Le mystère est loin d’être résolu. Au contraire, c’est comme si chaque étape l’amplifiait. Rien, chez Chris Froome, n’a rassuré depuis le grand départ de ce Giro à Jérusalem. Le retour en Italie a même multiplié les doutes et les questions. Une situation nouvelle pour le Britannique, contraint de réenfiler un costume d’outsider qu’il avait rangé au placard depuis des années.
Flash-back
Le Tour 2012 avait marqué une rupture. Chris Froome avait changé de camp. En grimpant sur la deuxième marche du podium à Paris et en montrant ostensiblement sa supériorité face à Bradley Wiggins dans les Pyrénées, il s’était fait une place parmi les cadors du peloton. Il manquait indéniablement de charisme, d’aura, de personnalité, alors il n’était pas un patron. Sa voix ne pesait pas grand chose. Mais son nom, déjà, voulait dire beaucoup. Jamais, depuis la fin de ce mois de juillet qui nous avait mené de surprise en surprise, il n’avait pris le départ d’une course par étapes sans être annoncé comme l’un des principaux favoris, souvent le seul. Bientôt six ans plus tard, en Israël, rien n’avait vraiment changé. Comme toujours, le Britannique était tout en haut de la liste des candidats à la victoire finale. Qu’importe sa méconnaissance du Giro et sa procédure en cours pour l’affaire du salbutamol. Froome restait Froome.
Sept jours plus tard, pourtant, tout ça ou presque est parti en fumée. Pour la première fois en six saisons, le garçon, toujours pas un patron du peloton mais un cador bien plus respecté que lorsqu’il l’est devenu, est tombé de son trône. Il a su ne pas dégringoler jusqu’en bas et s’est rattrapé à la première marche. Mais il n’a plus l’habitude d’être du côté des outsiders. En une semaine, le Giro a comme perdu ses favoris. La hiérarchie a été bouleversée. On annonçait un duel Froome-Dumoulin, mais il n’y a plus aujourd’hui un seul nom qui se détache. Comme si tout le monde avait repris le départ à égalité. Une meute au sein de laquelle Froome à pris place, alors qu’il avait toujours su se placer au-dessus d’elle jusque-là, incarnation de ce après quoi les outsiders couraient. Aujourd’hui, il n’y a plus de leader incontesté à faire trébucher, juste un maillot rose à aller chercher, et huit prétendants au lieu d’un.
Pas tout à fait inédit…
Une minute et dix secondes de retard sur son adversaire le mieux placé – Simon Yates, maillot rose. Voilà la situation pour Froome. Il n’y est pas habitué. Généralement, après une semaine de course, il est soit leader, soit pointé à une poignée de secondes seulement, prêt à dégainer. Une seule fois, en fait, il s’est retrouvé dans une situation similaire. C’était sur la Vuelta 2015. Esteban Chaves lui avait déjà collé près d’une minute et demie. Le Britannique abandonnera quatre jours plus tard, après une nouvelle journée difficile. Alors le jeu des comparaisons est rapide, et sans doute trop facile pour s’y limiter. Froome, lui, se veut rassurant. « Je ne suis pas préoccupé, chaque jour je me sens mieux, j’ai confiance », disait-il après l’étape de Caltagirone, où déjà, il avait eu une première alerte et concédé quelques secondes. Les deux jours suivants, et surtout l’Etna, pourtant, n’ont rien arrangé.
Pour la première fois, aussi, Chris Froome est contesté en interne, dans la famille du vélo. La procédure qui l’oppose à l’UCI agace. Tim Wellens, qui s’érige petit à petit comme un porte-parole des coureurs lorsqu’il faut parler dopage, y va sans détour : neuf coureurs sur dix pensent que le Britannique ne devrait pas courir ce Tour d’Italie. La plupart des favoris se sont retenus de s’exprimer. Pas Dumoulin. « Si j’étais dans la même situation que lui, je ne serais pas venu. […] Ce n’est pas bon pour le cyclisme », lançait-il avant le grand départ. Froome se dit imperméable. Il ne l’est peut-être pas tant que ça. Ce Giro doit lui permettre tout à la fois d’entrer dans l’histoire, de tirer un trait sur sa dernière – mauvaise – expérience avec la course rose et de stopper la malédiction de Sky sur l’épreuve. Peut-être trop pour un seul homme, qui pour l’instant n’est que l’ombre de lui-même.
