Pour la première fois dans la riche histoire du Tour, une étape relie deux îles, celle d’Oléron à celle de Ré. Pour l’île d’Oléron, c’est un grand retour après 40 ans de disette. Le passage du peloton dans l’île sera bref cependant, les routes souvent dégradées et étroites ne lui permettant pas de s’y attarder. Après un départ depuis la commune du Château-d’Oléron, les coureurs traverseront le pont pour rejoindre le continent. La majorité de l’étape longera ensuite la côte charentaise en passant successivement par Royan, Rochefort ou La Rochelle. Promise sur le papier aux plus grosses cuisses du peloton, l’étape a été dessinée pour être animée par le vent.

Première îlienne en 1983

Le premier passage du Tour sur l’île d’Oléron remonte à 1983. Alors que Bernard Hinault, dominateur lors des dernières éditions, ne peut se présenter au départ en raison d’une blessure au genou contractée lors des derniers jours d’une Vuelta victorieuse, le Tour est plus ouvert que jamais. Les prétendants sont nombreux, avec pêle-mêle les anciens vainqueurs Zoetemelk (1980), Van Impe (1976) et les Français Jean-René Bernaudeau, Pascal Simon et Robert Alban. C’est finalement Laurent Fignon, coéquipier du Blaireau au sein de la célèbre formation Renault-Elf-Gitane, qui remporte le Tour dès sa première participation.

Le tracé est un condensé de classiques et de nouveautés, à l’image des courses dessinées par Christian Prudhomme depuis plusieurs étés. Les coureurs franchissent le Tourmalet, l’Aubisque, Peyresourde, la Madeleine, l’Alpe d’Huez ou encore le Puy-de-Dôme. Outre la présence d’une équipe de grimpeurs amateurs colombiens, on relève au rayon des innovations la septième étape dont l’arrivée est jugée sur l’île d’Oléron en provenance de Nantes (216 kilomètres). Si le peloton a depuis foulé les terres de Noirmoutier (2005) et de Corse (2013), c’est à l’époque la première fois que le Tour de France s’aventure sur une île. L’étape suivante reliant La Rochelle à Bordeaux, c’est, comme en 2020, dans la préfecture des Charentes-Maritimes que sont logés l’ensemble des acteurs de la grande caravane du Tour.

Le kilomètre pour Riccardo Magrini

Au moment du passage des coureurs, les routes oléronaises sont bien garnies. Sud-Ouest rapporte dans son édition du lendemain que « la foule a atteint des proportions considérables après le franchissement du pont d’Oléron, avec le renfort des touristes ». Alors que les Français performent chaque été sur les pentes des cols alpestres et pyrénéens, c’est étonnamment l’Irlandais Stephen Roche, 13e du Tour cette année-là, qui est perçu comme le local de l’étape. Avant le départ, Roche, qui passe régulièrement ses vacances sur l’île, évoque même sa relation particulière avec Oléron dans les colonnes d’un journal local : « C’est comme arriver chez moi ici. Je connais pas mal de monde maintenant et je connais pas mal les routes, je vais essayer d’être placé. »

Pourtant, la forte chaleur et le scénario de la course ne lui permettront pas de briller puisque c’est Riccardo Magrini qui fait le kilomètre et lève les bras dans les rues de Saint-Pierre d’Oléron. Déjà vainqueur au mois de mai d’une étape du Tour d’Italie, l’Italien livrera son euphorie après avoir franchi la ligne. « Un succès en France, cela en vaut bien cinq en Italie. Je suis champion du monde ! » Le lendemain, Magrini exprimera sa joie en chantant depuis une place de La Rochelle, célébrant ainsi comme il se doit la première victoire italienne sur la Grande Boucle depuis 1979.

HuîtresT et vin blanc

En 1983, pour prolonger la fête, les suiveurs étaient invités à partager des huîtres accompagnées de vin blanc. Si le contexte sanitaire actuel bannit de telles scènes, le passage du Tour à Oléron demeure un formidable coup de projecteur. Après plus de trois décennies d’attente, le patron du Tour livrait il y a peu les raisons du retour de la plus grande course cycliste sur l’île. Dessinée et proposée par le conseil départemental des Charentes-Maritimes il y a plusieurs années, cette étape carte-postale pourrait présenter, outre son évident aspect télégénique, un intérêt sportif majeur si le vent s’en mêle. En attendant le passage du Tour sur l’île d’Oléron, les derniers vacanciers profitent pour encore quelques jours des 130 kilomètres de piste cyclable de l’île, des chemins sur lesquels il n’est pas rare de pédaler contre le vent.

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