On a pris un coup de massue sur la tête. Puis un deuxième. Et enfin quelque chose d’indescriptible. Un arrêt de la course dont on ne sait pas si c’est une bonne ou une mauvaise nouvelle pour nos intérêts tricolores. La frustration, en tout cas, est grande, de ne pas avoir eu droit à la bataille attendue vers Tignes, et elle se mêle aux malheurs de Thibaut Pinot et Julian Alaphilippe.
Une catastrophe et pas de miracle
Trois heures passées la tête dans une lessiveuse. Du départ de Saint-Jean-de-Maurienne à la descente de l’Iseran, où les leaders ont appris que la course était arrêtée, l’intensité n’est jamais redescendue, accompagnée, souvent, d’une rare dramaturgie. Les larmes de Thibaut Pinot, en début d’étape, resteront comme l’image la plus déchirante de ces trois dernières semaines. On le croyait capable de remporter le Tour de France, d’assommer les Alpes comme il l’avait fait dans les Pyrénées, et on avait raison. Mais un mauvais choc sur le genou aura eu raison de ses ambitions et vient expliquer sa journée de moins bien, jeudi dans le Galibier, où il avait malgré tout fait le travail, se positionnant comme le meilleur des autres, derrière Egan Bernal. On rêvait de voir la suite, cet affrontement entre le Français et le Colombien, que l’on imaginait aisément, et naïvement peut-être, à l’avantage d’un Pinot survolté. On devra attendre, l’année prochaine peut-être, parce que le garçon, en dépit de son abandon, a montré – et compris – qu’il pouvait gagner le Tour.
Mais s’il n’y avait eu que ça, honnêtement, on s’en serait remis, on aurait relevé la tête, et on aurait terminé cette journée, à quarante-huit heures de Paris, avec un fol enthousiasme. Sauf que le col de l’Iseran, monstrueux sur le papier, a tenu ses promesses. Il a fait des dégâts et a condamné un homme, parmi les candidats au maillot jaune : Julian Alaphilippe. Un pays entier croisait les doigts pour qu’il passe sans encombre le plus haut sommet de ce Tour de France, l’esprit embrumé par ce qu’on avait vu sur les pentes du Tourmalet, mais l’exploit ne s’est pas reproduit. L’altitude a fait son effet, « Alaf » a sorti la langue à environ huit kilomètres du sommet, et c’était le signe, pour ceux qui voulaient le détrôner, qu’il était proche de sauter. Geraint Thomas a lancé la première banderille, Egan Bernal a allumé la mèche, et Ineos a plié le Tour, serait-on tenté de dire. Le Français, esseulé, avec Wout Poels pour compagnon, qui évidemment ne lui donnait pas un relais, a sauvé ce qui pouvait l’être, sans faire de miracle.
La déception et un podium, peut-être
Au sommet de l’Iseran, il basculait ainsi avec un peu plus de deux minutes de retard sur Bernal, une sur les autres favoris, sans savoir qu’il n’était pas utile de se lancer corps et âme dans la descente vers Val d’Isère. Plus bas, la grêle et la boue s’étaient en effet abattues sur la route, dans des proportions trop importantes pour que la course puis continuer. Histoire d’avoir un peu moins de regrets, on notera qu’Alaphilippe n’avait pas repris grand-chose dans le début de la descente, et qu’il aurait sûrement accusé le coup, de nouveau, dans la montée vers Tignes. Les temps arrêtés au sommet de l’Iseran, du coup, arrangent un peu le Français, et font aussi le bonheur de Bernal, nouveau maillot jaune avec une quarantaine de secondes d’avance, qui aurait pu créer de plus gros écarts, encore, en allant jusqu’au bout, mais qui saura se contenter de ça. Geraint Thomas, en revanche, avait de quoi tirer la tronche, battu par son coéquipier colombien à Valloire et de nouveau à l’Iseran, ce qui scelle sans doute le sort de ce Tour de France.
Les yeux embués, au moment de répondre à France Télévisions maillot jaune sur le dos, Egan Bernal a rappelé qu’il n’était pourtant qu’un garçon de 22 ans, terriblement ému par ce qu’il lui arrive. On en oublierait presque, avec tout ça, qu’il reste une arrivée au sommet de Val Thorens, ce samedi, où la hiérarchie sera difficile à chambouler, parce qu’Ineos protègera le maillot du Colombien et qu’ils savent faire, quand ils sont dans cette position. Mais on n’est à l’abri de rien, surtout dans ce Tour de France si fantastique. Emanuel Buchmann et Steven Kruijswijk, qui a fait illusion dans l’Iseran, pourraient se sentir pousser des ailes et, qui sait, placer une attaque. Julian Alaphilippe, lui, aura un podium à sauver. Ce n’est pas un maillot jaune, mais franchement, ça nous ferait mal au cœur que les Français terminent ces trois semaines sans rien au classement général. On est déjà tellement abattus ce soir qu’il serait bon de ne pas en remettre une couche.