Un fantôme ? On n’en est pas encore là je pense. Oui il a l’air limite mais il est tout de même placé en embuscade. Son affaire joue t’elle sur son moral et sa faculté de se dépasser ? Non je ne crois pas du tout, il me donne l’impression d’avoir la capacité de faire le vide autour de lui et d’oublier ce qui peut être perturbant, y compris les insultes qu’il peut entendre, bien qu’apparemment le public tifosi ne semble pas trop vindicatif vis à vis de lui…
Bien qu’il ait certainement bien préparé cette course, il ne peut pas instantanément je pense trouver en Mai les sensations de pleine forme qui’ il a sur juillet et ce depuis des années. Les sensations vont-elles revenir ? Moi je n’en fait plus mon favori, mais je le vois quand même sur le top 5, voire le podium. Ou alors abandonner si une défaillance importante survient.
Froome n’est pas en première ligne pour l’instant et on feint d’oublier sa situation en affectant de ne s’intéresser qu’aux vainqueurs d’étape et leaders du moment.. S’il s’empare du maillot rose et qu’il soit alors placé sous les projecteurs, tout risque de dégénérer. Quels seront les commentaires de la presse, de ses adversaires? L’atmosphère risquerait de devenir vite irrespirable.
Davantage que Froome, qui a été affecté par une chute sans laquelle il aurait vraisemblablement réalisé un meilleur prologue et serait donc aujourd’hui plus haut au général, c’est la Sky qui me semble inhabituellement faible. Certes ils avaient deux types dans l’échappée hier, et non des moindres, mais ils n’ont été d’aucune utilité à Froome une fois repris. Poels a perdu beaucoup de temps et n’apparaît déjà plus comme un leader de rechange en cas de pépin pour Froome, ce qu’il aurait pu aspirer à être. Sur les deux arrivées pour puncheur, alors qu’on aurait pu imaginer un Froome très entouré, il a été esseulé et a encore perdu du temps. Pour ne rien arranger, ils accumulent les pépins depuis le début, chute, crevaison, rien qu’hier on a vu Puccio, Elissonde et Froome se faire dépanner. Non seulement la course ne leur a jamais réussi (Wiggins, Porte, Landa, Thomas, tout le monde connaît la liste des abandons), mais en plus, j’ai l’impression que le passage à huit coureurs va les pénaliser, habitués qu’ils sont à jouer sur leur énorme mécanique collective. Là, clairement, l’équipe qu’ils affichent semble sur le papier nettement en-dessous de Michelton notamment en montagne (lesquels alignent, en… Lire la suite »
Perso avant le départ j’ai annoncé un podium dumoulin pinot Lopez. Partant du principe que froome serait suspendu/déclassé. Sky/froome pas un histoire d’amour (regardons le passé ), il faudra faire le point après zoncolan et le clm.
Cela fait combien de temps que la course a débuté ? Une semaine. Et combien de vraies étapes de montagne avec de gros pourcentages et de la longueur sur lesquelles les écarts peuvent se faire ? Une seule, celle de l’Etna. Et comment s’est comporté Froome sur cette étape de l’Etna ? Est-ce qu’il a été lâché ? Est-ce qu’il a perdu du temps sur les autres “favoris” (mis à part les deux jaunes et noirs) ? Je ne pense pas. Froome court exactement comme il l’avait prévu depuis le début, à savoir arriver en forme à partir du milieu de la deuxième semaine. Et toute l’équipe SKY est également programmée pour l’être également. Il ne faut pas oublier que l’objetctif de Froome cette année est de doubler Giro ET Tour de France. Rappelez-vous 2017 lorsqu’il a doublé TDF et Vuelta. On disait également qu’il était moins dominateur sur le Tour etc … Sauf qu’il avait une vision jusqu’au mois de septembre et non pas uniquement sur juillet. Et je pense que cette année, c’est exactement la même chose. Il s’économise au maximum car son objectif n’est pas uniquement le mois de mai mais va jusqu’à fin juillet. On voit… Lire la suite »
Et Mère Smi Répare
j’adore votre expression ” programmé ” ..Pour être en forme.. l’oeil rivé sur leurs compteurs, afin de ne pas dépasser les doses d’efforts maximales programmé par les docteurs Mabuse made in england, les humanoîdes pédalants vont encore frapper…
J’en ai bien peur…
La différence avec le Tour 2017, c’est qu’il était en jaune dès le début. Là, il a une minute de retard déjà sur Dumoulin.
A chaque fois qu’il a gagné un Grand Tour, il était le mieux classé des favoris au bout d’une semaine. A chaque fois que d’autres étaient devant lui, il a perdu.
Les statistiques sont faites pour être démenties, mais la tendance n’est malgré tout pas des plus rassurantes.
Tout ce que vous dites m’attriste profondément car… vous avez sans doute (malheureusement) raison ! :(… Or, comme le dit Dumoulin : “Ce n’est pas bon pour le cyclisme”… Et, comme pour “l’américain”, il nous faudra attendre quelques mois, voir quelques années pour s’en “rendre compte” (je parle là pour les naïfs, les aveugles et les inconscients).
Et paf le Froome, ça va moins bien sans ventoline apparemment