Après un weekend entre la Drôme et l’Ardèche plutôt réussi, avec notamment un podium dimanche à Livron-sur-Drôme, Warren Barguil a pris le temps de répondre à la Chronique du Vélo. Lui devenu le temps d’un été le chouchou du public français, en 2017, porte encore le maillot de champion de France pour quelques mois. Nairo Quintana, arrivé cet hiver, sa prolongation chez Arkéa-Samsic, le Tour de France à venir, mais aussi les Jeux Olympiques ou les Mondiaux, il n’a éludé aucun sujet.

Bonjour Warren. Vous avez repris la compétition à l’occasion du Tour de la Provence. Comment vous sentez-vous dans votre préparation ?

Au Tour de la Provence, je me suis mis au service de l’équipe et notamment de Nairo Quintana dans l’étape du Ventoux, car il avait déjà couru en Colombie, et sa condition lui permettait de briller sur cette épreuve. On l’a bien vu, du reste. Je suis pour ma part dans une condition normale en ce début de saison, j’ai bien bossé cet hiver, et j’en ressens assez vite les effets avec cette quatrième place obtenue sur la Faun Ardèche Classic. Après, je sais que je ne serai jamais un coureur de début de saison. Je n’ai pas fait de stage en altitude pour avoir mon pic de forme très tôt, je préfère que ça vienne avec les courses et être proche de ma famille.

Avez-vous changé quelque chose dans votre préparation cet hiver ?

Pas grand chose non, je suis allé un mois à Calpe avec ma femme et notre bébé. J’ai pu rouler au soleil mais ce n’est pas pour autant que j’ai fait beaucoup plus que d’habitude. Je sais que chaque année, je commence un peu plus doucement que les autres par rapport au Tour de France, et je laisse le temps faire.

« (Les ardennaises), c’est tout à bloc, concentration maximum du début à la fin, surtout sur l’Amstel avec énormément de changements de directions. J’adore cette course. »

– Warren Barguil

L’arrivée de Nairo Quintana a-t-elle changé quelque chose dans votre préparation ?

Non, pas du tout, je suis resté sur la même préparation car je sais que je marche mieux de juin jusqu’à la fin de saison. J’ai essayé autrement par le passé et ça n’a pas fonctionné, donc je prends mon temps. Après, Nairo a montré à l’entraînement qu’il roulait fort dans les cols, ça a fait progresser tout le monde. Je n’ai jamais roulé aussi vite au mois de décembre dans certains cols.

Vous avez prévu Milan-Sanremo dans votre programme, pour quelle raison (nous avons réalisé l’entretien avant d’avoir connaissance des menaces qui planaient sur l’organisation de la course, ndlr) ?

J’ai toujours aimé les classiques et les Monuments de mon sport. Milan-Sanremo en fait partie. C’est une course longue, usante, avec des capi sur la fin qui viennent pimenter son final. J’ai toujours aimé les classiques et celle-ci me plait aussi. J’avais envie de la découvrir, voir ce que je peux faire sur une telle course. Il faut parfois casser la routine des programmes d’une saison sur l’autre, là c’était l’occasion.

D’autres classiques sont au centre de vos préoccupations, comme les ardennaises. Pourquoi ce genre de courses vous plaisent-elles ?

J’aime les classiques car elles ont une histoire, ce sont des épreuves qui comme les grands tours ont marqué l’histoire de notre sport. C’est aussi des épreuves d’un jour et j’ai toujours aimé ce genre de courses, tout peut se passer dans un sens comme dans l’autre. On n’est pas forcément dans la gestion comme cela peut-être le cas sur une course par étapes. C’est tout à bloc, concentration maximum du début à la fin, surtout sur l’Amstel avec énormément de changements de directions. J’adore cette course.

Vous avez récemment expliqué que cet hiver, un retour chez Sunweb aurait pu être possible. Les contacts étaient avancés ?

Ceci appartient au passé. Aujourd’hui, je suis avec Arkea-Samsic pour trois saisons supplémentaires.

Qu’est-ce qui vous a poussé à prolonger chez Arkéa-Samsic ?

« Les automatismes avec Nairo Quintana viennent très vite, au-delà des mots. »

– Warren Barguil

Je connais cette équipe, elle a en quelque sorte grandi avec moi ces dernières années. J’y ai trouvé mes marques, mes repères, et je voulais continuer mon histoire avec Arkéa-Samsic. Emmanuel Hubert, le manager général, m’a dit que Nairo venait dans l’équipe. J’étais content car Nairo, c’est plusieurs victoires sur les grands tours.

La venue de Nairo Quintana a pesé dans votre décision de prolonger ? Vous en étiez informé dès le début des négociations ?

