Il était un pari d’Emmanuel Hubert, il y a douze mois. André Greipel dans une équipe française, le transfert interrogeait. Il était une petite attraction. On attendait de voir l’Allemand à l’œuvre, même si les années promettaient de ne pas jouer pour lui. Finalement, au bout d’une maigre saison, le bonhomme s’en va déjà, sans avoir marqué les esprits par ses résultats.
Succès unique
Les chiffres étaient sévères. Malgré le recrutement de Warren Barguil, en 2018, la formation bretonne n’avait ramené que deux bouquets. Il fallait changer quelque chose. Alors Emmanuel Hubert est allé chercher André Greipel. L’Allemand avait déjà 36 ans et plus tout à fait ses jambes du début de la décennie, mais il avait gagné huit fois dans la saison, ça ne pouvait qu’aider une équipe en mal de victoires. Dans un cyclisme français qui a du mal à attirer des gros noms étrangers, depuis 20 ans, l’affaire suscitait pas mal d’intérêt. C’était risqué, osé, mais alléchant. Hubert se félicitait d’avoir su attirer un cador, le cador s’enthousiasmait de son point de chute, après dix saisons passées chez Lotto. « L’âge, c’est juste un chiffre… », désamorçait André Greipel, comme pour rassurer les sceptiques. Il était habitué à gagner et ça n’allait pas changer parce qu’il portait désormais un nouveau maillot.
Sauf que si. L’Allemand, l’homme qui compte le plus de victoires dans le peloton actuel (156, dix de plus que Mark Cavendish), n’a pas beaucoup amélioré son score cette saison. Il n’a décroché qu’un seul bouquet, en fait, lors de sa première semaine de course, au Gabon. « Et encore, je ne la considère même pas comme une victoire », disait-il cet été à Ouest-France. Ses adversaires sur la Tropicale Amissa Bongo étaient loin, en effet, de la concurrence qu’il a eu l’habitude de vaincre ces dernières années : Lorrenzo Manzin, Niccolo Bonifazio, Matteo Pelucchi, Youcef Reguigui, sans leur faire offense, n’ont pas été habitués à s’offrir le scalpe de Greipel. Surtout, l’Allemand a attendu le sixième sprint pour finalement conclure. Avant ça, il tournait autour et on se disait, déjà, que c’était de mauvais augure pour la suite. Ça n’a pas loupé. Les mois suivants ont été un long calvaire, ponctué d’un seul petit podium, sur le GP Stad Zottegem, au mois d’août.
De nouveau associé à Cavendish ?
Alors le « Gorille » a des circonstances atténuantes, comme cette bactérie qui l’a suivi pendant plusieurs mois, au début de saison, ne lui permettant de retrouver sa plénitude que quelques semaines avant le Tour de France. Mais ça n’explique pas tout, et le mois de juillet, justement, a été une grosse déception. En dehors de sa sixième place sur les Champs-Elysées, André Greipel n’a pas fait mieux que douzième, à Nancy et Chalon-sur-Saône. Arkéa espérait mieux, forcément, et comme il y avait peu de chances que la courbe s’inverse à mesure que le sprinteur approche de la quarantaine, tout le monde a préféré mettre fin à la collaboration à l’automne. L’Allemand a demandé à rompre son contrat et Emmanuel Hubert n’a pas dit non. C’est un salaire important qui sort des comptes, permettant en partie le recrutement de Nacer Bouhanni pour le remplacer. Surtout, les dirigeants bretons ont eu l’intelligence de ne pas persister dans une voie bouchée.
André Greipel, lui, assure que la fin de cette histoire ne signifie pas la fin de sa carrière. Ce ne serait pas le premier rebondissement, parce qu’on se rappelle qu’à la fin de l’été, Emmanuel Hubert assurait que le bonhomme serait toujours là en janvier 2020. Mais les premières rumeurs font état de plusieurs pistes pour le vétéran de Rostock. Corendon-Circus, la formation de Mathieu Van der Poel, pourrait l’accueillir, tout comme Dimension Data, où il retrouverait notamment Mark Cavendish, son ancien grand rival chez HTC-Columbia. Mais le flou domine, pour l’instant, et Greipel a expliqué qu’il ne donnerait des nouvelles que début novembre, après avoir profité de sa famille et mis de côté le vélo pendant quelques semaines. Quinze ans après ses débuts chez les professionnels, il n’est pas encore question pour le garçon d’arrêter. Les succès, eux, devraient continuer de se faire rares. Ou alors Arkéa-Samsic se dira qu’ils ont vraiment tout raté avec André Greipel.
J’écrivais ceci en réponse à votre article du 11 août 2018 consacré au recrutement annoncé d’Arkéa Samsic :
“Les coureurs recrutés sont certes des références, mais ils ont été plus qu’ils ne seront, et leur niveau en 2019 n’est pas annoncé au top mondial. J’espère que les salaires promis tiennent compte de cette réalité pour enrichir encore les effectifs, qui restent modestes à ce stade.”
Je ne retire rien de ces mots.
