Parce qu’aucun sprinteur ne peut prétendre être le meilleur du monde sans gagner sur le Tour de France, Elia Viviani devait ces jours-ci ouvrir son compteur sur la Grande Boucle, quelques semaines après son zéro pointé sur le Giro. C’est chose faite, ce mardi à Nancy. Ça ne fait pas encore de lui le patron du sprint mondial, mais ça veut dire beaucoup, pour le présent comme pour le futur.
Le vide est comblé
Il est des victoires tellement mûries et attendues qu’une fois le moment venu, le soulagement est au-dessus de la joie. Après la ligne franchie, ce n’est pas juste la douleur dans les jambes qui disparait, sous le coup de l’euphorie, c’est le corps entier qui semble ne plus ressentir aucune sensation. L’esprit, aussi, est vide. L’objectif est atteint, enfin, et l’espace de quelques secondes, voire quelques minutes, il n’y a rien d’autre à dire que « ça y est », rien d’autre à penser que ce blanc au palmarès enfin comblé. Elia Viviani, ce mardi à Nancy, s’est peut-être même dit que son Tour de France était bouclé, et que les dix-neuf jours qui doivent encore nous mener jusqu’à Paris sont une autre course, où il ne sera plus le même sprinteur, ni le même homme. Il est désormais un vainqueur d’étape sur le Tour de France, un critère qui n’a jamais suffi faire d’un coureur le meilleur sprinteur du peloton, mais un indispensable, de tous temps, pour prétendre à un tel titre.
Parce que c’est une question qui revient, régulièrement, depuis que Mark Cavendish fait sacrément son âge et que Marcel Kittel, en quittant Quick-Step, est devenu un coureur lambda puis un ancien coureur. Qui est le meilleur sprinteur du monde ? Gaviria, Groenewegen, Viviani ? Les deux premiers avaient, jusqu’à hier, un petit truc en plus. Deux victoires sur le Tour et un maillot jaune pour le Colombien, trois victoires, dont une sur les Champs-Elysées, pour le Néerlandais. L’Italien était à la traîne, bien qu’il avait la meilleure équipe et le meilleur train. Tout n’était pas de sa faute, parce qu’il n’était pas venu sur le Tour de France depuis 2014, mais ses échecs sur plusieurs grandes courses, comme Milan-Sanremo, Gand-Wevelgem ou le Giro, étaient de son fait. A Bruxelles, samedi, il n’avait pas non plus inversé la tendance, neuvième seulement. « Si quelqu’un nous bat, nous devons le féliciter », disait-il. Problème, il y avait du monde à féliciter, ce week-end.
Célébration ou pot de départ ?
Ce mardi soir, les rôles sont inversés. Le train bleu n’était pas aérien, et il a profité de quelques erreurs, comme celle des Jumbo-Visma, placés en tête bien trop tôt. Mais ce n’est pas vraiment ce qui compte. Après un Giro terminé bredouille, à mi-épreuve, avec seulement une disqualification dans la besace, et en plein milieu de rumeurs qui l’envoient, d’après L’Equipe, chez Cofidis en 2020, Elia Viviani s’est imposé et il ne retiendra que ça. Hagard, dans l’aire d’arrivée, il paraissait sonné, comme incapable de prendre la mesure de ce qu’il venait de faire. Il n’est pas le dernier pour se laisser submerger par les émotions, mais aujourd’hui, il n’y a pas eu de larmes. Seulement du soulagement, on y revient. « Ce Tour va probablement décider où j’irai l’année prochaine, mais rien n’est encore décidé », disait-il à Bruxelles. On ne sait pas vraiment ce que ça veut dire, parce qu’après cette victoire, d’autres équipes pourraient se positionner, mais Deceuninck-Quick Step pourrait aussi se dire que, finalement, il est un homme précieux.
Il faudra donc attendre pour savoir, en se demandant, en filigrane, où en sont les discussions avec Cofidis. Elia Viviani, 30 ans, n’a pas caché l’intérêt de l’équipe française, mais a réaffirmé son souhait de rester chez Patrick Lefevere. Il sait que les conditions, pour un sprinteur, ne sont jamais meilleures ailleurs, et il a assez vu Kittel et Gaviria galérer, depuis deux ans, pour s’en persuader. Ce mardi soir, pourtant, il ne sera probablement pas question de mercato, à l’hôtel de Deceuninck-Quick Step. Seulement de (re)sortir le champagne, vingt-quatre heures seulement après la victoire et le maillot jaune de Julian Alaphilippe. Mais la célébration pourrait bien ne pas avoir le même goût. Dans l’esprit de certains, Elia Viviani et Patrick Lefevere en tête, il s’agira peut-être d’un pot de départ.