Oui, Emmanuel Hubert m’a tenu informé des négociations qu’il menait avec Nairo dès le début. Moi, je lui ai dit que j’étais d’accord à 100% pour qu’il signe au sein de l’équipe, même si je ne suis pas le décideur. C’est Emmanuel Hubert le décideur. Mais que l’équipe puisse grandir comme cela, j’étais super content car je pense que nous sommes très complémentaires, Nairo et moi. C’est un grand coureur qui a déjà gagné deux grands tours, et ils ne sont pas nombreux dans ce cas au sein du peloton. Pour ce qui est de la langue, nous arrivons à échanger. Il essaye de parler français, et moi j’ai envie de me mettre à l’espagnol. Je parle déjà anglais et je pense que c’est bien de parler plusieurs langues étrangères. On se comprend très vite en course, les automatismes viennent très vite, au-delà des mots.

Vous serez aligné avec Quintana lors de Paris-Nice et du Tour de Catalogne. Vu sa forme, vous sentez-vous bridé ?

Pas du tout, je sais travailler pour les autres coureurs sans me sentir bridé. Je l’ai fait par le passé pour John (Degenkolb) par exemple. Je pense même que le fait d’être deux « têtes de proue » au sens de l’équipe Arkea-Samsic, ne bridera ni Nairo, ni moi. Au contraire, cela va nous ouvrir des opportunités à l’un et à l’autre.

Quand on pense à votre saison, on se projette forcément sur le Tour de France. Le parcours semble destiné aux grimpeurs, ça vous fait quoi ?

Oui, le Tour 2020 est dessiné pour les grimpeurs, et forcément comme pour tous coureurs ayant ces qualités physiques, il m’inspire. J’aime bien la nouveauté du col de la Loze, mais aussi la Planche des Belles Filles, lieu qui me rappelle toujours un bon moment. La déception, c’est bien évidemment que ma chère Bretagne ne soit pas visitée cette année encore mais quand on y passe, on est souvent gâtés avec deux ou trois étapes.

Pas de contre-la-montre sur le Dauphiné et un seul sur le Tour de France, avec la Planche des Belles filles, regrettez-vous la disparition, ou du moins la diminution de ce genre d’étapes ?

Oui et non car je pense qu’il faut être complet, mais pas forcément rouleur. Je préfère une étape de pavés qu’un chrono par exemple. Après, chacun son truc.

Chez Arkéa, vous aurez donc deux cartes pour le général. Comment s’établira la hiérarchie ?

Elle se fera naturellement, à la pédale. Être deux est un atout, pas un inconvénient, tant pour le classement général que pour la chasse aux victoires d’étapes.

« Les Mondiaux et les Jeux Olympiques offrent des chances aux grimpeurs, donc cela m’interpelle forcément. Ce que me dit Thomas Voeckler, c’est que je fais partie des coureurs qui ont la possibilité de disputer ces deux épreuves. »

– Warren Barguil

Le parcours des JO et des Mondiaux sont aussi favorables aux grimpeurs cette année. Vous y pensez ?

Oui, bien sûr. Les deux courses offrent des chances aux grimpeurs, donc cela m’interpelle forcément. J’ai déjà couru les JO, je sais ce que c’est. C’est une belle épreuve qui réunit tous les sportifs de la planète. Le championnat du Monde aussi est une course qui m’a toujours fait rêver. Je n’échange pas toutes les cinq minutes avec Thomas Voeckler à propos des JO et des Mondiaux, je le laisse faire son travail. Mais ce qu’il me dit, c’est que je fais partie des coureurs qui ont la possibilité de disputer ces deux épreuves. Rio, c’était énorme, les Jeux sont énormes. Tout est démultiplié, mais nous cyclistes, on sait un peu ce que c’est, car chaque année nous disputons le Tour de France, qui a la portée que peuvent avoir les Jeux sur les sports olympiques une fois tous les quatre ans. Il n’empêche que porter les couleurs de son pays aux JO reste toujours un moment gravé à vie.

Que serait pour vous une bonne saison 2020 ?

Gagner des courses, et des belles. Et surtout, surtout continuer à me faire plaisir sur mon vélo, tout passe par là.

Pour finir, l’actualité cycliste tourne beaucoup autour de l’épidémie de coronavirus. Est-ce que vous en parlez beaucoup dans le peloton ?

Non, on n’en parle pas plus que cela, les médias s’en chargent bien assez. Non, vous savez on est professionnels, on fait déjà attention en temps ordinaire, en ayant tous un gel pour nous nettoyer les mains, ce qui est la préconisation faite par rapport à cette épidémie. Nous n’avons pas changé notre façon de vivre au sein de l’équipe.

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