C’est un grand changement qui s’annonce pour Kenny Elissonde. Après six ans et demi à la FDJ, il a cédé à des sirènes inattendues, celles de l’équipe Sky. Le jeune espoir, souvent protégé, va devoir se muer en gregario de luxe pour Chris Froome. Ce n’est pas forcément dans ce rôle qu’on l’imaginait il y a encore quelques mois.

Une bonne idée par Jean-Baptiste Caillet

Il est temps de passer à autre chose. On aurait aimé voir Kenny Elissonde dans la veine des Bardet, Pinot ou Barguil. D’aucuns ont pu croire à un tel destin après une victoire en costaud au sommet de l’Angliru en 2013. Malheureusement pour lui, cela n’a pas été le cas. « Plein de petits détails ont un peu enrayé la machine », confiait-il à L’Equipe en novembre. Chaque année, le natif de Longjumeau n’a pas été capable de confirmer. Parfois handicapé par des pépins physiques, notamment en 2016, le jeune coureur a dû se cantonner à un rôle subalterne faute de pouvoir réitérer l’exploit. Seule la Vuelta venait rappeler qu’Elissonde était plus que cela. En signant deux saisons chez Sky, il aura les moyens de franchir ce cap. L’équipe britannique impose un moule avec ses méthodes de travail, et cela ne peut être que bénéfique pour le jeune Français, même en tant qu’équipier.

La machine Sky a son savoir-faire pour propulser un coureur dans une autre dimension. L’exemple le plus flagrant se nomme Wout Poels. Le Néerlandais, élu puncheur de l’année 2016 par la Chronique du Vélo, a brillé sur le Tour comme lieutenant de Chris Froome. En montagne, il était dans le même temps que les membres du top 10. L’équipe de Dave Brailsford a toujours su faire resplendir ceux que l’on attendait plus. Le changement peut être brutal pour Kenny Elissonde. Fini les échappées au long cours ou la lutte pour les classements annexes. Il y a un risque que la greffe ne prenne pas. Sauf qu’à 25 ans, il a encore l’opportunité de faire des paris à quitte ou double. En cas d’échec, il retrouvera une place de choix dans une formation française. En cas de succès, la promesse entrevue en 2013 sera enfin tenue.

Une mauvaise idée, par Robin Watt

Que diable va faire Kenny Elissonde dans cette galère ? Il pouvait prétendre à une place de coureur protégé un peu partout dans les équipes françaises, ou même dans pas mal de formations étrangères. Mais il a choisi de rejoindre la plus grosse écurie du peloton. Celle où, à coup sûr, il ne sera qu’un équipier parmi d’autres pour Christopher Froome. Qu’a-t-il de plus que Landa, Poels, Thomas, Kennaugh ou Kiryienka ? Clairement, ça ne saute pas aux yeux. Sans oublier que Nieve, Intxausti, Lopez et Geogeghan Hart, eux aussi, voudront jouer un rôle au sein de l’armada britannique. Il y a donc une sorte d’évidence : cela fait un peu trop de monde pour épauler le seul Froome en juillet. Alors oui, Elissonde est Français, et ça lui offrira peut-être une petite longueur d’avance pour décrocher son billet en vue du Tour, au moins en 2017. Mais après ? Quel avenir, quel rôle aura-t-il ?

Ce n’est pas comme si son CV parlait pour lui. Certes, le garçon n’a que 25 ans, et encore une grosse marge de progression. Mais on a envie de dire heureusement, parce que sinon, Dave Brailsford n’aurait même pas pris la peine de le faire venir. Le reste, c’est un peu maigre. Face à des garçons qui ont déjà gagné des courses d’une semaine, décroché des podiums sur des grands tours ou même remporté des monuments, il a forcément du retard. Sa victoire au sommet de l’Angliru, lors de la Vuelta 2013, ne pèse pas tant que ça à l’échelle de la Sky. Ce transfert apparaît donc comme celui d’un coureur qui a les yeux plus gros que le ventre. Qui a voulu goûter aux sommets un peu trop vite, alors qu’en prenant son temps, il aurait pu rejoindre une équipe d’aussi grande envergure d’ici quelques saisons, et avec un statut différent.

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