Les mots sont difficiles à trouver après un tel final. Trois hommes ont illuminé les derniers kilomètres de Milan-Sanremo, et on reste bouche bée. Peter Sagan a initié l’offensive. Il a été accompagné par Michal Kwiatkowski et Julian Alaphilippe. Un trio de patrons. Trois mecs qui n’ont peur de rien et qui nous ont offert une fin de course inoubliable.

Le favori a choisi

« Je suis le favori de toutes les courses auxquelles je participe. Je suis habitué », souriait Peter Sagan il y a deux jours, en conférence de presse. Et ce statut, le Slovaque l’a assumé. Dans le Poggio, il aurait pu rester assis sur sa selle en attendant le sprint final. Mais il a décidé de sortir. Avant la course, Michal Kwiatkowski avait d’ailleurs été prophétique : si un seul coureur était capable de faire la différence dans l’ultime difficulté de la journée, c’était bien Sagan. Alors quand le Polonais a vu démarrer le double champion du monde, il n’a pas hésité. Comme Julian Alaphilippe, il a tout donné pour ne pas être distancé. Les deux hommes ont donc réussi à accompagner le monstre Sagan, à faire la descente du Poggio ensemble et à se jouer la victoire. La preuve que non, Milan-Sanremo n’est pas encore réservée aux sprinteurs. La preuve, aussi, que ces trois-là sont à part. Des coureurs comme on en fait peu, avec de sacrées cuisses mais aussi beaucoup de panache. Et bordel, ça fait du bien.

Sur la via Roma, pourtant, Peter Sagan n’a pas levé les bras. Pour la deuxième fois de sa carrière, il a pris la deuxième place de la Primavera. Le petit pêché mignon du Slovaque, si souvent passé à côté de grands succès. Mais sur le podium, le garçon avait le sourire. Il n’avait pas gagné, mais il avait en partie réussi son coup. Lui l’homme qui détonne dans le monde policé du vélo, avec sa longue chevelure et ses jambes pas toujours rasées, est parvenu à choisir qui monterait sur la boîte de la Classicissima. Devant lui, on trouve donc son pote et rival de toujours, Michal Kwiatkowski. Un mec qui lui a souvent fait des misères, mais qu’il respecte énormément. Et derrière lui, il y a Julian Alaphilippe, un autre phénomène. « Ce qui est bien si je ne gagne pas, c’est que je peux décider de qui gagne », avait lâché Sagan sourire en coin, cette semaine. Pari réussi. Avec son attaque, il a dynamisé le final et empêché un sprint. Pour amener sur le podium la crème de la crème. Et sur la Rai, après la course, il pouvait la jouer vainqueur malgré tout : « Les résultats ne comptent pas. L’important, c’est de faire le spectacle. »

Intouchables

Un an après Sagan sur le Tour des Flandres, Michal Kwiatkowski a donc décroché son premier monument. Et comme aux Strade Bianche 2014 ou au GP E3 de l’an dernier, il a devancé le Slovaque. Parce que ces deux-là, depuis leurs plus jeunes années, ne se quittent pas. Ils sont les deux derniers champions du monde, et les deux cadors des classiques. Après les victoires de Kristoff, Degenkolb et Démare au sprint ces dernières années à Sanremo, ils ont brisé la dynamique. Les voilà au sommet de leur art. Terriblement costauds et vainqueurs, en l’espace de trois semaines, de Kuurne-Bruxelles-Kuurne, des Strade Bianche, de deux étapes de Tirreno et désormais de Milan-Sanremo. Ils sont incontestablement les patrons du peloton aujourd’hui. Bientôt rejoints, sans doute, par un Français de deux ans leur cadet, mais qui en les accompagnant, pour son premier Milan-Sanremo, a plus que pris rendez-vous.

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