Pour la cinquième fois depuis 1993, le Tour de France s’élance depuis la Vendée. Une fréquence remarquable, qui place la région parmi les plus fidèles partenaires de la Grande Boucle. En ces lieux toujours propices à des courses vivantes, à travers les pièges du bord d’océan et du célèbre bocage vendéen, on s’est rarement ennuyés. Souvenirs.

1993 : Indurain plus rayonnnant que jamais

Nous sommes en 1993, au zénith du règne de Miguel Indurain. Avec deux victoires consécutives en 1991 et 1992, l’Espagnol a déjà montré l’étendue de son talent. Tout en puissance dans les chronos, tout en maîtrise dans les montagnes. C’est pourtant au Puy du Fou que le leader de Banesto vient remettre la Grande Boucle à ses pieds en s’adjugeant le prologue. Sans creuser d’écarts colossaux, il parvient à devancer Alex Zülle de huit secondes, puis quelques autres spécialistes de l’effort solitaire comme Tony Rominger ou Thierry Marie. De façon implacable, Indurain montre qu’il compte bien être le patron une année de plus. Dans son style caractéristique, tout en sobriété.

Tout l’inverse de celui qui lève les bras le lendemain du côté des Sables d’Olonne. Aujourd’hui, on ne présente plus Mario Cipollini. A l’époque, l’Italien est encore un sprinteur sur le chemin de la reconnaissance sportive, lui qui est déjà une vraie bête médiatique. En témoigne cette déclaration à l’arrivée de l’étape : « Je ne peux être battu que si je suis à 80 % de mes moyens et les autres à 110 %. » En tout cas, en cette première étape, personne ne lui arrive au pédalier, dans ce sprint balnéaire marqué par une chute spectaculaire impliquant Djamolidine Abdoujaparov. Ayant pris part aux sprints pour les bonifications, Indurain conserve son paletot jaune. Le plein de confiance avant de mettre cap au nord et Vannes, avec, et ce pour la première fois dans l’histoire du Tour, un petit détour sur l’Ile de Noirmoutier et le passage du Gois.

1999 : un futur roi au Puy du Fou

Six ans plus tard, on reprend les mêmes routes et on recommence. Le prologue, copie conforme de celui de 1993, voit l’avènement d’un drôle d’énergumène, dont on est loin d’imaginer l’histoire tumultueuse qui sera la sienne sur le Tour de France. Revenu d’un cancer aux testicules quelques mois plus tôt, celui-ci sidère tout son petit monde en s’adjugeant la victoire, sept secondes devant… Alex Zülle. Un maillot jaune qui verra se rapprocher un certain Jan Kirsipuu de l’équipe Casino, vainqueur le lendemain du côté de Challans. Une étape limpide au format échappée matinale / retour du peloton / sprint, ponctuée par un rush royal de l’Estonien, vainqueur devant Tom Steels, Erik Zabel et Stuart O’Grady.

Lors de la deuxième étape, le coureur de Vincent Lavenu, vainqueur des trois sprints intermédiaires de la journée et second de l’étape derrière Tom Steels, dépossède Armstrong de son maillot jaune. Mais pour le leader de l’US Postal, la journée est tout même réussie puisque l’un des ses principaux adversaires a déjà perdu le Tour. Dans le passage du Gois, une chute collective met à terre plusieurs gros poissons : Boogerd, Gotti, Rinero, Brochard, mais surtout Alex Zülle. Devant, ce qu’il reste du peloton embraye pour semer tout ce petit monde, avec à la barre les Once, les Cofidis mais surtout l’US Postal. Efficace, puisque ce sont seulement 70 coureurs qui se présentent dans le temps du vainqueur. Les perdants du jour, eux, arrivent à Saint-Nazaire avec six minutes de retard et un goût de défaite très amer.

2005 : coup de massue Texan

Six ans après, Lance Armstrong est encore là. Ultra dominateur sur la Grande Boucle, avec déjà six victoires consécutives dans la besace, c’est avec une ambition intacte qu’on le retrouve au départ de ce chrono inaugural, tracé du continent et Fromentine, jusqu’à Noirmoutier. Avec 19 kilomètres au programme, les écarts sont possibles et les rouleurs ont tout pour être à la fête. C’est alors un autre Américain qui revêt le maillot jaune à l’arrivée. David Zabriskie, bête à rouler de la CSC, s’adjuge l’étape deux secondes devant Armstrong. Un succès de prestige, aujourd’hui rayé à l’indélébile suite à ses aveux de dopage survenus en 2012.

L’image du jour restera cependant celle d’un Jan Ullrich dépassé par la fusée de Discovery Channel, pourtant partie une minute après lui. Un vrai coup de massue pour le champion allemand, qui ne s’en remettra pas sur le reste de l’épreuve. Les autres prétendants à la victoire sont KO eux aussi : Vinokourov, Kloden, Basso, Botero… Tous sont repoussés loin, très loin. La messe est déjà pratiquement dite. Le retour sur le continent sera plus anecdotique, avec la victoire de Tom Boonen, devant Thor Hushovd et Robbie McEwen. Mais la vedette du jour se révélera être vendéenne, bien que d’adoption. Présent dans l’échappée du jour, Thomas Voeckler décroche le maillot à pois. Un an après sa folle aventure en jaune encore bien présente dans les mémoires.

2011 : Gilbert vole au mont des Alouettes

Petite trouvaille de l’organisation, la première étape vient s’achever au sommet du mont des Alouettes, au dessus de la commune des Herbiers. Pour éviter tout incident, le peloton s’élance neutralisé depuis Noirmoutier et le passage du Gois, avant de longer les plages et revenir dans les terres. Le genre d’étape piégeuse toujours redoutée par les favoris. Et ce n’est pas Alberto Contador qui dira le contraire. Pris dans un embouteillage suite à une chute à neuf kilomètres de l’arrivée, l’Espagnol concède 1’20 sur le vainqueur du jour, Philippe Gilbert. Le Belge triomphe sur une arrivée taillée pour lui. Le héros des classiques ardennaises de l’année, auteur du triplé Amstel-Flèche-Liège, est alors au sommet de son art.

Un autre genre d’art, à tendance collective, est à admirer le lendemain du côté des Essarts. C’est un contre-la-montre par équipes qui attend les coureurs pour la deuxième étape. L’occasion pour les formations de spécialistes de se mettre en évidence, à l’instar des Garmin-Cervelo qui raflent la mise pour quatre petites secondes. Tout se joue dans un mouchoir de poche : BMC, Sky, Leopard et HTC-Highroad se tiennent en seulement cinq secondes. Une homogénéité incroyable qui laisse le classement général complètement ouvert pour les jours suivants. En attendant, c’est Thor Hushovd qui revêt le jaune. Et ce pour une longue semaine, avant le massif central et l’incroyable success story de ce Tour. Celle d’un enfant de la région. Un certain Thomas Voeckler.

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