Après des conférences de presse ambitieuses durant les premières semaines de l’année 2016, les équipes continentales françaises se sont lancées à la conquête des premiers résultats mettant tout un groupe sur de bons rails pour les gros rendez-vous auxquels elles postulent. Dernier jour de février oblige, le calendrier très dense de chacune d’entre elles jusqu’ici nous permet de dresser quelques analyses comparées, à six jours du départ du Paris-Nice, qui devrait s’avérer déterminant pour obtenir une invitation sur le Tour de France.

Direct Energie, une insouciance désinhibée

Après la longue et belle aventure Europcar, comment la sauce allait-elle prendre au sein du nouveau groupe Direct Energie, mélangeant vieux briscards et jeunes talents issus de la réserve Vendée U ? La réponse n’a pas tardé à arriver. Omniprésente depuis la Tropicale Amissa Bongo, la bande à Jean-René Bernaudeau ne repart jamais sans le sourire des lieux où elle contribue au spectacle. Victorieuse à neuf reprises, elle affiche de loin le meilleur ratio des équipes de seconde division, et se positionne, toutes classes confondues, deuxième au classement des victoires par équipes derrière Etixx-Quick Step. Un excellent départ dû à des fers de lance décomplexés qui montrent la voie aux jeunes pousses. Sylvain Chavanel sur l’Etoile de Bessèges et Thomas Voeckler sur le Tour La Provence ont donné des idées à Lilian Calmejane, révélation française des premières épreuves dans l’Hexagone. Mieux encore, un coureur comme Adrien Petit, vainqueur du général au Gabon, a repris du plaisir sur son ancien terrain de prédilection, en témoigne sa septième place au Het Nieuwsblad.

De par son ancien palmarès et sa côte de popularité parmi les fans, l’équipe Direct Energie est quasiment certaine d’obtenir l’une des quatre invitations décernées par ASO pour le Tour de France. Mais démarrer sur des bases aussi enthousiasmantes lui confère également l’avantage de damer le pion aux équipes concurrentes pour les wild-card du World Tour. Invitée sur la totalité des grandes classiques pavées, Direct Energie a indirectement éjecté Cofidis du Tour des Flandres. Retenue pour l’Amstel Gold Race, épreuve pour laquelle Bryan Coquard n’a jamais caché son intérêt, et Liège-Bastogne-Liège, il n’est pas question d’évoquer la moindre année de transition. Les objectifs et les promesses sont bien présents. De quoi tirer le contingent français vers le haut.

Cofidis joue placé

Peu habituée aux rendez-vous exotiques du mois de janvier, la troupe nordiste, comme en 2015 a démarré sa saison sous le soleil des Baléares, au Challenge de Majorque. Sans Dani Navarro, c’est un autre espagnol, Luis Angel Maté, qui a essayé de tenir la dragée haute aux grandes stars, avec à la clé une douzième place sur le Trofeo Serra. Nacer Bouhanni, figure de proue de l’équipe Cofidis, avait décidé d’opérer sa rentrée lors du dernier jour d’épreuve pour défier André Greipel lors du Trofeo Playa. Seulement battu à la photo-finish, le Vosgien a poursuivi ses courses de préparation sur le territoire ibérique. Le Tour de Valence, la classique d’Almeria et la Ruta del Sol ont vu un Bouhanni actif, mais récompensé qu’à une seule reprise. À Cordoue, l’ancien champion de France a levé les bras devant des coureurs qui étaient à sa portée, mais a surtout engrangé un capital confiance non négligeable avant d’entamer sa campagne de classiques sur Kuurne-Bruxelles-Kuurne, ce week-end.

Troisième et seulement battu par Kristoff au sprint, Bouhanni arrive au départ de la Course au Soleil dans une position plus avantageuse que l’an dernier, où il avait chuté dans le final belge sans avoir gagné la moindre course auparavant. En revanche, même si depuis sa restructuration fin 2014, Cofidis joue la carte des sprints, d’autres coureurs se sont mis en évidence. Atout numéro un sur les parcours vallonnés de la Coupe de France, Julien Simon a déjà décroché cinq tops 10, tandis que Yoann Bagot a pris la cinquième place de la Méditerranéenne. Un premier bilan qu’on peut qualifier de moyen. Généralement lancés au mois de mars, les petits hommes rouges savent qu’ils peuvent et doivent faire mieux pour éviter de plus grosses désillusions à l’avenir. La bataille s’annonce très serrée pour revenir sur les routes du Tour, et la concurrence étrangère s’affirme. En invitant Gazprom-RusVelo et non Androni sur le Giro, RCS a montré que personne n’était indéboulonnable.

