Ce vendredi, le col de l’Iseran a fait la différence. C’est là que Julian Alaphilippe y a perdu son maillot jaune au profit d’Egan Bernal. L’ascension fait partie de ces montées interminables. Escaladé à sept reprises depuis la Seconde Guerre mondiale, l’Iseran et ses 2770 mètres ont toujours eu un lourd impact sur la course.

1996, une tempête de neige

Au matin de la neuvième étape, la météo est dantesque : le thermomètre affiche -5 °C au sommet de l’Iseran, des bourrasques de vent à près de 100 km/h emportent tout sur leur passage. « Quand je me suis réveillé, j’ai vu la tempête de neige s’abattre sur le sommet depuis la fenêtre de ma chambre d’hôtel », écrit quelques années plus tard, le Danois Bjarne Riis, dans son autobiographie. Les organisateurs décident, donc, de ne pas emprunter l’Iseran, l’étape est finalement réduite à une course de côte de 46 kilomètres entre Monêtier-les-Bains et les Sestrières. « Personne n’a jamais vu ça sur un Tour de France ! Vous pourrez dire que vous y étiez », souri le manager de l’équipe Festina, Bruno Roussel.

Derrière des chasses-neiges, les voitures des équipes tentent péniblement d’emmener leurs coureurs jusqu’à Monêtier-les-Bains, commune où sera donné le départ. Quelques minutes avant de s’élancer, le Français Jacky Durand, allergique à la montagne se réjouit de cette décision : « Une étape de quatre cols où on ne fait que 46 kilomètres, je ne pouvais rien rêver de plus beau ! » Jacky Durand finira tout de même l’étape dans le Grupetto, pendant que le Danois Bjarne Riis prenait le contrôle du Tour 1992. Édition qu’il remportera avec presque deux minutes d’avance sur l’Allemand Jan Ullrich.

1992, le raid fou de Chapucci

Treizième étape du Tour 1992 : dans une course devenue de plus en plus cadenassée, cette étape est restée dans les mémoires de la Grand Boucle. Un raid plein de panache signé Claudio Chapucci, une victoire de légende pour le grimpeur Italien. Il n’en fallait pas moins pour que les journalistes de La Gazette Dello Sport titrent le lendemain : « Claudio, tu nous as rendus fous. » Claudio Chappuci s’est lancé ce jour-là dans une échappée solitaire de plus de 140 kilomètres pendant sept heures avec quatre grands cols Alpins au programme, dont le sommet du Tour, le col de l’Iseran.

Comme s’imposer en solitaire ne suffisait pas au coureur de la Carrera, il a aussi, ce jour-là, relégué à plus de trois minutes ses principaux concurrents pour le classement général. L’espagnol Miguel Indurain remportera tout de même ce Tour de France. L’expérimenté Greg LeMond, lui, a dit adieu au podium en concédant plus de 45 minutes sur cette étape. Aérien dans la montée, Chiapucci a aussi construit sa victoire dans la descente du col de l’Iseran qu’il décrit précisément dans son livre Gli Italiani al Tour de France : « Une pente parsemée de virages en épingle à cheveux, construits l’un sur l’autre, jusqu’à la vallée. Un grand huit d’émotions fortes, une roulette russe impitoyable en haute altitude. » Après son exploit, l’Italien se contentera à Paris de la seconde marche du podium et du maillot à pois.

1959, une dernière difficile pour Bobet

14 juillet 1959, pour sa dernière Grande Boucle, Louison Bobet abandonne après avoir grimpé les pentes cruelles du col de l’Iseran. Le Breton, triple vainqueur du Tour, a choisi sa sortie. Largué dans le premier col de l’étape, il est malade depuis quelques jours, Bobet arrive quand même a recoller aux favoris dans la vallée, pour se faire décrocher de nouveau dans l’Iseran. À ce moment-là, Louison Bobet est à l’agonie : « C’est atroce », lance-t-il à un journaliste qui suit la course.

Au fur et à mesure que la pente s’accentue, le champion Français se décompose, mais il est hors de question de renoncer. « Quand je suis arrivé au sommet, il y avait un monde fou. Je ne pouvais pas abandonner devant tout ce monde. J’ai entamé la descente, et j’ai abandonné quelques kilomètres plus loin », raconte-t-il en toute franchise aux journalistes. Son coéquipier Raphaël Géminiani affirme après l’arrivée : « Il n’aurait jamais pu sortir par la porte de service. » Louison Bobet savait qu’il venait de franchir le sommet du Tour et un coureur d’une telle classe n’ abandonne pas au sommet du Tour.

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