Après les abandons de Bernal et Roglic, Thibaut Pinot était en position parfaite pour remporter le Critérium du Dauphiné. Il est finalement battu par Daniel Martinez et décroche une deuxième place au goût mitigé.
Rocambolesque
Si on avait dit à Thibaut Pinot qu’il terminerait deuxième du Dauphiné, il y a 24 heures, il n’aurait sans doute pas été terriblement déçu. Peut-être même aurait-il signé des deux mains, conscient que le Primoz Roglic que l’on voit à l’œuvre depuis dix jours, de toute façon, est intouchable. Mais avec l’abandon du Slovène, dans la matinée de ce dimanche, la deuxième place du Franc-Comtois sur le podium final a un goût autrement plus amer. Pour lui comme pour nous. Un goût d’incompréhension, aussi, tant ce qu’on a vu dans les trente derniers kilomètres est difficilement explicable. Costaud depuis le départ du Dauphiné, Thibaut Pinot était un très solide dauphin de Roglic, deuxième au col de Porte, troisième à Saint-Martin-de-Belleville, chaque fois dans la roue du leader de Jumbo-Visma. Mais il a suffi d’une étape pour exposer les faiblesses du Français, qu’on a même du mal à exposer tant il nous a fait passer par tous les états.
On aurait pu comprendre qu’il soit battu par la densité de ses adversaires qui, en jouant chacun leur chance et en faisant reposer la course sur Pinot, avaient les cartes en main pour tout renverser. On aurait même pu comprendre qu’il ait un jour sans, et c’est d’abord ce à quoi on a cru, dans la côte de Domancy, à une trentaine de kilomètres de l’arrivée finale à Megève. Pinot, leader sans maillot jaune, était attaqué de tous les côtés. Il ne pouvait pas sauter sur chaque offensive, forcément, mais le fait qu’il n’en suive aucune avait de quoi inquiéter. L’énervement a vite pointé, un bidon jeté au sol semblait alors sceller l’histoire. Ses équipiers avaient déserté, le Dauphiné était en train de lui échapper et il ne reverrait plus. Sauf que tout aurait été trop binaire, trop simple. Thibaut Pinot n’est pas comme ça. Il aime quand c’est compliqué.
Tout n’est pas perdu
C’est pourquoi quand il perd, c’est toujours un peu plus frustrant qu’une simple défaite. Comme sur le Tour 2019, l’échec s’accompagne souvent d’une victoire historique qui semblait à portée de main. Bien sûr, le Dauphiné n’est pas le Tour, mais un maillot jaune ce dimanche, à Megève, aurait été hautement symbolique. Parce que depuis Christophe Moreau en 2007, aucun coureur français n’a remporté le Dauphiné, ou même n’importe quelle autre course par étapes World Tour. Plus révélateur encore, pour les grimpeurs tricolores à qui on a prédit monts et merveilles sur le Tour de France, porter un maillot jaune sur une course à étapes d’envergure est une rareté. Thibaut Pinot, comme Warren Barguil, l’a fait l’espace de quelques jours sur le Tour de Suisse. Mais jamais jusqu’au bout, jamais non plus sur le Dauphiné, la course si souvent annonciatrice du Tour à venir.
Il faudra donc se contenter de cette deuxième place, pourtant, à moins de trente secondes de Daniel Martinez, finalement vainqueur. Dans la dernière montée, Pinot s’est repris en main, a montré qu’il avait les jambes et on s’est alors demandé ce qu’il s’était passé, un peu plus tôt dans l’étape. La pression était sur lui et on aime dire qu’il la supporte mal, mais pour un bonhomme qui a gagné à l’Alpe d’Huez et au Tourmalet, en montant sur le podium du Tour, déjà, ces trente derniers kilomètres n’avaient rien de très impressionnants. Alors on se consolera, et lui aussi, on espère, en se disant qu’il a eu un aperçu d’une situation qu’on espère voir de nouveau dans quelques semaines. Même sans le maillot jaune, il a vu ce que c’était d’être le leader d’une grande course et de devoir assumer. Il vaut mieux se rater sur le Dauphiné que deux semaines plus tard. Alors Thibaut Pinot est pardonné. Tout le monde va ranger sa frustration parce qu’il y a plus beau et plus grand à viser, très vite.
Pinot ne pouvait en effet pas sauter sur tous ses adversaires parce qu’il était trop esseulé.
