L’ensemble de la rédaction de Chronique du Vélo a fait ses pronostics en vue du Tour. Nous avons chacun livré notre top 10, notre maillot vert et notre maillot à pois pour finalement établir notre propre classement. Jusqu’à la veille du départ, nous allons donc vous présenter ces protagonistes via des portraits décalés. Le but : vous faire redécouvrir ces champions dont on parle déjà tout au long de l’année. Voici donc Louis Meintjes, que nous avons classé neuvième.

Lorsque vous croisez Louis Meintjes, vous vous en souvenez. Avec son corps frêle, sa bouille enfantine et sa voix cristalline, vous auriez presque peur de le casser en lui serrant la main. Et pourtant, sur le vélo, le garçon n’a plus rien du gamin de Pretoria né il y a 25 ans dans un monde étranger au cyclisme. Aujourd’hui, l’enfant star est devenu un prétendant légitime au podium sur le Tour de France. Comme s’il était né pour ça.

Un prodige

« A new star is born », titrait le site sud-africain de référence Bicycling en janvier 2011. Louis Meintjes apparaissait alors pour la première fois en photo, arborant un sourire de rigueur sur son visage de petit garçon, son corps d’adolescent chevauchant sa machine Cervelo. Louis Meintjes était déjà à ce moment-là la pierre angulaire de la Toyota Supercycling Academy, après avoir été repéré quelques années plus tôt par Barrry Austin, le plus prestigieux détecteur de talent du continent. Pour une fois, le recruteur n’avait pas eu à prospecter longtemps pour dénicher le talent Louis Meintjes. Facile vainqueur du Tour d’Afrique du Sud des moins de 16 ans en 2008, le surdoué du pays arc-en-ciel avait tout de suite convaincu dans l’académie en remportant la deuxième étape du Tour d’Irlande junior, cette épreuve qui a révélé les talents de Robert Gesink, Nicolas Roche ou Luke Rowe. En 2010, Meintjes s’affirme définitivement comme le plus grand espoir africain de sa génération en réalisant le doublé route-chrono de ses championnats nationaux juniors.

Il devient le centre de l’attention médiatique en Afrique du Sud au début de l’année suivante car les observateurs sont alléchés par ses futurs joutes avec les professionnels. Il n’a alors que 18 ans, et dans son pays, une nouvelle star est née. Alors quand les colonnes de Bicycling le laisse s’épancher sur son avenir, Meintjes voile à peine ses ambitions : « Je ne sais pas vraiment quelle carrière je veux suivre plus tard, commençait-il timidement, mais je pense que je vais essayer d’être un coureur cycliste à temps plein. Mon but est de courir en tant que professionnel et pourquoi pas un jour dans une équipe internationale. » Le petit sait ce qu’il veut et, quelques mois après, Meintjes dame le pion aux meilleurs coureurs du continent lors de la course par étapes du Clover Lowveld. À seulement 19 ans, il bat notamment des professionnels de la MTN-Qhubeka comme Dennis van Niekerk, la référence africaine. Le prodige frappe à la porte du plus haut niveau.

L’exemple Chris Froome

En Afrique du Sud, on le dit alors bon grimpeur, même si, là où il vit, la route ne s’élève jamais vraiment. Alors Meintjes travaille ses watts : « En s’entrainant ainsi, en jouant sur la puissance, c’est un peu comme si je grimpais. » C’est cette aptitude à passer les bosses qui lui permet de décrocher une médaille d’argent aux championnats du monde espoir à Florence, en 2013. Seul Matej Mohoric, son futur coéquipier, le devance. Meintjes termine sa première saison pro avec MTN-Qhubeka, qu’il a rejoint après une année belge chez Lotto-Belisol U23, sur une excellente note argentée, étape de plus dans son ascension. À nouveau ses compatriotes s’enflamment, la nouvelle star a grandi, peut-être est-elle prête à aller encore plus haut. Mais la pression, les attentes, Meintjes sait gérer, lui qui porte les espoirs de tout un continent depuis ses débuts.

En cette même année 2013, son modèle Chris Froome remporte son premier Tour de France. Fan de la première heure, Meintjes s’est toujours inspiré de son aîné, comme il le confiait à CyclingPro.Net en 2015 : « Quand j’ai commencé le vélo, je suivais de près Chris Froome. Il courait chez Barloworld et c’était l’un des rares professionnels de l’époque qui venaient dans les petits clubs pour parler aux coureurs, les conseiller. » Ce n’est donc pas le Froome triomphant qui a servi d’exemple au jeune Meintjes, mais ce coureur un peu gauche venu tout droit d’Afrique dont les chutes nourrissaient les best of Youtube. Néanmoins, le Sud-Africain n’a pas borné son admiration aux premières années du « Kényan Blanc » et la réussite du natif de Nairobi enrichie encore davantage sa confiance : « En voyant sa progression, je me dis que s’il a pu devenir professionnel et progresser comme il l’a fait, il ne m’est pas impossible de faire la même chose. »

Devenir une légende

Alors, décomplexé, Meintjes commence à obtenir des résultats assez brillants. Cinquième et meilleur jeune du Tour du Trentin en 2014 puis vainqueur de la Semaine internationale Coppi et Bartali l’année suivante. Toujours en 2015, il prend le départ de sa deuxième Vuelta avec en tête l’espoir de bien figurer en montagne. Monstrueux de régularité, le Sud-Africain s’offre alors son premier top 10 en grand tour. Sa progression se poursuit l’an passé, avec une neuvième place au Dauphiné en juin puis une belle huitième place sur le Tour en juillet. Sur la Grande Boucle, sa dernière semaine exceptionnelle, ponctuée d’une quatrième place marquante au Mont-Blanc, laisse alors présager encore mieux pour l’avenir. Son très bon Dauphiné il y a deux semaines et sa surprenante troisième place dans l’ultime étape, où il a lâché plusieurs cadors à la pédale, confirme qu’il faudra compter sur lui dès cette année.

Le leader de UAE Team Emirates ne cesse de progresser et le parcours, avec une portion congru de contre-la-montre, est à son avantage. Lui qui veut entrer dans l’histoire du cyclisme pourrait y poser un pied dès cette année, avec le maillot blanc et un podium en ligne de mire. L’an passé, au moment de parler de ses ambitions avec nous, Meintjes faisait part de ses rêves mués en objectifs : « Si tu veux être une légende du cyclisme et montrer que tu es le meilleur dans ton sport, tu es obligé de gagner un grand tour dans ta carrière et si possible le Tour de France. » À l’époque, Philippe Mauduit nous prônait de son côté la patience : « Le but, c’est que d’ici trois ans, il puisse jouer avec les meilleurs. » Il est vrai que le Sud-Africain a encore des lacunes mais difficile de nier que sa régularité, son sens de la course et sa faculté à bien récupérer sur trois semaines l’installent déjà dans la bataille. Avec deux ans d’avance. Meintjes n’aime pas attendre, il est né pour ce moment.

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