Il ne rêvait que de ça. Montrer que lui, le Wallon qui survolait il y a quelques années les ardennaises, pouvait aussi dompter les pavés flamands. Et il y est arrivé. Malgré ses 34 ans, malgré la concurrence interne, malgré des adversaires sur le papier supérieurs, c’est bien Philippe Gilbert qui a inscrit son nom aux côtés des plus grands. Dans des circonstances très particulières…
Protégé par les Dieux
Les Dieux du vélo étaient sans doute du côté de Philippe Gilbert, en ce jour de fête pour toute la Belgique. C’est d’ailleurs ce qui hante nos esprits. Jamais, en temps normal, le Wallon n’aurait dû s’imposer. Mais définitivement, le Ronde n’est pas une course normale. « Si on veut gagner le Tour des Flandres, on n’attaque pas à 55 kilomètres de l’arrivée. » L’analyse de Jacky Durand, quelques minutes avant le podium, sur Eurosport, est pleine de sens. Parce que le Belge a eu un peu de chance. Celle de voir son leader désigné mis hors du coup sur un incident mécanique – et une certaine incompétence de l’équipe Quick-Step, disons-le. Et celle de voir, surtout, le trio Sagan-Van Avermaet-Naesen, tout juste parti à sa poursuite, chuter dans l’ultime passage du Vieux Quaremont. Sans ça, à 17 kilomètres de l’arrivée et avec moins d’une minute de retard, les trois hommes les plus costauds de ce printemps seraient revenus à coup sûr sur celui qui se donnait sans compter, seul, devant, depuis près de quarante bornes.
Parce que oui, quand Gilbert est sorti dans le deuxième passage du Vieux Quaremont, à plus de cinquante kilomètres de l’arrivée, il n’imaginait pas aller au bout. Il préparait le terrain pour ce Boonen que l’on espérait dans un grand jour et qui, à une semaine de raccrocher le vélo, rêvait de partir sur un succès de prestige. Mais finalement, de cette accélération jusqu’à Audenarde, « Phil » est resté seul. Personne n’a été là pour lui donner ne serait-ce qu’un relais. C’était Gilbert face au reste du peloton. Et face à lui-même. Alors aérien, il l’était à coup sûr. Jamais on ne l’avait vu aussi fort sur les pavés. Mais capable de s’imposer, dans des conditions normales, il ne l’était pas. Dans un sprint en petit comité, jamais il n’aurait pu rivaliser avec Sagan et Van Avermaet. Pas après tant d’efforts. Aujourd’hui, difficile donc de voir cette incroyable victoire de Gilbert comme celle du plus fort. Mais elle est incontestablement celle du plus courageux et du plus audacieux.
Étincelant
Comme si souvent, finalement, le Tour des Flandres a donc récompensé celui qui aura osé. Peut-être que ces fameux Dieux du vélo, en plus d’avoir un faible pour la belle histoire de Philippe Gilbert, ne voulaient pas d’un vainqueur qui ne se serait véritablement découvert que dans les vingt derniers kilomètres. Alors trente ans après Claudy Criquielion, voilà un nouveau wallon au palmarès du monument flamand. La légende Boonen et l’héritier Van Avermaet n’ont qu’à bien se tenir. Mais pas d’inquiétude. Le premier, déjà triple vainqueur, n’est plus à ça près. Le deuxième, lui, reviendra forcément l’an prochain, encore plus revanchard. On peut donc laisser, sans culpabiliser, une grande part du mérite à Philippe Gilbert. Un héros tellement heureux qu’en franchissant la ligne à pied, sa monture à bout de bras et le sourire jusqu’aux oreilles, il a propagé son bonheur. Jusqu’aux fans de Boonen, Sagan et Van Avermaet.
incompétence de l’équipe quick step ? mais oui biensur.. que dire des autres équipes alors ??? chaque vélo de rechange est sur le grand plateau.. pr revenir à la course ! énorme gilbert .. le plus fort à gagner !! dommage pr sagan mais le panache en sort vainqueur..
Oui tout à fait, j’ai oublié cette affirmation dans mon (déjà trop long) commentaire. L’équipe Quick-Step me paraît avoir parfaitement joué le coup tactiquement. A l’arrivée : une victoire et un podium, pas mal pour des incompétents. Plus sérieusement, pour une fois qu’ils mettent en place une stratégie d’équipe qui marche parfaitement, eux à qui on reproche si souvent (à raison souvent) de mal gérer ses leaders et de gaspiller sa force de frappe, félicitons-les.
