Il y a certains anniversaires que l’on préfèrerait ne pas souhaiter, et celui-ci en fait partie. Cela fait désormais vingt ans qu’un Français n’a pas été champion du monde, et dire que cela va changer ce dimanche, à Bergen, serait un brin prétentieux. Mais avec Julien Alaphilippe, l’équipe de France a une chance de mettre un terme à cette disette.

J’y crois par Robin Watt

Rappelez-vous il y a un an. On salivait du sprint annoncé à Doha, dans lequel on imaginait voir Arnaud Démare et Nacer Bouhanni. Finalement, les deux larrons absents de l’emballage final, ce fut un fiasco pour les Bleus. Depuis, Cyrille Guimard a pris la tête de la sélection et apporté sa force de caractère. Lui a su choisir, ce qui n’avait pas été fait au Qatar. L’équipe sera donc articulée autour d’un seul homme : Julian Alaphilippe. Il n’y aura pas de guerre d’ego, pas de stratégies parallèles, pas d’ambigüité : huit garçons seront au service d’un leader, la seule façon d’espérer l’emporter. Le succès de Ballan est la dernière illustration d’un vainqueur qui n’était pas l’unique leader de sa formation : cela remonte à bientôt dix ans.

Alors bien sûr, ne pas emmener de sprinteur à Bergen peut faire débat. Mais au moins, l’équipe de France ne s’éparpillera pas. Son seul objectif devra être de durcir la course pour qu’il reste le moins d’hommes possibles autour d’Alaphilippe. Ensuite, ce sera au puncheur de Quick-Step de faire la différence. Troisième de Milan-Sanremo au mois de mars, il a prouvé de quel métal il était fait : celui des cadors. La distance ne lui fait pas peur, et il sait profiter de la moindre difficulté pour dynamiter la course. Annoncé en grande forme par son entourage (« comme en avril avant de se blesser », confie même son frère et entraîneur, Franck), il vient avec le maillot arc-en-ciel dans la tête. « Je ne vais pas là-bas en disant on va voir, assurait-il récemment à Stade 2. Quitte à y aller, autant y aller pour gagner, rien d’autre. » Tout est réuni pour.

Je n’y crois pas par Théo Sorroche

Certains coureurs offrent des promesses, d’autres des gages. Contrairement à beaucoup d’autres, Julian Alaphilippe a tutoyé le sommet de la hiérarchie cycliste dès sa deuxième année. En dépit d’un beau succès ardennais, dont l’a privé Alejandro Valverde à trois reprises (la Flèche 2015 et 2016, Liège 2015), le Français a déjà enfilé une belle pancarte de favori quand il s’agit de briller par son punch. Sa redoutable pointe de vitesse en petit comité peut aussi lui permettre de mettre à profit sa faculté à passer les courtes bosses sa très large victoire sur la huitième étape de la Vuelta en est une nouvelle preuve. Il est donc logique qu’il soit un des favoris pour dimanche. Il a d’ailleurs démontré à Sanremo en mars qu’il était tactiquement au point pour jouer la gagne.

Oui mais, lorsque nos yeux se posent sur son palmarès, un constat s’impose de lui-même : Alaphillipe n’est pas un gagneur. Pas encore. C’est pour ça qu’il a été battu sur la via Roma, et c’est pour ça qu’il ne gagnera pas dimanche. Réussir à concentrer tout son sang froid, son talent et sa hargne dans la dernière ligne droite arc-en-ciel n’est pas une sinécure pour un coureur n’ayant jamais éprouvé la sensation de domination sur une classique d’envergure. Face à lui, malgré les absents de marque, il aura un double champion du monde, Peter Sagan, un champion olympique, Greg Van Avermaet, un autre champion du monde, Michal Kwiatkowski pour n’en citer que trois. Trois monstres dont le palmarès est éloquent. La différence entre un talent et un champion. Ajoutez à cela des hommes plus en forme comme Trentin, une équipe sélectionnée par un Cyrille Guimard un brin trop éclectique et une saison pourrie par les blessures : vous obtenez une très mince chance de l’emporter.

Selon vous, Julian Alaphilippe deviendra-t-il champion du monde dimanche ?

Buy me a coffeeOffrir un café
La Chronique du Vélo s'arrête, mais vous pouvez continuer de donner et participer aux frais pour que le site reste accessible.