Il devait être le lauréat de notre dernière récompense, la plus importante, celle qui couronne le meilleur coureur de la saison. Mais l’annonce de son contrôle anormal, cette semaine, a tout chamboulé, et nous avons pris la décision de ne pas décerner cette récompense.

Le spectre nouveau du dopage

Dans les votes, il n’y avait pas eu débat. Notre rédaction avait élu Chris Froome coureur de l’année, quasiment à l’unanimité, devant Greg Van Avermaet et Tom Dumoulin. Mais il y a eu débat ensuite, lorsque mercredi matin, le contrôle anormal du Britannique sur la dernière Vuelta a été révélé. Que devait-on faire ? Ne rien changer, et décerner la récompense comme si de rien n’était ? Cela revenait à ignorer l’actualité et une information qui a chamboulé le monde du vélo cette semaine. L’offrir, sur un plateau, à GVA, que nous avions placé en deuxième position ? Cela voulait dire faire fi de la présomption d’innocence, et déjà considérer Froome comme coupable, dopé et tricheur. Alors finalement, une autre option s’est imposée, dans notre esprit, comme la meilleure : ne pas désigner de coureur de l’année pour cette saison.

Bien sûr, on n’oubliera pas l’année 2017 de Froome. Celle où, sportivement d’abord, pour la première fois, il a remporté une autre épreuve de trois semaines que le Tour de France, réalisant un doublé historique, qui lui a même ouvert l’appétit pour plus encore, lui donnant envie d’aller redécouvrir ce Giro qui ne lui a pas laissé que des bons souvenirs. Mais malheureusement, et quel que soit le dénouement de cette « affaire du salbutamol », on retiendra surtout l’extra-sportif et ce contrôle anormal intervenu sur une Vuelta qui, d’ici quelques semaines, pourrait d’ailleurs lui être retirée. Un premier vrai scandale dans la carrière du Britannique, passé par beaucoup de galères jusqu’ici mais jamais plongé à tel point dans le dopage.

Le paradoxe Froome

Il y aurait pourtant eu tant à raconter sur la saison de Froomey. A 32 ans, il n’est jamais passé aussi prêt d’être détrôné sur le Tour, et pourtant, il a réussi quelques semaines plus tard à aller conquérir une Vuelta qui s’était toujours refusée à lui jusqu’ici. Il a ainsi montré qu’il pouvait gagner différemment, moins dominateur, plus humain, sans doute. Pour la première fois, il a d’ailleurs remporté le Tour sans avoir levé les bras une seule fois. Sa première victoire de la saison est même intervenue, justement, lorsqu’il a ramené le maillot jaune sur les Champs-Elysées. Ce nouveau visage l’aurait presque rendu populaire.

Depuis deux ans, Chris Froome avait en effet clairement fait remonter sa côte d’amour auprès du public, quasiment à zéro entre 2013 et 2015. Mais paradoxalement, c’est au moment où il était le plus apprécié, et peut-être le moins fort, qu’il se retrouve empêtré dans une affaire qui risque bien de ruiner tous ses efforts passés. De notre côté, plongés dans le doute, on ne sait trop quoi penser de sa saison. C’est pourquoi nous avons décidé de n’élire aucun coureur de l’année. Parce que sur ce qu’on a vu en 2017, un seul homme méritait cette distinction, mais qu’un contrôle potentiellement positif nous oblige forcément à revoir notre jugement.

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