@guillaume & La Jonchère “Une certaine incompétence”, oui, on y est pleinement. Et encore, je suis assez nuancé dans mon propos. Tendre à Boonen un vélo qui est sur le grand plateau et l’empêche de repartir au pied du Taaienberg, si ce n’est pas une erreur, je ne sais pas ce que c’est… Ensuite, Quick-Step aurait “parfaitement joué le coup tactiquement” ? Il faut arrêter d’être aussi dithyrambique sous prétexte qu’ils ont le vainqueur. Ils s’en sortent très bien sur ce coup-là ! Pour preuve, quand Gilbert part, personne chez Quick-Step n’est foutu de lui dire ce qu’il doit faire. C’est lui et lui seul qui prend la décision. Donc Gilbert a bien joué le coup. Mais Quick-Step a tellement paniqué qu’ils ont pas su lui dire s’il devait y aller ou pas. C’est grave pour une équipe de ce niveau. Voilà les explications de Gilbert après la course : « On a parlé avec Tom (Boonen) et Matteo (Trentin) et on a décidé d’aller à bloc dans le Vieux Quaremont. Mais je me suis rapidement retrouvé en tête après quelques centaines de mètres. J’ai demandé dix fois ce que je devais faire à la radio, personne ne m’a répondu… Lire la suite »
Même chose que ci-dessous, je suis d’accord avec ce que vous dites mais je ne peux m’empêcher de vous trouver que votre présentation des faits manque un peu de nuance. Ici, en oubliant de dire que l’équipe Quick Step a quand même très bien joué le coup en créant la bordure sur le Mur de Gramont. Avant toute chose, elle a su se créer l’occasion de pouvoir bénéficier de circonstances favorables. Et rien que cela suffit à faire une réussite collective. Ensuite, déduire de l’absence de réponse dans l’oreillette de Gilbert que l’équipe était nécessairement totalement “paniquée” : j’avoue ne pas avoir vu l’interview, peut-être que Gilbert en dit plus, mais si ça se trouve l’oreillette ne marchait pas, ou il y avait trop de bruit. Pourquoi vouloir nécessairement le signe que c’était le chaos total dans la voiture du directeur sportif. D’ailleurs même si l’équipe a été prise de court par l’offensive de Gilbert, elle a ensuite parfaitement exploité le coup en troublant les relais et en désorganisant la poursuite (et le moins qu’on puisse dire, c’est que ça a été assez efficace jusqu’aux 30 kilomètres). Là aussi, donc, réussite collective. En somme, l’équipe n’a certainement pas tout prévu… Lire la suite »
L incompetance de Sagan ces 2 dernieres courses me semble largement plus flagrante que celle dont vous argumentez avec insistance .
Quand à vouloir faire passer Sagan comme le messi qui decide qui gagne les courses; C´est un gag je suppose.
Saluons plutôt la victoire du roi Gilbert! il a été l´a chercher au fond de ses tripes; et il surtout su anticiper les débats et peser sur la course alors que le groupe qui chute n´a fait que filocher avant de s´allonger sur un manque evident de clairvoyance du slovaque.
Certaines de vos analyses me paraissent très contestables : -Philippe Gilbert préparait le terrain pour Boonen, et a été libéré par la chute de son leader désigné : rien n’est moins sûr. De ce que disaient les deux coureurs avant la course, Gilbert semblait jouir d’un statut au moins égal à celui de Boonen sur ce Ronde, si ce n’est mieux. De plus, il me semble que Boonen a beaucoup roulé après la cassure du Mur de Grammont et à l’approche du Vieux Quaremont, pas tellement Gilbert. Et une fois que Gilbert est parti, il roulait à fond, tandis Boonen cherchait très clairement à temporiser et ralentir le rythme du groupe. Pour moi, tout cela semble indiquer que l’offensive de Gilbert n’était probablement pas le coup préparatoire que vous suggérez. -“Aérien, il l’était à coup sûr. Mais capable de s’imposer dans des conditions normales, certainement pas”: Ah bon. Pour moi être aérien, c’est littéralement “survoler la course”, c’est à dire être en mesure de s’imposer quelles que soient les circonstances. En l’occurrence, Gilbert l’a été. Quant aux “conditions normales”, je ne vois pas bien à quoi cela correspond, dans une course qui se caractérise précisément par son imprédictibilité et la… Lire la suite »
tu as tout dit !!