Delko Marseille, de timides premiers pas

Promue en division Continental Pro pendant l’intersaison, l’héritière professionnelle du VC la Pomme Marseille dispute une saison charnière en tous points. Ce n’est ni plus ni moins qu’une place pour la Grande Boucle que ses dirigeants espèrent décrocher à long terme. Sans coureurs de grande renommée à bord, le navire phocéen vogue pour le moment à vitesse modérée, mais peut se targuer d’avoir obtenu des invitations de valeur pour Paris-Nice, Paris-Roubaix, la Flèche wallonne et quelques courses exotiques. L’Argentin Daniel Diaz était notamment très attendu sur le Tour de San Luis, une épreuve dont il était le tenant du titre. Mais l’énigmatique sud-américain n’a pas amené les résultats attendus, et c’est les gaillards expérimentés qui sont allés montrer le maillot en février, sur leurs routes préférées. Evaldas Siskevicius à Bessèges, Thierry Hupond et Julien El Fares sur la Méditerranéenne, puis Rémy Di Grégorio, meilleur grimpeur du nouveau Tour La Provence, ont fait le boulot.

Mais à côté de ces performances somme toute ordinaires, on attend toujours les premiers succès saisonnaux chez Delko, qui rêve d’être invitée sur le fil au prochain Tour d’Espagne. Pour eux, Paris-Nice tombe à pic, histoire de venir marquer des points. Pas encore clairement identifiés auprès du public, les hommes de Delko Marseille – KTM doivent marquer les esprits comme a pu le faire Fortuneo – Vital Concept ces dernières années sous son ancienne appellation, Bretagne – Séché Environnement. Désireux de franchir un cap supplémentaire, leur présence répétée sur Paris-Nice leur avait ouvert la porte du Tour. Annoncée plus d’une semaine à l’avance, la composition du team Delko a été centrée autour des terrains difficiles. Bien malin est celui qui pourra prédire leurs résultats à partir de dimanche sur la course au soleil, mais, logiquement, elle reste l’équipe la moins en vue des quatre formations continentales françaises, et ne pourra décoller sans une grosse performance médiatisée.

Fortuneo – Vital Concept se doit de capitaliser

Portée par un changement de sponsoring, l’équipe dirigée par Emmanuel Hubert voulait s’imposer le plus rapidement en début de saison pour se rassurer. C’est chose faite, avec pour le moment deux succès à la clé, l’un au Gabon à l’actif du Biélorusse Hutarovich, et l’autre sur l’étape reine du Tour de San Luis, grâce à Eduardo Sepulveda. Dépendante de la condition physique de l’Argentin pour les courses par étapes, Fortuneo ne pourra malheureusement pas compter sur lui pendant les deux prochains mois après une lourde chute en Ardèche. Il n’empêche que jusqu’à présent, 33 tops 10 ont été récoltés, pour seulement dix podiums. Une accumulation de placettes qui illustre encore la difficulté de cette formation à scorer sur les différents terrains, en dépit des bonnes aptitudes de la recrue Chris Anker Sörensen. Mais l’espoir est de mise chez les Bretons, qui n’ont pas encore dévoilé toutes leurs cartes.

Jonathan Hivert et Pierrick Fédrigo devront porter l’équipe sur les classiques du printemps, Steven Tronet n’a pas réalisé de résultats probants, et Kévin Ledanois, champion du monde espoirs à Richmond, se testera sur Paris-Nice. Une épreuve sur laquelle l’organisateur ASO n’a pas remis en cause la venue des attaquants de Fortuneo, systématique depuis 2014. Mais il ne faudra pas s’y louper car derrière, Delko tente de s’immiscer au premier rang. Ce qui devrait nous garantir, côté français, de belles passes d’armes et des étapes débridées, à coup sûr animées par des coureurs offensifs aux objectifs divers. Mais au final, tout ça est aussi la faute des équipes françaises du World Tour, AG2R et la FDJ, qui n’ont pas laissé tant de place que cela aux autres pour s’exprimer pendant ces deux premiers mois de compétition.

 

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