Certains ont pu croire que le Requin était bon pour la casse. Qu’il ne faisait plus peur à personne. C’était un peu précipité. A bientôt 33 ans, Vincenzo Nibali a remporté, en patron, un deuxième Tour de Lombardie. Il est bien loin d’être mort : au contraire, il mord encore.

Le roi reste roi

Ce n’est pas que le Sicilien crache sur les accessits, mais dernièrement, il y en avait eu un peu trop – et donc pas assez de victoires – pour qu’il garde le sourire. Pour clore sa saison, histoire de finir sur une bonne note, il est donc allé cueillir un monument, chez lui en Italie. Presque comme si ce Tour de Lombardie n’avait aucune chance de lui échapper. Il en avait fait sa proie de l’automne, tous ses rivaux l’avaient bien compris, et tous l’observaient pour tenter de déjouer son plan. Sauf que personne n’y est arrivé. Le Squale est encore trop fort pour le banc d’outsiders qui rêvaient de le faire tomber. Quand Nibali est sorti dans la montée de Civiglio, personne n’a suivi. Thibaut Pinot a tout juste réussi à prendre le train en marche lorsque l’Italien l’a dépassé. La suite fut un chef d’œuvre du transalpin, intouchable dans la descente, et pas beaucoup moins par la suite.

« Je voulais répéter ce que j’avais fait il y a deux ans (lors de sa première victoire sur l’épreuve lombarde, il avait opéré quasiment de la même manière en faisant la différence dans la descente, ndlr), c’était la meilleure façon de gagner, détaillait Vincenzo Nibali après-coup. Tout le monde avait un œil sur moi mais j’ai préféré faire ma course et anticiper. » Un favori qui assume, donc. Sa cinquantième victoire chez les professionnels restera un moment marquant. De quoi relativiser ses places d’honneur dans la semaine, au Tour d’Emilie et sur les Trois Vallées Varésines. Et sauver une saison ? Cela voudrait dire que l’Italien devait sauver la sienne, ce qui n’est pas sûr quand même. Le garçon a simplement été battu par Froome sur la Vuelta. D’autres ont connu pareil destin sans qu’on leur en tienne rigueur. Quant au Giro, il est le troisième larron d’un podium qui se tient en quarante secondes, où l’accompagnent l’ancien et le futur rival n°1 de Froome. On est loin de l’humiliation.

Bleus en embuscade

Entre Bergame et Côme, Nibali a donc remis les choses à l’endroit. Il a des challengers, beaucoup. Mais il a peu d’équivalents. Les Français l’ont bien compris, même s’ils ont eu le mérite d’être les plus en vue dans le sillage de l’Italien. Thibaut Pinot, s’il n’a sans doute pas fait douter le patron, a tenté de s’accrocher et a probablement fait quelques frayeurs aux tifosi. Il repart sans regrets, fidèle à la devise tatouée sur son biceps droit : « Solo la vittoria e bella ». Il a aussi confirmé que cette classique est taillée pour lui, deux ans après être monté sur le podium – battu par Nibali, déjà. Julian Alaphilippe, lui, a complété sa collection de places d’honneur sur les grandes classiques (deux podiums sur la Flèche wallonne, un sur Milan-Sanremo, Liège-Bastogne-Liège et le Tour de Lombardie) en s’extirpant du groupe de contre dans le final. Petit à petit, ces Bleus-là se font une place aux côtés du Requin. Bientôt, peut-être, ils seront en mesure de le croquer et de prendre sa place.

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