Sur des routes similaires à celles du Tour de Lombardie, Nibali a rassuré. Après avoir fait la guerre par voie de presse et être resté prudent sur les premières étapes de montagne, il a cette fois pris ses responsabilités pour mettre Primoz Roglic en difficulté.

Roglic a fini par craquer

Vincenzo Nibali a encore été à la hauteur de sa réputation. Sur un parcours qui finissait à Côme, le double vainqueur du Tour de Lombardie a repris 39 secondes à Roglic. C’est la première fois depuis l’arrivée de la montagne sur ce Giro que les deux coureurs ne finissent pas dans le même temps. Surtout, le Sicilien a enfin pu décrocher le Slovène qui lui menait la vie si dure. Vendredi, lors de la montée finale à Ceresole Reale, le marquage qu’observait Roglic à son égard avait passablement agacé Nibali. Le Squale avait refusé de serrer la main de son adversaire après la ligne d’arrivée, avant de lancer une saillie plutôt inhabituelle. « S’il veut venir chez moi, a-t-il expliqué au micro de la Rai, et prendre une photo, je lui montrerai mes trophées aussi. » L’Italien n’a jamais habitué à ce genre de sortie. Mais la bataille avec Roglic le fait vraisemblablement sortir de ses gonds.

Samedi encore, il refusait de collaborer avec le leader de Jumbo-Visma afin de revenir sur Richard Carapaz. Une manière de mettre la pression sur un Roglic qui n’a encore jamais fait de podium sur un grand tour. Et à force de ne se focaliser que sur le Slovène, Nibali a fini par le faire craquer. Victime d’une crevaison, Roglic a fourni un gros effort, seul, pour revenir sur le groupe de tête à environ 20 kilomètres de l’arrivée. Une aubaine pour l’Italien, prêt à profiter de la moindre faiblesse de son adversaire. Il a même réussi à lui faire quelque peu perdre les pédale, Roglic chutant dans la descente du Civiglio. Hormis l’écart de plus d’une demi-minute, c’est surtout l’impact moral qu’a eu cette journée qui change la donne. Le Slovène a senti la situation se retourner, ces derniers jours, et compris, sans doute, qu’il ne pourrait pas gagner si tout le monde voulait le faire perdre.

La donne a changé

Pourtant, c’était bien le leader de la formation néerlandaise qui avait l’ascendant jusque-là. En début de Giro, Nibali prônait le « respect entre les coureurs » en réponse aux déclarations osées de Simon Yates. Il a semble-t-il revu son jugement. Depuis jeudi et les premiers cols du Tour d’Italie, il a même montré quelques signes d’agacements inhabituels. D’abord en reprochant à Roglic de ne pas avoir roulé sur Lopez et Landa dans l’étape de jeudi, quand les deux grimpeurs ont attaqué lors du premier col de ce Giro. « J’ai roulé, Yates aussi, tous les grands noms l’ont fait sauf lui », faisait remarquer Nibali. Le Slovène n’avait pourtant pas grand intérêt à rouler. Esseulé, avec deux fuyards peu dangereux au général, il a fait ce qu’il devait faire. Et Nibali s’est vexé.

D’un côté, l’Italien veut laisser le plus gros du travail à Roglic. De l’autre, il n’est pas assez bon rouleur pour laisser les meilleurs grimpeurs le distancer. Un casse-tête. Mais finalement, Nibali semble s’être extirpé de l’étau dans lequel il était pris. Cette étape vers Côme vient pleinement justifier l’attitude de Nibali. Roglic n’est pas aérien et sera systématiquement mis en danger dans les prochaines étapes de montagne. Le Requin de Messine, lui, a largement les capacités de rivaliser avec Carapaz, qui semble clairement être l’un des plus costauds quand la route s’élève. Il a suffi d’une étape pour rassurer tout le monde. Aujourd’hui, on dirait presque que tous les feux sont au vert pour Vincenzo Nibali, à une semaine de Vérone.

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