Il est un garçon difficile à déchiffrer. Une énorme promesse après ses deux titres mondiaux chez les jeunes, un garçon qui sait lever les bras mais le fait finalement assez peu. Dix victoires chez les professionnels, en cinq saisons, le bilan de Matej Mohoric est bon sans être incroyable. Dans le lot, quelques gros succès, comme son étape sur le Giro l’an dernier. Mais chez Bahrain-Merida, il sait qu’il peut prétendre à plus que ce rôle d’électron libre.
Le collectif avant l’individu
Connu pour sa position d’équilibriste qui en fait frémir plus d’un, Matej Mohoric est aussi un coureur attachant dans le peloton. Jovial, le natif de Kranj la joue également modeste quand il s’agit de parler de lui. Jusqu’à ne pas demander le leadership malgré son incontestable talent. « Je me souviens que lorsqu’on établissait notre tactique dans le bus, Matej était toujours le premier à vouloir aller dans l’échappée. Mais je lui disais qu’il avait besoin de s’affirmer en tant que leader », a raconté son manager Brent Copeland à Cyclingnews. Le Slovène fait partie de ces garçons qui n’aiment pas les stéréotypes, qui s’ennuient, parfois, lors de longues étapes de plaine. Lui jure surtout par l’offensive, et advienne que pourra. Les observateurs adhèrent, forcément. Mais à moins de s’appeler Peter Sagan, se lancer à corps perdue dans des raids lointains n’est pas la meilleure façon de garnir son palmarès.
Le concerné nous éclaire sur cette obstination. « Si je ne me teste pas à tous les rôles au sein d’une équipe, comment vais-je savoir ce que je dois attendre de chacun de mes coéquipiers ? Je me dois de connaître leur rôle », explique-t-il à Cyclingnews. Nouvel exemple de son humilité. Preuve de sa maturité précoce, aussi. Mohoric est passé professionnel à seulement 19 ans, chez Cannondale, avec tout de suite un statut à assumer du fait de son palmarès chez les jeunes. Alors pendant longtemps, il s’est fait assez discret. Pour apprendre. « Tout cela m’a aidé à percevoir mes coéquipiers d’une manière différente de celle d’un coureur devenu professionnel et qui a immédiatement obtenu le rôle de leader », assure le Slovène.
Découvrir et confirmer en 2019
Et l’apprentissage fut rapide, finalement. Aujourd’hui, Mohoric est conscient de ses qualités. Son palmarès, fort d’une étape remportée sur la Vuelta et d’une autre sur le Giro, ne demande qu’à s’étoffer, et le garçon est prêt. « J’ai 24 ans et 2019 sera primordial pour moi, reconnaît-il. Ce pourrait être ma première année avec un rôle important dès le début de saison. » Son staff lui a en effet concocté un calendrier sur-mesure avec un printemps très chargé. Après les Strade Bianche et Milan-Sanremo, où il sera listé parmi les outsiders, il aura rendez-vous avec les flandriennes : « Jusqu’à présent, je n’ai couru que les ardennaises, mais maintenant, je veux également courir les classiques pavées », lâche-t-il, l’âme d’un leader. Et il débutera dès cette semaine, avec le week-end d’ouverture en Belgique.
Un printemps réussit lui garantirait une place dans les huit pour le Tour de France, cet été. Ce serait une première pour le Slovène qui a montré sur le Giro et la Vuelta qu’il savait être un finisseur redoutable, à défaut de jouer le général. « Je pense qu’un jour, je pourrai être un coureur de grands tours », estime Mohoric, avec toutefois une réserve : « Mais cela ne se produira pas dans les cinq, six ou sept prochaines années. Ça prendra beaucoup de temps, d’entraînements et de kilomètres. Pour l’instant, mes forces sont ailleurs et je devrais me concentrer sur les courses d’un jour. »
Lucide, malgré tout. A 24 ans, Matej Mohoric a eu le temps de tâtonner, durant cinq saisons déjà. Désormais, il doit gagner, beaucoup. Devenir le patron d’une équipe Bahrain qui ne peut rester éternellement tournée autour de Vincenzo Nibali. Aujourd’hui, le peloton tout entier a pris conscience du potentiel du Slovène. Lui aussi. Reste à l’exploiter au mieux. Mohoric ne sera jamais Sagan, ce que certains ont pu espérer il y a quelques saisons, lorsque les deux ont couru ensemble le temps d’une saison chez Cannondale. Mais être Mohoric devrait suffire. Surtout s’il s’habitue à être un leader.
* Mise à jour : victime d’une chute à l’entraînement, Matej Mohoric souffre de nombreuses contusions au niveau du genou. Il ne pourra pas prendre part ce weekend aux premières classiques belges.
Je ne suis peut-être pas objectif car j’adore ce coureur. Au delà de ses qualités intrinsèques, il a un sens de la course bien développé, du panache et il est de plus en plus résistant, ce qui laisse augurer une capacité à remporter des classiques lors des prochaines saisons (semaines ?). Je le revois encore lors du championnat du monde espoir 2013 à Florence où il rejoint Alaph’ puis le dépose avant de s’employer dans la descente dans son style si particulier… Une masterclass ! Heureux aussi d’observer sa progression constante ces 2 dernières saisons après des débuts professionnels délicats.
“Mohoric ne sera jamais Sagan, ce que certains ont pu espérer il y a quelques saisons, lorsque les deux ont couru ensemble le temps d’une saison chez Cannondale. Mais être Mohoric devrait suffire. Surtout s’il s’habitue à être un leader.”
Tout à fait, ils n’ont pas vraiment le même profil : Mohoric a l’air meilleur grimpeur mais moins bon sprinteur que son compère slovaque. Pour les pavés, on va attendre de voir Mohoric sur les flandriennes pour pouvoir juger
Effectivement dificile à déchiffrer mais un profil de rouleur grimpeur avec un gabari et des aptitudes pouvant presenter des similitudes avec les monstres Froome/Dumoulin .
Pour l´instant, je ne miserai pas un copek sur ce garcon pour un podium sur une Flandrienne; par contre il est attendu sur d´autres grandes epreuves s´il confirme le prochain niveau de sa progression .
Un bemol cependant sur le risque evident d´un programme trop chargé qui pourrait lui cramer les ailes .