Il a été impeccablement emmené, son poisson pilote l’a déposé à 170 m de la ligne c’était parfait. Viviani n’est pas le meilleur dans les sprints houleux mais emmené comme ça même Coquart gagnerait l’étape !
Effectivement c’est selon moi un bon sprinter qui profite d’une très forte équipe pour gagner et c’est tant mieux pour lui. C’est depuis qu’il a intégré cette équipe qu’il est considéré comme un des meilleurs sprinters avant il était bon mais quand même limité. A mon sens il n’est pas du même calibre qu’un Kittel, Cavendish, Greipel (en leur temps). Pas sur qu’il réussisse autant l’année prochaine chez Cofidis.
Le train bleu pas aérien ??? Il a pourtant bien fonctionné dans le final et quand on a le maillot jaune qui se met à la planche pour son sprinteur c’est quand même un must ! . Pour le coup Viviani a pu rester dans le sillage de ses équipiers ce qui n’est pas toujours le cas . Il a parfaitement manoeuvré pour remporter ce sprint . Il a quand même dit que la victoire d’Allaphilippe hier avait boosté toute l’équipe et que c’est ce qui lui a permis de gagner aujourd’hui .
C’est même rare qu’un sprinteur soit aussi bien amené !
Bon, je vais faire mon coming-out : j’aime les étapes de sprint. J’aime les sprints massifs, j’aime quand ils sont chaotiques, mais j’aime encore plus voir un sprinteur déposé à 150 mètres de la ligne par un train bien réglé. Quand le travail est aussi bien fait qu’aujourd’hui, c’est beau, c’est magnifique.
Je rejoins les commentateurs de l’article pour vous faire la remarque que de parler de “train bleu pas aérien” (au-delà de la figure de style involontairement créée) ça me paraît un peu fort. 1) D’abord, samedi, le train bleu est parfaitement en place, il n’y a que VIviani qui ne soit pas à sa place, et il m’a semblé que c’était volontaire, qu’il voulait se projeter de plus loin pour profiter d’une aspiration (de Sagan peut-être?) sauf qu’il se fait enfermer et tasser par le boulet (de canon) Ewan. Il m’a semblé qu’il n’était plus dans le sillage de ses équipiers depuis un bon km et qu’il aurait pu le reprendre avant s’il avait voulu, et du coup c’est bien Richeze qui est en tête du peloton à 300 mètres de la ligne, donc le train est performant si les passagers veulent bien l’emprunter. 2) Ensuite, aujourd’hui, le “train bleu” se met en place très tard, mais avec quelle efficacité ! SI ce n’est pas Lampaert, c’est Alaphilippe cette fois-ci qui fait le ménage, Morkov qui temporise très intelligemment dans les roues du Dimension Data (il me semble) avant de produire son effort pile au bon endroit, avec Richeze qui… Lire la suite »
Excellente analyse, je souscris sur tous les points. Viviani n’est pas un aussi bon sprinteur que le Cav, Kittel ou Gaviria, et c’est pour ça qu’il a du mal quand il n’a pas de train.
Pas mieux.
et c’est sans doute ce qui va le faire bien hésiter avant de changer d’équipe, à moins qu’il ne soit mis à la porte.
Viviani très déçu par son Giro manqué d’autant plus qu’il portait son maillot national s’est racheté magnifiquement.
Difficile de ne pas voir le désert du sprint français sur ce Tpur ( avec Laporte comme unique représentant). Alors qu’il y a quelques saisons en arrière, on prédisait l’arrivée d’une génération dorée de finisseurs avec le trio Demare Bouhanni Coquard, comment a t’on pu en arriver là?
Démare a gagné sur le tour d’Italie où Viviani n’a rien fait donc la situation n’est pas si terrible.
Le problème c’est Bouhanni qui se met dedans tout seul ou bien aidé par Cofidis (selon les années) et Coquard qui est allé s’enterrer dans une équipe non-conviée aux Grands Tours…
Ah et pour Démare la peur de frotter…