chronos reste d’une fiabilité désarmante dans l’effort chronométré, mais progresse course après course dès que la route s’élève. Symbole de cette évolution, c’est à Serre-Chevalier, sur le dernier Tour de France, qu’il a été décrocher le plus beau succès de sa carrière au terme d’une offensive comme souvent chirurgicale. Puncheur aguerri, spécialiste du coup du kilomètre, le Slovène a étendu son champ des possibilités. Le chrono est l’une de ses armes, mais pas la seule. Sa large victoire au classement général du Tour du Pays-Basque, au début du mois, en est l’exemple le plus révélateur. Pour l’emporter dans la péninsule ibérique, savoir rouler est loin d’être la seule qualité requise.

Avec un CV déjà bien rempli pour quelqu’un que l’on a rapidement voulu dépeindre en miraculé d’un gravissime accident de saut à ski, « Rogla » s’est donc forgé une réputation, et personne ne sera surpris de le voir cette semaine concurrencer un Richie Porte encore fragile pour se succéder à lui-même en Romandie. En 2017, Roglic avait d’ailleurs pris la troisième place de l’épreuve grâce à un récital chronométré autour de Lausanne. Le rendez-vous helvète le séduit, et au même titre que Tirreno, l’épreuve est l’un de ses objectifs de l’année. Interrogé par CyclingPub en plein hiver, il confiait vouloir remporter une belle course par étapes en première partie de saison. La suite des évènements ? Revenir sur le Tour de France pour chasser de nouveau les étapes, avant de s’envoler pour les championnats du monde. Entre temps, il aura à cœur d’assumer son statut de nouvelle star du cyclisme slovène, récemment chipé au discret Simon Spilak. Mais s’estime t-il pour autant uniquement spécialiste des courses d’une semaine ?

A la croisée des chemins

Son passé de sauteur à ski lui offre puissance et explosivité, et Roglic se voit bien tenter quelque chose sur les classiques à court terme. En ayant fait des Mondiaux d’Innsbruck sa priorité pour la fin de saison, il espère conserver une bonne forme pour découvrir dans la foulée le Tour de Lombardie. Quant à la fête mondiale qui se déroulera en Autriche, il sera un candidat à l’or – au moins pour le chrono – après avoir décroché l’argent à Bergen l’an passé. « Je dois profiter du fait que cela soit peu éloigné de la Slovénie, il y a à peine cinq heures de route à faire pour arriver à Innsbruck, assure-t-il. J’ai entendu que le contre-la-montre ne sera pas plat, et que la course en ligne sera tout aussi dure. Cela va être un beau défi. » Un homme de courses d’un jour, Roglic ? Avec ce qu’il montre par moments, la question mérite d’être posée. Comme pour les grands tours, en réalité.

Si le Slovène répète continuellement qu’il « préfère prendre les choses une par une et ne pas brûler les étapes », cela se justifie par la grande protection que lui offre le staff de la Lotto, très fière d’avoir pu tirer profit d’un garçon méconnu et loin d’avoir suscité les convoitises lorsqu’il a quitté Adria Mobil fin 2015. Mais petit à petit, la formation néerlandaise lui permet de franchir des étapes. Cette saison, pas de Tour d’Italie à son programme donc, mais un Tour de France sans le costume du leader. Il sera en fait accompagné de Robert Gesink et Steven Kruijswijk, sans que la hiérarchie ne soit fixée avant la course. Dans le cyclisme d’aujourd’hui, sa double casquette de rouleur-grimpeur pourrait toutefois faire des merveilles. Le pari relève de la folie, mais il pourrait vite s’avérer déterminant de savoir où se situent les limites de Primoz Roglic, qu’il semble si loin d’avoir déjà atteint.

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