Et zou, le quatrième vainqueur Ineos Sky différent en 8 ans. Heureusement qu’ils avaient Bernal et Thomas sans quoi, on aurait eu Poels ou Van Baarle en jaune. Pinot qui se loupe encore et encore alors qu’il avait la chance de sa vie, avec la forme des Pyrénées, ils aurait du gagner le tour. Une occasion dorée et c’est fini. Il va encore se passer 20 ans avant qu’une français finissent en jaune à Paris. Fin du tour pour moi, demain, c’est promenade. La fin je la connais, ça fait depuis 2012 qu’on voit la même.
Il ne se loupe pas, il sort sur blessure.
Mais je suis d’accord, il avait les jambes pour gagner ce Tour, et personnellement j’y croyais très fort depuis samedi, même si je n’osais pas le mettre dans mes pronos, superstition de fan oblige. L’heure est maintenant à la décompression et à la reconstruction. Viendra ensuite celui de la reconquête. Dès cette année pour un doublé sur le Lombardie? L’année prochaine sur le Tour? Il est encore trop tôt pour le dire. Quoi qu’il en soit, je souhaite à Thibaut de se relever de ce coup dur, qui a sans doute un goût plus amer encore que le Giro de l’an dernier. S’il en revient aussi fort que cette année, plus personne ne pourra remettre en question son mental de champion hors norme. En espérant qu’il finira par venir à bout de cette malédiction qui le poursuit et qu’il remportera cette grande victoire en GT que méritent son talent, sa classe et sa combativité.
S’il revient tant mieux, mais pour le tour je n’y crois plus. Il est trop poissard. Thomas tombe une étape sur deux et c’est Pinot qui se blesse ! Les années prochaines, il y aura Bernal encore plus fort (quelle différence avec Gaudu !) et rien ne dit que le parcours conviendra à Pinot. Et si c’est le cas, il y aura bien une bordure ou un rhume. C’est toujours sur les mêmes que ça tombe. Là, tout était aligné : une équipe Ineos pas trop forte, un parcours convenable…
S’il y a bien une chose que ce Tour complètement fou nous aura apprise, ou plutôt rappelée, c’est qu’en cyclisme rien n’est jamais certain, en bien ou en mal. Alors aujourd’hui je me garderai bien d’affirmer que Pinot gagnera le Tour ou ne le gagnera pas. Je pense qu’il en a surpris plus d’un sur cette édition, par son niveau physique mais aussi par sa détermination et sa force mentale ; beaucoup le voyaient à la rue dans la première semaine, exploser après sa bordure ou être dominé par Ineos dans les Pyrennées. Rien de tout cela ne s’est passé. C’est le propre des champions que de nous surprendre. Et Pinot en est assurément un. Alors je dis : à voir. Et d’ici là, gardons nous bien de juger.
Si c’est le cas tant mieux. Pour ma part, je n’espère plus, ça fait depuis sa dixième place en 2012 qu’on le voit gagner un grand tour. Sept ans plus tard, il a un podium… En attendant, des mecs qui se sont révélés après lui (Thomas, Aru, Dumoulin, Quintana, Carapaz, Yates…) ont gagné des tours, Giro ou Vuelta et Pinot rien. Même quand il est une jambe au dessus des autres, ça fonctionne pas.
Tellement dégouté pour Pinot. Vraiment. Le reste c’etait attendu mais Pinot dans la forme de sa vie…
Mais bon la vie continue, il va nous claquer son deuxieme Lombardi et voila..
C’est comme ca, c’est pas le premier c’est pas le dernier, Contardor en 2016, Porte en 2017 aussi étaient au top.
C’est vrai qu’avec l’abandon de Pinot, on en viendrait presque à oublier le reste… Dans l’ensemble en effet, ce qui s’est passé était assez prévisible. Alaphilippe a craqué dans l’Iseran et aurait probablement pris près de 5 minutes si l’arrivée avait été jugée à Tigne. Pour moi ce scénario était couru d’avance étant donné la force et l’expérience d’Ineos face à l’état de fatigue et l’isolement d’un Alaphilippe héroïque mais humain malgré tout, sur un parcours absolument monstrueux. Selon le déroulement de l’étape de demain, il pourrait s’accrocher au podium si les Ineos se contentent de défendre en assurant un tempo. Si en revanche Bernal cherche à assommer ses concurrents en gagnant son étape, si Thomas veut conquérir sa deuxième place ou si Kruijswijk/Buchmann se décident à attaquer de loin pour mériter leur podium, je le vois hors du podium à Paris, peut-être même hors du top 10 sans le surplus de motivation que donne le maillot jaune. Mais qu’importe : son Tour aura été exceptionnel. Au vu de l’étape d’hier, la prise de pouvoir de Bernal n’est pas non plus une surprise, même si elle s’est faite avec plus de panache et de classe qu’on aurait pu le penser.… Lire la suite »
Quel retournement ce serait en effet pour Bardet, et quelque part miraculeux au vu de son tour.
