En posant un œil sur la saison 2019, on peut certifier qu’elle aura été marquée par un bel élan de jeunesse. Entre le Tour de Bernal, les exploits de Pogacar sur la Vuelta, les confirmations de Gaudu ou encore l’ascension de Sivakov, nous n’avons eu aucun mal à établir une liste de nommés pour élire le jeune de l’année. Mais pour sa première année professionnelle, c’est Remco Evenepoel, le plus bluffant de tous, qui remporte la palme. A 19 ans, les superlatifs n’ont pas manqué pour qualifier le phénomène.
Un rookie sans complexe
Promis à un avenir radieux avant même d’avoir disputé une course professionnelle, Remco Evenepoel aurait eu de quoi craquer sous une pression médiatique parfois irrationnelle. En même temps, c’est un peu de sa faute. L’ancien footballeur a totalement écrasé les championnats européens et mondiaux chez les juniors en 2018, que ce soit sur le contre-la-montre ou sur la course en ligne. Il n’en fallait pas moins pour parler de phénomène ou de prodige, qualificatifs qui ne cesseront d’être utilisés tout au long de la saison. Si ses débuts à San Juan furent prometteurs et qu’il entama en Amérique du Sud sa collection de maillots blancs, c’est en mai, sur le Tour de Belgique, qu’il a obtenu cette tant attendue première victoire. A sa manière, en solitaire, là où habituellement les coureurs se font avaler par le peloton. On comprend, suite à sa confirmation contre-la-montre le lendemain et sa victoire au général, que le Belge n’est pas un coureur comme les autres.
La Clasica San Sebastian, première grande épreuve d’un jour pour le benjamin du World Tour, viendra comme une première confirmation. Un final époustouflant lui permet, après avoir anticipé les débats avec Tom Skujins, de lâcher le Letton dans la montée de Murgil Tontorra, puis de tenir tête aux cadors. Alors qu’il devait épauler Julian Alaphilippe, finalement trop brûlé par son Tour de France, Evenepoel frappe un grand coup. Ses performances de fin de saison contre-la-montre, où l’or européen et l’argent mondial viennent garnir son palmarès, montrent que l’effort solitaire est son pêché mignon. C’est ce qui le pousse à se dépasser sur le vélo, là où ses qualités physiques hors normes peuvent faire la différence. Et chrono ou pas, c’est seul sur la route qu’il impressione le plus.
Où sont ses limites ?
Evenepoel, 20 ans en janvier prochain, a commencé le vélo sur le tard. Il n’a donc pas encore pleinement exploité son potentiel, et l’on se dit que le jour où il saura aisément frotter, les victoires pourraient rapidement s’enchaîner. Surtout s’il reste dans la meilleure écurie du peloton. Surnommé le « petit cannibale », on le compare déjà au grand Eddy Merckx. Car comme souvent, dès qu’un coureur marche fort, on veut en faire un égal de ses aînés. Les Français connaissent bien le problème avec Bernard Hinault et ses multiples successeurs éphémères. Pourtant, Evenepoel semble fait d’un autre bois, différent des pépites colombiennes qui fleurissent chaque année mais stagnent avant leurs 25 ans. Il tempère tout de même, en annonçant à L’Avenir que le plus dur lui reste à faire. « Je sais bien que la deuxième année est généralement plus compliquée que la première, parce que c’est celle de la confirmation. Mais je l’aborde avec énormément d’enthousiasme. » Avec en tête les chronos des JO et des Mondiaux, où il visera les médailles d’or.
Cycliste belge de l’année 2019, il affirme à la RTBF que Liège le fait rêver, contrairement aux pavés de Roubaix qu’il a en horreur. L’année de la confirmation, comme l’a souligné Patrick Lefévère, impressionné par tant de talent, va donc nous permettre de cerner un peu plus précisément la hauteur du potentiel, notamment en haute montagne et sur les courses par étapes. « On verra comment il réagira à son nouveau statut, tempère le dirigeant de Deceuninck-Quick Step. Avec ce qu’il a réussi cette année, tous les autres coureurs le tiendront à l’œil dès qu’il sera au départ d’une course. » Il pourrait découvrir le Giro en mai et on s’imagine déjà les foules s’emballer s’il parvenait à se couvrir de rose les premiers jours de course, ce qui relancerait les comparaisons avec Merckx. En attendant, laissons lui le temps de grandir encore, le plus tranquillement possible, et de devenir Remco Evenepoel. Cela devrait amplement suffire à l’intéressé.
Quels sont vos critères pour qu’un coureurs soit considéré comme “jeune” ?
J’imagine que c’est au sens de moins de 25 ans, comme pour le maillot blanc du Tour.
On l’a précisé dans la petite intro de l’article, c’est être au maximum dans l’année de ses 23 ans. Mais on a fait une exception cette année en excluant Egan Bernal de cette catégorie.