Quelques minutes derrière cinq hommes qu’il n’a jamais vraiment pu concurrencer, Pello Bilbao a pris, grâce à une dernière semaine pleine de rebondissements, la sixième place du Giro. L’Espagnol est tout simplement sur son nuage depuis son tour régional au Pays-Basque. Preuve d’une forme épatante, il s’apprête à enchaîner avec le Critérium du Dauphiné avant une coupure bien méritée.

Rescapé du naufrage Euskaltel

Avec Bilbao comme premier nom de famille, il n’est pas difficile de deviner que le garçon vient du Pays-Basque, cette terre de vélo si fertile où il a gravi les échelons jusqu’au professionnalisme. Champion régional chez les espoirs en 2010, le natif de Guernica demeurait extrêmement rigoureux sur les classiques du coin d’un calendrier qui s’apparente à la coupe basque amateur, le Torneo Euskaldun. Un lieu de passage incontournable où Joaquim Rodriguez et Alberto Contador avaient notamment eu l’occasion de s’illustrer. Régulièrement placé, Bilbao remporte six manches entre 2009 et 2010, battant Omar Fraile, Ruben Fernandez ou les frères Izagirre et Herrada. Un réel talent qui convainc naturellement l’équipe Euskaltel-Euskadi, encore existante, de lui offrir un premier contrat pro en 2011, après trois mois express passés chez Orbea.

Mais pour ses débuts, celui qui a alors 21 ans peine à confirmer dans l’élite. Unique résultat à se mettre sous la dent pour sa première saison professionnelle, une seconde place au Tour de Vendée, quand certains de ses coéquipiers, passés pros la même année ou une saison plus tôt, se font remarquer : Jonathan Castroviejo remportait le prologue du Tour de Romandie tandis que Mikel Landa faisait forte impression sur le Tour de Burgos. Très proche du cadet de la fratrie Izagirre, Ion, Bilbao n’obtient finalement aucun résultat probant jusqu’à l’arrêt de la structure d’Igor Gonzalez de Galdeano, fin 2013.

Alors que ses d’autres rebondissent chez Movistar ou ailleurs en World Tour, Bilbao doit se contenter d’un contrat de trois ans chez Caja Rural. Pourtant, le jeune homme ne le vit absolument pas comme une relégation. Quand on l’interroge sur ses années passées, il assure que ces saisons en Continental Pro lui ont donné une superbe formation au métier de baroudeur, d’attaquant, mettant fin à sa relative timidité en compétition. Sur des épreuves plus débridées, il y a même ouvert son compteur de victoires s’adjugeant la Klasika Primavera d’Amorebieta en 2014, avant de disputer son premier Tour d’Espagne.

Un homme de courses par étapes qui s’affirme

Mais à l’inverse d’un Omar Fraile, né lui aussi en 1990 et archétype du classicman ultra-offensif, Bilbao regarde ailleurs, vers les courses par étapes. Lors d’une de ses rares excursions outre-Atlantique, il remporte le Tour de Beauce, ce qui contribue à le propulser comme co-leader de son équipe sur d’autres épreuves. Entre temps, sa résistance s’affirme sur trois semaines et il passe tout près d’un beau succès sur les routes de la Vuelta, seulement battu au sprint par Jasper Stuyven à Murcie en 2015. Fin 2016, il est alors approché par Alexandre Vinokourov qui cherche à consolider son groupe autour d’Aru, Fuglsang et Lopez après le départ de Nibali. Et chez Astana, petit à petit, Bilbao progresse : dixième du Tour de Suisse, quatrième au sommet de Piancavallo sur le Giro, à l’aise sur la Vuelta et les classiques italiennes automnales, son travail acharné lui offre de nouvelles responsabilités à l’entame de la saison 2018.

Et alors que son excellent Tour de la Communauté Valencienne avait tout du bon feu de paille hivernal, la suite des événements démontre tout le contraire. Huitième du Tour du Pays-Basque début avril, il termine meilleur espagnol et confie avoir repoussé ses limites dans la montée d’Arrate. Fort d’un talent indéniable conjugué à ses dispositions offensives, « Peio » semble de plus en plus libéré au fur et à mesure que son expérience s’accroît, lui qui connaît déjà, actuellement, sa huitième saison chez les professionnels.

Un Giro qui doit faire date

Surmotivé à l’idée de rendre hommage à Michele Scarponi, qu’il n’aura côtoyé que durant quatre mois, il remporte la première étape du Tour des Alpes, et fait des merveilles avec les deux autres espagnols d’Astana, Luis Leon Sanchez et Omar Fraile. Surfant sur son excellente forme, il réalise une première partie de Giro tonitruante et fera plus que limiter la casse en troisième semaine – 6e à Rome. Lieutenant de Lopez, il n’a pourtant pas eu à se mettre à la planche pour lui dans les moments décisifs, jouant sa carte en toute liberté. Sûrement impatients de voir jusqu’où sa détermination peut l’emmener, ses dirigeants ont choisi de l’aligner au départ du Dauphiné à Valence, ce dimanche.

Celui qui respecte pour la deuxième année consécutive un planning Giro-Vuelta devrait faire partie des hommes en forme, et se faire un nom sur les routes françaises. Mais ses belles facultés entrevues sur le Zoncolan ou dans le Finestre en ont interpellé plus d’un. Doit-il continuer à jouer l’enfant sage, ou peut-il réellement devenir un caillou dans le pied de ses supérieurs, Miguel Angel Lopez n’ayant jamais semblé en mesure de jouer la gagne sur le dernier Giro ? Son contrat prolongé jusqu’à la fin de l’année 2019, le rendez-vous est déjà pris pour le Tour d’Espagne, où la composition de l’équipe Astana sera assez similaire à celle présente sur le portillon de Jérusalem. Un nouveau top 10 serait gage d’un changement de statut bien mérité.

Buy me a coffeeOffrir un café
La Chronique du Vélo s'arrête, mais vous pouvez continuer de donner et participer aux frais pour que le site reste accessible.