Sinon pour l’an prochain je vois bien Ineos mettre Bernal sur Giro et Vuelta (histoire de refaire une contador 2007-2008) et Froome sur le tour pour essayer d’en remporter un 5eme avec Thomas eventuellement si il s’avere meilleur.
Et puis on dit que l’equipe Ineos est plus faible, mais quelque part c’est normal, ca doit faire 3-4 ans qu’on voit les memes Kwiatko,Poels,Rowe qui sont vieillissant. et puis Avant y’avait Thomas ou Bernal en chien de garde mais quand on les met co-leader forcement y’a moins d’equipier.
Classement des TDF en terme de passions.
Tour 2018 > Tour 2011 > Tour 2014 > Tour 2006 (du grand wtf celui la) > Tour 2003
On est en 2019.
Le début de l’ère Bernal
Une météo exécrable est attendue demain… tout bénéfice pour les attaquants qui en ont !
Allez encore un peu d’espoir…
Oui ou la continuité de l’ère Sky/ineos, ça dépend comment on voit les choses.
Très déçu au final par ce tour, déjà par les malheurs de Pinot puis sincèrement ça ressemble de plus en plus à du catch : “Alaf”, le gars incapable de passer un col de 1ère à Paris-Nice avec les meilleurs voltige désormais en faisant quasiment jeu égal en montagne avec les purs grimpeurs alors qu’il n’a rien préparé . Thomas, un ancien avant-dernier du tour reconverti en flandrien puis en grimpeur d’exception. Et la pépite, Bernal, venu du pays du dopage et du sulfureux Gianni Savio, dans l’équipe la plus controversée de ces dernières années…. Avec sa tronche en biais, son sourire de travers et son regard fuyant, autant dire qu’à côté Rasmussen c’est un petit chanteur à la croix de bois. Faut pas s’étonner que le vélo devienne un sport de vieux, ça donne vraiment l’impression d’être sclérosé, factice. j’adore le vélo mais c’est bien triste, ce milieu est incapable de se renouveler, il faut être un ravi de la crèche ou ne rien connaître au cyclisme pour croire à de telles conneries. Désolé pour le coup de gueule, mais ça devient saoulant à force, c’est le 30ème tour de France que je suis et j’aimerais voir les coureurs… Lire la suite »
Si ça te saoule ne regarde pas tout simplement.
La parade parfaite celui qui est en désaccord avec toi est un ravi de la crèche ou un ignare en cyclisme
Heureusement que tu es là pour nous éclairer de ton analyse perspicace
Comment peut-on avoir encore ce genre de commentaire aujourd’hui ? Je ne reviendrai pas concernant la partie sur Alaphilippe, l’ayant déjà expliqué sur un autre article, mais cela prouve déjà la méconnaissance du coureur, ou en tout cas le fait de n’avoir jamais regardé son palmarès et ses podiums depuis ses débuts en pro. Deuxièmement pour Thomas, c’est quand même fou de prendre en considération son avant dernière place de 2007 alors qu’il n’avait que … 21 ans ! Surtout qu’à l’époque il était, en effet, considéré comme un futur grand rouleur/flandrien et que le parcours était tout de même très difficile. Pour le reste je suis globalement d’accord, même s’il ne faut pas oublier qu’il n’est pas le premier (loin de là) coureur de piste à devenir un excellent rouleur sur route, voire même un très bon grimpeur. Thomas est avant tout, et depuis tout petit, un athlète hors norme, qui excelle sur un vélo. Par ailleurs, il n’a jamais vraiment sur-dominé sur des étapes de montagne, contrairement à des vrais grimpeurs comme Contador, Schleck, Quintana, Pinot ou maintenant Bernal. Quant au passage sur Bernal je préfère laisser de côté, encore une fois c’est oublié que ce sportif a… Lire la suite »
Sur un ton un peu cynique et fataliste, je dirai qu’ASO peut neutraliser la course jusqu’à Paris. Le maillot jaune semble acquis.
Sur un ton un peu doux rêveur et néanmoins amer, je dirai que demain, quelqu’un va faire une Froome sur le Giro 2018. Ça ne veut pas dire que le jaune change d’équipe.
La course sera raccourcie demain. Plus que 59km. S’il y en a un qui veut tenter le chrono de côte…
Super… si Ineos avait attendu la dernière côte pour attaquer, aujourd’hui, Alaphilippe aurait gagner le tour.
