Paris-Tours au lendemain du Tour de Lombardie, c’est cumuler les plaisirs, ou bien les déceptions. Deux jours de suite, des favoris aux profils bien différents n’ont pas su comprendre que la course leur filait entre les doigts. A Tours, Jelle Wallays, habitué des lieux, a fait une Mollema en piégeant des cadors trop attentistes.

Neuf ans après

Tout ça s’est joué à pas grand-chose. Une chute à l’entrée d’un chemin de vigne, tout le monde qui met un coup de patins, Jelle Wallays qui se retrouve avec deux mètres d’avance. Il faut réfléchir vite, ou plutôt ne pas réfléchir. Appuyer fort sur les pédales, tout de suite, même à cinquante kilomètres de l’arrivée. Et voir ensuite comment les autres réagissent. Le Belge l’a compris. Il n’est pas un cador des classiques mais il sait malgré tout où il mettait les pieds, ce dimanche. Paris-Tours est sa course, en quelque sorte. Il s’y était imposé chez les espoirs, en 2010, à 21 ans, alors qu’il venait de signer un contrat de stagiaire chez Topsport Vlaanderen, quelques semaines plus tôt. Démare et Vermote faisaient partie des battus, déjà, à l’époque. Dire que le bonhomme avait pris rendez-vous serait un peu facile, parce que ceux qui ont gagné avant ou après lui n’ont pas tous confirmé chez les grands. Mais pour lui, l’histoire ne faisait vraiment que débuter.

Quatre ans plus tard, toujours sous les mêmes couleurs, mais chez les professionnels cette fois, il avait remis ça. Cette vois, le vaincu s’appelait Thomas Voeckler, au terme d’une échappée matinale finalement victorieuse, c’est assez rare pour le signaler. Mais il faut croire que les cadors n’ont pas jugé nécessaire de se méfier, en 2019 cette fois, quand le bonhomme est sorti de nouveau. Ils avaient déjà fait l’erreur un peu plus tôt, en laissant filer Soren Kragh Andersen, pas un inconnu lui non plus, puisqu’il avait le dossard n°1 collé dans le dos. Le peloton n’a d’ailleurs revu le Danois qu’à la faveur d’une crevaison malheureuse, sinon il aurait été en mesure de s’allier à Jelle Wallays pour filer encore plus rapidement vers l’avenue de Grammont. Niki Terpstra, Oliver Naesen et Arnaud Démare n’ont plus que leurs yeux pour pleurer. Les deux premiers ont sauvé un podium sans saveur, dont ils ne se rappelleront pas longtemps, alors que le Français a pris une quatrième place encore plus amer.

A trop se regarder…

On ne trouvera pas d’excuses à ces favoris trop peu attentifs. La fin de saison et ses organismes usés ne peuvent tout expliquer. Hier, la majorité de ces garçons étaient sans doute devant leur télé pour regarder le Tour de Lombardie, et ils ont vu les cadors, déjà, sous-estimer un Bauke Mollema qui s’est ainsi offert le plus beau succès de sa carrière. Sans doute ont-ils même pensé, un moment, que les Roglic, Bernal et compagnie s’étaient sacrément plantés, quand même. Mais ils n’ont pas fait mieux. Terpstra a crevé et il est le seul qui puisse invoquer la malchance, ce soir. Les autres reviendront dans un an. Et s’ils font la même erreur, alors Jelle Wallays, désormais trentenaire, pourrait aller chercher un troisième succès dans Paris-Tours qui en ferait le recordman de victoires, avec Erik Zabel, Guido Reybrouck, Paul Maye et Gustave Danneels. Ce serait un bon moyen de fêter les dix ans de sa victoire chez les espoirs, tiens.

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