Mais j’ajoute une chose : je pourrais réécrire les mêmes à propos de Nacer Bouhanni, digne remplaçant de Greipel…
D’accord pour votre commentaire sur Greipel, comme je suis complètement d’accord, également, avec @henri. Il y avait vraiment quelque chose de mercantile et de pathétique dans ce transfert qui annonçait une bien triste fin de carrière pour ce grand champion… Mais je vous trouve bien cruel et pessimiste concernant Nacer Bouhanni. Il peut y avoir de nombreuses raisons de décrier ce coureur mais on ne peut lui retirer ses qualités intrinsèques de pur sprinteur et espérer qu’il parvienne à les exprimer à nouveau au plus haut niveau car, quoi qu’on en dise, il est sans doute le meilleur sprinteur français actuel avec Démare… Les seuls, en tous cas, à pouvoir rivaliser avec les sprinteurs étrangers du WT… Même si la concurrence est de plus en plus relevée et nombreuse !
“il est sans doute le meilleur sprinteur français actuel avec Démare”
A son prime, Démare l’a régulièrement aligné lorsqu’ils s’affrontaient dans un sprint massif. Actuellement (disons cette saison) il se fait bouffer tout cru par Sarreau et Coquard. Donc dire que Bouhanni vaut Démare, sic. Dire que c’est le meilleur sprinteur français actuellement, triple sic.
Bouhanni 2019 est moins fort que Greipel 2018. Quand Arkéa le recrute Greipel sort d’une saison à 8 victoires dont 6 HC et 2 WT. Bouhanni ne l’a fait qu’une seule fois, c’était en 2014.
Quant au WT, pour un Démare en forme ça paraît bien compliqué de faire son trou face à la nouvelle génération dans un sprint massif. Alors Bouhanni, pour un Groenewegen, un Gaviria ou un Ewan, il est inoffensif.
Ce qui paraît en revanche moins rédhibitoire c’est l’âge. L’un a été recruté à 30 ans, l’autre à 37 ans. Mais ce qui fait que son commentaire initial n’est plus d’actualité c’est la venue de Quintana, dont la saison 2019 aura été très sous-estimée.
Franchement qui a cru un instant que Greipel pourrai faire quoi que ce soit de bien chez Arkea? A mon sens, Arkea a embauché Greipel essentiellement pour avoir un nom prestigieux à mettre en avant en vue des invitations pour le tour, mais sans se faire des illusions sur ses résultats
Je ne me faisais guère d’illusions sur ce transfert mais je voyais quand même Greipel remporter qques bouquets sur les courses francaises comme besseges les 4 jours de Dunkerque ou les manches de Coupe de France. Ce zéro pointé me sidère. Doit on tout mettre au compte du virus ?
Mais c’est aussi à comparer avec le crash des Kettel,Cavendish et Bouhanni cette année.
Les vidéos d’Arkea pendant le Tour de France laissaient voir que l’équipe n’arrivait pas à placer Greipel lors des sprints. Equipe pas taillée pour le sprint+sprinteur en perte de vitesse, le manque de résultats n’a rien d’étonnant. Aucun transfert de “grand nom” dans une equipe continentale n’a été un succès jusque là, on verra pour Quintana…
NB: S’il va chez Dimension Data Greipel ne retrouvera pas Cavendish qui quitte cette équipe pour 2020.
Tout à fait d’accord sur la faiblesse d”Arkea face aux grosses écuries. On a vu Barguil totalement esseulé s’incliner devant Lutsenko et ses Astana dans l”Artic Race. Les Lotto emmenaient et deposaient Greipel les doigts dans le nez.Cette année c’était sauve qui peut…
Quand on est une petite équipe, embaucher un sprinteur c’est vraiment une mauvaise idée, parce qu’un sprinteur n’est rien sans équipe pour l’emmener. Et les coureurs capables de frotter et de rouler fort pour contrôler l’échappée et lancer le sprint ça ne court pas les rues (surtout en France !). Par contre un grimpeur n’a besoin que d’un ou deux coéquipiers pour le soutenir en montagne jusqu’au pied du dernier col. Une grande équipe est peut-être nécessaire pour gagner un grand Tour, mais certainement pas pour faire un top 10 au général ou gagner des étapes (deux choses qui seraient d’excellent résultats pour Arkea). J’ajouterai que Quintana arrive avec des top 10 et des étapes sur le Tour et la Vuelta, c’est beaucoup plus que Greipel en 2018 !
Greipel en 2018 c’est 8 victoires, plutôt sur des courses relevées. Il était déclinant mais pas H.S.
Greipel pourrait continuer 1 saison en tant que baroudeur. A 38 ans, il ne fera rien en sprint même dans des courses de 3ème catégorie. Cette année, il aurait déjà dû se recycler en se lançant dans des échappées.
Lui et Cavendish doivent arrêter les frais. Ils ne sont plus au niveau et comme leurs registres sont limités, ils ne peuvent plus faire de résultats. Ca me paraît compliqué de les voir remonter la pente. En cyclisme, le déclin physique est irrémédiable. Ne reviennent que les champions touchés par la malchance. Mais là, Greipel n’a pas manqué de chance. Il a manqué de niveau. Et ce n’est pas à 38 ans, qu’il va pouvoir inverser la tendance tandis que d’autres, biologiquement en phase ascendante voient leurs corps se fortifier.
Les rebonds après un long déclin sont rares. Et quand ils existent, ils sont souvent éphémères (1 course, 1 mois, 1 saison tout au plus). Je ne vois aucun exemple passé qui puisse m’amener à penser que c’est dans le domaine du possible