Dommage que ce formidable tour de France finisse en eau de boudin. Que prédire pour aujourd’hui ? Sur 60km et une seule montée, il est probable que plus rien ne change. Bernal peut-il avoir un coup de moins bien? Je continue de penser que le coureur à suivre est Thomas qui doit avoir bien du mal à admettre qu’il est battu. Espérer que les efforts effectués par le colombien ces 2 derniers jours l’ont un peu entamé, que Thomas attaque pour « officiellement » prendre la deuxième place à Alaphillipe, et contrer au bluff… Ils sont 3 à être intéressés par ce scénario. Peu plausible il faut l’avouer. Mais Schlek, Contador, Froome et plusieurs coureurs plus anciens l’aurait tenté dans une telle situation.
La victoire incroyable d’hinault a liege-bastogne-liege en 1980 ne serait plus possible aujourd’hui. La course aurait été interrompue pour la sécurité des coureurs. Faut il le regretter? Pas sûr. Mais dans quelques années, continuera t-on à accepter les sprints à 70km/h ou la vie des coureurs ne tient qu’à un fil? (La chute de Jalabert en 94 à armentieres me reste toujours en mémoire). Transformera t-on les descentes de col en étape de liaison pour réduire les risques quand on aura vécu un autre drame? (Casartelli en 95) N’obligera t-on pas les coureurs à porter une combinaison pour éviter qu’ils se transforment en steak saignant à chaque chute? La portée médiatique du tour de France a beaucoup d’avantages mais aussi des effets indirects qu’il n’est plus possible de contrôler.
Même dans les 80s, je ne pense pas que les organisateurs auraient laissé passer les coureurs. Les images sont éloquentes.
Si Bernal gagne l’étape du jour, il pourrait arriver à Paris avec 3 maillots distinctifs sur 4.
Un cauchemar : oui pour Thibaut Pinot. Forcément triste pour lui mais, si ça lui paraîtra une maigre consolation, il a rendu ce Tour plus grand ET surtout remporté 1 étape. Pas de miracle : si un peu quand même. Que Julian perde le maillot, sur le moment, dans les minutes qui suivent, la déception existe mais lui le premier s’est vite remis de ça en refaisant le con avec son équipier quelques heures plus tard. Julian Alaphilippe c’est le numéro 1 mondial, 2 victoires d’étapes (dont 1 sur un contre-la-montre), 14 jours en jaune. Pour un gars qui court depuis Février en faisant aussi les classiques, il y a pire comme déception :D Bernal est au niveau qu’on pouvait supposer. Seul petit bémol à craindre, qu’on se retrouve avec 2 Inéos sur le podium. Enfin bon, maintenant que Thibaut est parti et qu’Alaf a laissé beaucoup d’énergie, on va se retrouver avec que des mecs qui courent en défense. En soit je peux comprendre l’aspect défensif sur certaines étapes, sauf qu’à part les français et les colombiens, j’ai pas vraiment vu d’autres coureurs tenter des choses sur ce Tour (pour le général j’entends). J’oublierais pas Julian Alaphilippe. Par contre,… Lire la suite »
Je vien de voir que pinot sera sur le TdF 2020, je reposte donc un commentaire que j’ai fait il y a 2 semaines: “J’ai été comme tout le monde bluffé par le début de tour de Thibaut, mais je ne me faisais guère d’illusion sur son destin dans ce tour, i seras le même que sur les giro 2017 2018 et les tdf 2015-2016, maladie-descente-bordure, pinot est un leader trop facile à faire tomber, trop de points faible a exploiter pour les armada sky ou astana. Qu’il se concentre sur les courses d’un jour et sur les étapes de montagne et les courses d’une semaine montagneuses, c’est ce qu’il peut faire de mieux. Si pinot veut faire le TDF, ce que nous souhaitons tous, il doit l’aborder comme Virenque post-98. C’est comme ça qu’il pourra être le plus efficace et donner le plus de plaisir au public et laisser le CG a ceux qui ont le mental pour.” Pinot qu’il laisse vraiment tomber les CG sur les GT… il va avoir 30 ans, un seul podium, 80% de taux d’abandon, il faut pas sortir de saint-cyr pour comprendre qu’il n’a pas l’etoffe d’hinault ou même d’alaphilippe franchement, c’est tellment… Lire la suite »
Beaucoup de tristesse, de déception, d’incompréhension, de dépit et d’amertume n’interdisent pas l’admiration que l’on peut apporter à Pinot et Alaphilippe pour le bonheur qu’ils nous ont apporté et… le respect pour Bernal !
Gueule de bois..
Rien à ajouter
Quand on voit l’état dans lequel se sont mis Pinot et Alaphilippe pour entretenir leurs rêves jusqu’au bout, “se mettre minable” prend ici tout son sens.
Malgré la désillusion, ils se souviendront comme nous de ce Tour de France digne d’une tragédie.
Bravo et merci à eux !