On n’attaquait pas la Sky, on n’attaque pas la Jumbo, parce qu’il reste trop d’equipiers à proximité de l’arrivée. Ce matin c’est Pinot qui est devant, et son équipe est une des rares à être au complet question grimpeurs et puncheur. Comment se fait-il que seul Reichenbach ait pu l’accompagner ? Pourquoi avoir grillé des cartouches hier dans un sprint inutile ?
À la fin de la carrière, pour moi une bonne part de son maigre palmarès résidera dans son choix de rester dans une équipe de milieu de tableau.
Pas tout à fait au complet malgré tout puisqu’il manque Gaudu.
Et même Molard. Mais ces deux là ne sont pas en forme depuis la reprise.
C’est malheureux, mais pour moi on a vu que Pinot ne dispose pas d’une équipe qui lui permettrait de gérer le leadership d’une course de très haut niveau. Le fait que tout le monde l’a attaqué dès le début d’étape en est un symptôme. Les équipes de Roglic et Bernal sont au contraire beaucoup plus (et beaucoup trop) respectées.
Plutôt d’accord avec la première partie de votre commentaire mais quelle équipe devrait-il rejoindre d’après vous ? Malgré tout son talent, il ne serait pas leader absolu (peut-être même pas co-leader) à la Jumbo ou chez Ineos.Les autres équipes ne sont pas meileurs que la FDJ pour aider un leader en montagne. Aujourd’hui, les favoris avaient un équipier avec eux, comme Pinot, ou aucun. Si on prend en compte les autres fronts, on peut supposer que la Bora et Astana peuvent mieux épauler un leader que la Groupama-FDJ avec Gaudu en plus mais je crois qu’on a fait le tour.
Je rebondis également sur l’évocation du « maigre palmarès » de Pinot. Vous voulez dire qu’il est maigre par rapport à son talent non ? Parce qu’il a quand même de quoi rendre jaloux l’immense majorité des coureurs du peloton.
Oui effectivement, c’est relatif au moteur physique qui est le sien ;-)
Quelle équipe pourrait lui convenir ? À l’heure actuelle je ne vois que des équipes avec des leaders au moins équivalents (et donc peu intéressées) ou des effectifs moins cohérents que celui de la FDJ.
Franchement Reichenbach-Gaudu-Madouas-Kung c’est plus qu’honorable, sur le tour l’année dernière la FDJ était clairement parmi les meilleures équipes en montagne et a fait un excellent weekend chrono.
Après le Dauphine reste une course difficile à gérer pour le leader.
Il y a eu déjà les antécédents de Contador en 2014 et de Richie Porte en 2018 qui avait la course bien en main à la veille de l’arrivée et qui finalement avaient fini par succomber aux attaques de leurs adversaires.
L’absence de CLM y est pour quelque chose les écarts étant souvent infime comme ce fût le cas aujourd’hui.
C’est vraiment dommage pour Pinot, cela lui aurait enfin apporté une course d’une semaine à son palmarès déjà bien fourni, mais ce n’est que partie remise et je croise les doigts pour que septembre lui appartienne.
Grosse incompréhension concernant la tactique de Bardet…Il n’est pas de la même équipe et donc n’avait aucunement l’obligation de rouler pour Pinot. Mais néanmoins pour jouer l’étape et un bon CG il avait tout intérêt à ce que le groupe rentre et donc à collaborer avec Pinot. Hors malgré une condition moyenne cette semaine, il a refusé de collaborer et n’a fait que de placer des contres qui ont eu pour conséquence de foutre le bazar dans le groupe Pinot. Il n’avait aucune chance de revenir seul et s’est entêté dans cette tactique. Aujourd’hui on peut avoir l’impression au vu de la course que Bardet nourrit une certaine rengaine à voir qu’il n’est plus la tête de gondole du cyclisme français. En tout cas il a tout fait pour que la tâche de Pinot soit la plus dure possible.
Rancœur plutôt que rengaine. C’est vrai qu’il semble y avoir une vraie rivalité entre les 2 coureurs qu’on a toujours présentés depuis près de 10 ans comme les seuls vainqueurs potentiels de grands tours en France.
Il a en effet un facon etonnante d´avancer ses pions pour le Tour; je ne suis pas sur que Lavenu et Madiot aient appréciés..
