« Cette année c’est la bonne ! » Comme tout bon clermontois supporter de son équipe de rugby, Romain Bardet connaît ce slogan. Et si, comme son équipe de cœur, c’était la bonne pour l’Auvergnat ? Rien n’est encore joué, mais après une semaine de course, le deuxième du Tour 2016 est plus que jamais en course.

Le rêve jaune des AG2R

Romain Bardet est serein. Après la traditionnelle conférence de presse de la journée de repos, quelques courageux étaient venus demander autographes et selfies au champion français. « Bon, la dernière », sourit-il lorsqu’on lui demande une énième photo. Mais lorsqu’une petite fille l’approche, il ne résiste pas et affiche un grand sourire devant l’objectif. L’Auvergnat semble détendu et serein avant de reprendre la route demain à Périgueux. Il faut dire que jusqu’ici, tout a fonctionné à la perfection pour lui. « J’ai des bonnes sensations depuis le début du Tour, explique-t-il. Je veux continuer de m’en servir pour faire quelque chose. »

« Le maillot jaune ? C’est un rêve, pour lui (Romain) comme pour l’équipe. A mon avis, Romain peut viser haut »

Mathias Frank

Troisième au général, à cinquante-et-une secondes du maillot jaune Chris Froome, Bardet a évité tous les pièges de la première semaine et a impressionné lors de la première étape de montagne, ce dimanche. Il avait alors attaqué dans la descente : « Personne n’a pu attaquer en montée, alors je suis parti dans la descente ! On avait qualifié ce Tour de tactique, et hier il l’a été. Il y a eu des opportunités, et quand elles se présentent, il faut être au rendez-vous. » De là à s’emparer du jaune ? « C’est un rêve, pour lui comme pour l’équipe », nous confie son coéquipier Mathias Frank. Le transfuge d’IAM se veut – selon ses propres dires – « capitaine de route » des AG2R. Dans le Jura, il a longtemps accompagné son leader. Et celui-ci l’impressionne : « A mon avis, Romain peut viser haut, affirme le Suisse. Hier, il y avait cinq ou six coureurs plus ou moins au même niveau sur le Mont du Chat. Le vainqueur sera le mec qui a le meilleur mauvais jour (sic). Le niveau est très équilibré jusqu’ici. »

À l’abordage

Vous l’aurez compris, les AG2R vont de l’avant. Pas question de rester sur la défensive. Ils l’ont déjà indiqué dans la descente du Col de la Biche. « C’est ce qu’on veut montrer de l’équipe, un esprit offensif », explique Pierre Latour. C’est même « une marque de fabrique » pour Romain Bardet. Mathias Frank détaille : « Cette stratégie, on l’avait prévu. Romain connaissait la descente, il nous avait dit que si elle était mouillée, il voulait la faire devant. » Mais il n’est alors pas question de lancer les grandes manœuvres, juste de protéger le leader. « Descendre à l’avant, ça permet de prendre moins de risques qu’en milieu ou en fin de groupe, approuve Latour. On n’a pas pris autant de risques que ça, même si ça allait vite. Il fallait essayer. Quand il y a une ouverture, on essaie d’en profiter. »

Ce petit coup de force des AG2R a tout de même mis le peloton sur les nerfs et envoyé Geraint Thomas au sol. Un signal fort. Bardet et ses coéquipiers ont confiance en leurs capacités et ils cohabitent dans un véritable esprit de groupe, forcément bénéfique dans les objectifs de l’équipe. « La bonne ambiance de l’équipe est un élément important pour Romain, nous confirme Vincent Lavenu, son manager. Quand l’équipe fonctionne bien, c’est un plus. Lorsque nous formons le groupe, nous portons une attention toute particulière pour amener des garçons capables de générer cette bonne ambiance. » La bonne humeur, l’optimisme et surtout la motivation sont donc au rendez-vous. « On croit en nos chances ici, on a vraiment l’envie de prendre la course en main et d’essayer », explique Mathias Frank. Le Suisse a une confiance absolue en son leader : « On sent que Romain est capable de faire de grandes choses, ça crée une très bonne atmosphère. »

Le chemin est encore long

Mais Bardet garde la tête sur les épaules et préfère calmer les ardeurs des supporters et des journalistes. Quand on lui lance qu’il n’a jamais été aussi près de gagner le Tour, l’Auvergnat reste lucide et blague : « Pas si près non plus ! » La concurrence est encore rude, entre Froome, Aru ou même Uran. « Il ne faut sous-estimer personne, développe l’Auvergnat. Il reste encore deux semaines de course, nous n’avons pas encore attaqué les Pyrénées ou les Alpes. Quintana a beau être une minute derrière, rien n’est fait, il faut y faire attention. On ne sait pas ce qui peut arriver. » Mais évidemment, sa très belle première semaine nourrit les rêves d’un Français en jaune sur les Champs. « J’ai conscience de l’attente que je suscite, déclare-t-il. Mais je l’ai répété maintes et maintes fois, quand Bernard Hinault a remporté ses Tours de France, je n’étais pas né. Je ne veux pas gagner pour lui succéder, mais simplement être le meilleur possible. »

« J’ai conscience de l’attente que je suscite. Mais je l’ai répété maintes et maintes fois, quand Bernard Hinault a remporté ses Tours de France, je n’étais pas né. Je ne veux pas gagner pour lui succéder, mais simplement être le meilleur possible. »

Romain Bardet

L’Auvergnat est un vrai chef de groupe, capable de fédérer son équipe autour de lui. « Il a réussi à tous nous motiver, nous assure Latour. On est tous autour de lui, et dimanche on l’a bien vu, avec trois gars dans l’échappée dès le départ. » Ainsi, l’équipe de Vincent Lavenu est déjà tournée vers les Pyrénées. Alors que Bardet déclare avoir reconnu l’étape de Peyragudes, son coéquipier Frank dévoile une autre carte que l’équipe pourrait sortir de sa manche : « L’étape courte de Saint-Girons – Foix (101 kilomètres) peut être propice pour nous, on peut y créer quelque chose. » Les deux semaines à venir pourraient ainsi dévoiler de nombreuses possibilités, dont Bardet et sa bande n’hésiteront pas à profiter. Mêler cyclisme offensif, résultats et plaisir, le credo des AG2R.

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