Le Tour est terminé, mais ses acteurs n’ont pas tous été récompensés à la hauteur de leurs exploits. La Chronique du Vélo répare ces injustices et braque les projecteurs sur certains en décernant ses récompenses de la Grande Boucle. Nous commençons aujourd’hui avec l’award du meilleur équipier pour Egan Bernal.

Voir le train Sky déferler en montagne, ces dernières semaines, n’avait rien de vraiment surprenant. Mais au milieu de Thomas, Froome, Poels et Kwiatkowski, il y avait un petit nouveau, souvent celui qui restait le plus longtemps auprès de ses deux leaders. Egan Bernal, 21 ans seulement, a été l’une des révélations de ce Tour, unanimement présenté comme un futur vainqueur de l’épreuve.

Béquille de Froome…

En troisième semaine, il y avait toujours autant de supporters colombiens devant le bus de l’équipe Movistar. Parce qu’ils sont fidèles et que même lorsque Nairo Quintana a du mal, ils continuent de venir chanter, très fort, chaque matin et chaque soir. Les journalistes en revanche, avaient migré depuis un moment pour se concentrer sur la nouvelle pépite du pays, un pur grimpeur, encore un, qui ne jouait pas le général mais qui a impressionné dans à peu près chaque ascension. On savait le potentiel d’Egan Bernal, dont on parle depuis un peu plus d’un an comme d’un phénomène sans égal en montagne. Son début de saison, où il a terminé deuxième du Tour de Romandie et remporté celui de Californie, avait confirmé qu’on avait raison de s’emballer. Son mois de juillet est alors venu comme une cerise sur le gâteau.

Il y a quelques mois, il était censé faire la Vuelta et pas le Tour. Il aura finalement brillé cet été comme peu de garçons de 21 ans l’ont fait avant lui. Dans une équipe Sky qui n’a pas besoin, pour l’instant, d’un nouveau leader, il était cantonné au rôle d’équipier. On s’attendait donc à le voir, parfois, en montagne. Mais pas à ce qu’il soit omniprésent et reste régulièrement en compagnie des favoris du Tour. Dans la hiérarchie, il s’est tout de suite imposé comme la dernière rampe de lancement de Thomas et Froome, un rôle jusque-là dévolu à Kwiatkowski ou Poels, selon les moments. Faire bouger les lignes dans ces proportions était déjà une performance. Mais après une traversée des Alpes plutôt tranquille pour ses leaders, où son travail en montagne s’arrêtait généralement à quelques kilomètres de l’arrivée, il a été étincelant dans les Pyrénées, notamment pour aider Chris Froome.

…et bientôt successeur de Froome ?

Par moments, dans le col du Portet ou dans le Soulor, quand le quadruple vainqueur du Tour était en difficulté, on sentait même le Colombien plus fort que lui. A Paris, la quinzième place de Bernal ne reflète donc pas grand chose et le monde entier s’accorde à dire qu’il ira bien plus haut très prochainement. « En tant que manager, ma responsabilité est de regarder deux ou trois saisons devant nous, dit Dave Brailsford, le patron de Sky. J’ai déjà l’équipe que je veux dans trois ans. […] J’ai cherché et cherché le coureur qui pourrait être le prochain Chris Froome, qui serait notre prochain grand leader sur les grands tours. Mon choix s’est porté sur Bernal, qu’il nous fallait absolument avoir dans l’équipe. Il est notre futur. » On peut estimer que l’homme qui a gagné six des sept derniers Tours de France avec trois coureurs différents sait ce qu’il fait.

Certains pointent les qualités de rouleur de la pépite colombienne, moins à l’aise dans l’exercice que Wiggins, Froome ou Thomas. Mais le garçon se défend, malgré tout, en témoigne son titre de champion national de la discipline cette saison. La Sky devra donc peut-être adapter sa façon de gérer la course le jour où elle fera de Bernal son unique leader, mais dans des proportions raisonnables. Surtout qu’avec ses aptitudes de grimpeur hors norme, le garçon pourrait bien être capable d’étriller la concurrence bien avant le moindre chrono. Ci et là, ceux qui le connaissent, de Gianni Savio à Nicolas Portal, disent d’ailleurs que le phénomène apprend très vite. Il se trouve qu’en plus, en ce moment, il est à bonne école. Ceux qui attendaient que Froome tire sa révérence pour enfin remporter le Tour ont donc sans doute pris conscience, ces trois dernières semaines, qu’ils allaient devoir revoir leurs plans.

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