Dommage de ne pas avoir mis ce Dauphiné dans son escarcelle, mais bon, on sera tous d’accord pour dire que la course qui compte vraiment, elle est dans quinze jours.
J’ai trouvé Pinot plutôt rassurant sur cette semaine de course, et il sort du Dauphiné certes frustré (c’est légitime), mais avec pas mal de certitudes, notamment celle de ne pas avoir grand chose à envier à Roglic ou Bernal, qu’on nous annonce à grand renfort de trompettes comme les deux hyper-favoris du Tour, surtout que contrairement aux deux autres, qui avaient sortis les armadas, il était sans Gaudu ni Molard.
L’enjeu, à présent, va être de récupérer au mieux.
D’autant que je soupçonne Roglic d’être trop en avance sur sa préparation.
Ça m’étonnerait pas qu’il coincé en 2 ème ou 3 ème semaine du Tour
A l’inverse Pinot et compte tenu du contexte Covid j’aurais plutôt pensé le voir à la ramasse et en manque de repère alors qu’il semble être dans des temps de passage digne d’un mec qui va jouer la gagne sur le Tour
On va voir ce que ça va donner, j’espère être dans le vrai
Complètement d’accord. Mon inquietude se concentre par ailleurs sur ces douleurs dorsales suite à sa chute (qui lui a sans aucun doute rendu la tâche beaucoup plus difficile pour obtenir le dauphiné). Mis à part cela je préfère être à la place de Pinot au lendemain du dauphiné que Quintana, Landa ou même Bernal. Attention à Dumoulin qui fini finalement plutôt bien l’épreuve!
Ce podium avec ses 2 CHUTES RECENTES A DIGERER me semble un bon résultat compte tenu aussi du niveau de son equipe. Il a par ailleur fini la course contrairement à d´autres cadors qui se sont retirés; compliments .
Un peu décu normal mais l´essentiel est sauf; pas de gros bobo a priori et une seconde place qui lui correspond bien en depit des évènements ..
Enfin la star du jour c´est quand mème Miguel Martinez; un petit mot sur lui où boycott complet ?
Daniel Martinez.
Effectivement, on pourrait aussi parler de sa performance. J’étais très content qu’il gagne ce Dauphiné. J’aime beaucoup cette équipe EF et j’espère qu’ils auront d’autres gros résultats.
un petit mot effectivement sur un jeune qui n’explose pas à 19 ans mais qui confirme de manière crédible un beau potentiel comme son coéquipier Higuita. Un petit mot quand même sur cette dernière étape qui a été fantastique et démontre que cette équipe EF roule souvent juste avec de l’audace lorsque une équipe (toujours suspicieuse) ne cadenasse pas la course. Nous avons eu la démonstration que les armadas tue littéralement ce sport.
Je l’adore pinot et je le suis depuis 2009 mais hier franchement… quel désastre! Quel naufrage! À mes yeux, Il a perdu toutes ses chances de gagner le tour sur une crise de nerfs parce-que ces adversaires l’ont « attaqué »(non??? Ils ont osé faire ca? C’est fou!). Terriblement décu! Au debut je pensait a une fringale et je me suis dit que c’etait assez tranquille pour le TdF, mais la c’est pas serieux, je pensais que a 30 ans, avec une carrière desastreuse (en terme de cg sur les grands tours) derrière lui au moins mentalement e tactiquement il etait au niveau mais, helas, mème-pas ca! Il a toujour été un des plus forts phisiquement, c’est un coureur d’élite et je pensais que en 2019 après la claque qu’il a pris sur le tour il etait definitivement rentré dans la cours des grands favoris. Mais niet…
Voyons un peu les conditions a atteindre pour que pinot gagne le TdF 2020:
1) pas de chute: bon ca encore il est dans la moyenne, ca devrait passer
2) aucune maladie en 3 semaines en septembre: mhouais, ca devient compliqué, mais on sait jamais…
3) personne n’attaquera en descente et si oui un adversaire doit le ramener a chaque fois, parce-que sur ce dauphiné sur les descentes de cols il perdait au moins 15-20 places a chaque fois: ben si les coureurs sont si lents qu’ils sont incapables de le lacher en descente ils seront aussi incapable de le ramener donc bon… pas terrible.
4) pas de pepins physiques: comme en 2019 quoi… lol!
