Il l’avait coché, il l’a fait. Il en parlait depuis plusieurs jours et Julian Alaphilippe, vainqueur en costaud à Epernay, ce lundi, s’est emparé du maillot jaune. Le Français a bouleversé les plans de Jumbo-Visma, a pris des risques, mais il fallait au moins ça pour porter ce paletot qui l’a ému quasiment jusqu’aux larmes.

Une démonstration

Un maillot jaune ne tombe jamais du ciel et Julian Alaphilippe est allé le chercher. En vérité, après le contre-la-montre par équipes de dimanche, où Deceuninck-Quick Step avait concédé plus de vingt secondes à Jumbo-Visma, on se disait que le Français, s’il espérait toujours être en jaune, devrait peut-être attendre l’arrivée à Colmar, mercredi. Lui n’a pas voulu patienter. Il avait repéré le final de cette étape d’Epernay, il savait où et comment attaquer. Il savait aussi que le maillot jaune pouvait être à la clé. Mais il a douté, quand dans la côte de Mutigny, sur des pentes à 12%, il a attaqué, compris qu’il était une jambe au-dessus de tout le monde, mais que personne ne l’accompagnerait, et qu’il a fallu choisir, en l’espace de quelques secondes, entre rentrer dans le rang pour attendre le sprint ou se jeter à corps perdu dans ces quinze derniers kilomètres, en espérant avoir les jambes assez solides.

On a été qu’à moitié surpris de le voir choisir la deuxième option. Julian Alaphilippe n’est pas du genre à jouer à cache-cache, que ce soit sur les classiques ou le Tour de France. Alors il a embrayé. Il a creusé l’écart, très vite, et n’avait plus beaucoup à réfléchir pour la suite, seulement à écraser les pédales le plus fort possible. Et à ce jeu-là, on ne fait pas beaucoup mieux que Julian Alaphilippe depuis plusieurs mois. Le Français est le numéro un mondial, l’un des rares cadors du peloton qui peut annoncer, le jour du départ du Tour de France, qu’il aime bien l’étape d’Epernay et qu’il aimerait bien y endosser la tunique de leader. Ce pourrait être pris comme de l’arrogance, c’est juste la confiance d’un champion qui vit sa meilleure saison et sait, non pas qu’il gagnera où il voudra, mais qu’il peut gagner là où il veut. Les autres n’auront que peu de regrets tant il n’y avait rien à faire face à une telle démonstration.

Colmar dans deux jours

Alaphilippe, lui, a savouré. Il a passé du temps dans la zone mixte, à répondre aux médias, accoudé aux barrières, à donner des accolades, d’abord à ses coéquipiers et à son cousin-entraîneur, Frank, dans la zone d’arrivée, puis à Raymond Poulidor, en coulisses – un homme qui n’a jamais porté le maillot jaune. Avant ça, il avait été proche des larmes, en pleine interview avec France Télévisions, quand il a vu passer à côté de lui un maillot jaune qu’il allait enfiler quelques minutes plus tard. Le Français était encore dans son exploit, descendu du vélo, mais encore dans la course, sans doute, dans son esprit. Il aura le temps de réaliser plus tard, à partir de demain sur la route, quand il étrennera la tunique de leader, même s’il a pu, déjà, l’embrasser symboliquement sur le podium protocolaire. La prochaine question sera de savoir combien de temps Alaphilippe peut garder ce maillot. Mais ça n’a que peu d’importance. Tout ce qui compte est d’en profiter. Et pour ça, on a rarement fait mieux qu’une victoire d’étape avec le paletot sur le dos. Ça tombe bien, dans 48 heures, on arrive à Colmar, une autre étape qu’Alaf avait coché avant le départ du Tour.

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