5) qu’il prenne le maillot jaune seulment lors du CLM final parce-que on a vu hier qu’il n’a pas l’equipe pour l’avoir et surtout pas le mental pour le porter une journée sur le… dauphiné, face a… martinez (wow!): la franchement si il a le maillot une seule journé avant le CLM les ineos e jumbo vont lui mettre la misère avec leur armada de gars qui ptetendes a un top 10 sur le tdf, ils vont le faire pleurer je pense.
6) qu’il ne prenne pas de bordures ou cassures: alors là je pense que a chaque fois qu’il est venu sur le tdf pour le CG il à pris au moins une bordure. Je crois que la première année il en prend mème 2.
7) qu’il n’aura pas de jours sans en montagne en 3 semaines.
Après toutes ces années passé a y croire, je pense que je suis près a accepter que ce coureur que j’adore a tout simplement autant de points faibles que de force dans les jambes et courage dans son coeur et qu’il ne peut tout simplement pas gagner, d’aucune facon une course par etapes world tour. Thibaut, ecoute-moi et va sur le tdf pour les etapes e le maillot a pois. En revanche pour le CG je pense que tes adversaires rigolent et te cite parmi les favoris du tour juste pour faire plaisir au journalistes francais qui les interrogent…
C’est vrai quelle brelle! Des gars qui gagnent un monument, des étapes sur les 3 GT, des victoires sur les plus belles arrivées au sommet….On en a des dizaines en France…surtout depuis les années 2000! Sérieusement…le cyclisme ne se résume pas à juillet.
Je pense qu’il ne faut pas raisonner seulement en terme de palmarès, mais en mettant en regard les résultats, le potentiel et les occasions de gagner. Serait-on satisfait si Evenepoel terminait sa carrière dans 10 ans avec 20 victoires dont 15 dans des courses de seconde zone ?
Pinot a beaucoup de potentiel et peine à réussir dans les classements généraux. De nombreux coureurs que l’on ne connaissaient pas quand Pinot a finit 10è du Tour en 2012, possèdent à présent des victoires dans le CG des grands Tours : Quintana, Aru, Bernal, Dumoulin, Yates, Carapaz, Roglic, Thomas…
Si on m’avait dit en 2012, quand Pinot finit dans les 10 avec une belle étape, une performance très rare à cet âge, qu’il ne compterait qu’un seul podium 8 ans plus tard, et aucun CG dans une course d’une semaine world Tour, j’aurais trouvé ça très décevant. Et ce constat ne se limite pas à Juillet, puisqu’il a connu des déconvenues similaires au Giro ou à la Vuelta.
La liste des occasions manquées est très longue, il a déjà perdu le Tour de Suisse deux fois face à Ruiz Costa alors qu’il était le plus fort en montage, le Dauphiné, le podium du Giro, la victoire dans le Tour de Romandie, le Critérium International face à Perrault, le podium du Tour l’an passé, etc. Maladie, chute, bordures à répétition, c’est rageant.
C’est tout de même inquiétant cette incapacité chronique à gérer la pression. Qu’il ait eu un coup de moins bien, certes, mais de là à « perdre les pédales » ! Comme le soulignaient Jalabert et Pasteur durant le direct « c’est difficile de se retrouver propulsé leader d’une course sans y être préparé. » Ces propos m’ont interloqué. Ca fait tout de même presque 8 ans que Pinot se prépare à faire le CG des courses à étapes, qu’on le met dans la peau d’un leader. Il a déjà été vainqueur de courses de ce type (certes moins dures que le Dauphiné), mais si à presque 30 ans, en étant second au général derrière Roglic, il ne se prépare pas mentalement à la possibilité d’un abandon du Slovène, ça questionne non ? Chaque fois qu’il est en position de s’imposer dans un classement général, il a un souci.
Quand on le voit, au Dauphiné, jeter son bidon de colère, au lieu de rouler pour contenir l’écart, on peut dire que la gestion de la course et des émotions n’est pas encore au point. Ensuite, il se met à rouler sérieusement quand il y a 1 min 30 d’écart et que tout est perdu. Pourquoi ne pas avoir roulé dans la côte de Domenci quand il n’y avait que 30 secondes ? Si physiquement, il était costaud, il a montré des limites psychologiques inquiétantes. Si un jour il se retrouvait en position de gagner le Tour ou le Giro, ses rivaux sauront lui mettre la pression.
Reste la faiblesse de l’équipe, mais Martinez n’avait pas d’équipier non plus et bien que plus jeune que Pinot, il a su gagner.