Moi c’est la façon de contredire l’analyse qui me paraît contestable. Vous prenez soin de sélectionner une phrase au milieu de l’argumentation, en omettant les précisions qui suivent. Plutôt que d’isoler deux morceaux, il faut prendre le bloc dans son intégralité. Le (re)voici donc : “Alors aérien, il l’était à coup sûr. Jamais on ne l’avait vu aussi fort sur les pavés. Mais capable de s’imposer, dans des conditions normales, il ne l’était pas. Dans un sprint en petit comité, jamais il n’aurait pu rivaliser avec Sagan et Van Avermaet. Pas après tant d’efforts.” L’explication est plutôt claire. Gilbert était très fort. Mais dans une course normale, c’est à dire sans avoir trois des favoris qui chutent au moment où s’entame la poursuite (chose qui n’est pas habituelle, même sur le Tour des Flandres, je suis désolé), il n’aurait pas gagné. Parce que oui, à 3 contre 1 le trio serait revenu. Et après tous les efforts consentis par Gilbert, il aurait été mangé au sprint. C’est pas illusoire de penser ça, c’est juste logique. Vous le dîtes vous-même, après 260 km c’est la fraîcheur qui compte. Est-ce qu’il y a vraiment besoin de vous expliquer qu’en cas de regroupement,… Lire la suite »
Oui en effet, vos arguments dissipent certaines réserves qui s’étaient élevées lors de ma première lecture (peut-être un peu rapide, je m’en excuse). Mais je maintiens ma critique sur le ton péremptoire de l’article, qui donne le sentiment d’accorder plus d’importance à la chance dont a bénéficié Gilbert, plutôt qu’à sa très grosse performance (qui pour moi interdit qu’on puisse dire avec évidence que ce n’est pas le plus fort qui a gagné). Vous mettez en avant la remontée individuelle de Sagan et de Van Avermaet sur un ou deux monts pour montrer qu’ils étaient très forts (et donc plus forts que Gilbert selon vous), mais vous n’accordez pas la même valeur à la résistance que leur a opposée Gilbert sur 60 bornes. Vous affirmez sans ambages que Gilbert aurait été revu sans la chute de Sagan, en exagérant à mon avis (mais là j’admets qu’on peu en discuter) la réserve dont disposaient sagan et van avermaet. Contrairement à d’autres courses, ni l’un ni l’autre ne me paraissaient vraiment impériaux aujourd’hui. Finalement, pour vous, tout repose sur la chute de Sagan et de Van Avermaet. Sans elle, Gilbert eût nécessairement été revu, et battu. Donc Gilbert a été courageux en… Lire la suite »
Cet aspect, le fait que je dise que sans la chute le trio serait revenu sur Gilbert, c’est juste une question de logique. Vous le dites vous-même, Gilbert a perdu du temps sur les 15 derniers kilomètres. Mais sur qui ? Sur un Van Baarle bien farigué, aidé par Van Avermaet sur les 12 derniers kilomètres. Sauf que GVA était diminué par la chute et par le gros effort qu’il a dû faire pour recoller ensuite à Van Baarle. Avec eux, Terpstra n’a pas donné un relais.
Donc c’est pas illusoire de se dire qu’avec Sagan, Naesen et un Van Avermaet qui n’aurait pas eu ce contretemps, ils seraient revenus sur Gilbert. Aussi fort fut Gilbert aujourd’hui, il avait 40 bornes en solo dans les jambes. Je connais pas votre affection pour Gilbert mais ça vous fait perdre semble-t-il votre raison.
Merci, ma raison va bien:) (Et je suis plutôt supporter de Sagan!)
Quant à la “logique” dont vous vous revendiquez, elle me semble encore une fois un peu trop absolue. Je ne vais pas me répéter, mais pour moi Sagan et Van Avermaet n’étaient pas si impériaux que ça, et je ne suis pas absolument convaincu que Gilbert eût été revu (même si j’avoue que c’eût été probable). En tout cas pas assez pour affirmer de but en blanc que ce sont des circonstances anormales qui ont fait gagner Gilbert, en minorant un peu trop (à mon sens), le reste de la course. Voilà tout.
Ceci étant dit, je me permets ces remarques parce que j’apprécie grandement la qualité de vos articles et la justesse de vos analyses. N’y voyez pas autre chose qu’une invitation à la discussion:)
Aucun problème, l’espace commentaires est là pour le débat, c’est pour ça que je prends le temps de vous répondre !
Robin je pense que vous avez quelque part raison dans votre analyse . Si Gilbert a demandé à son équipe de décanter la course si tôt c’est parce qu’il savait que Sagan et GVA était très costaud et qu’il voulait les piéger . On ne saura jamais ce qu’il se serait passé sans la chute de ceux ci mais c’est clair que le final de la course aurait été bien plus compliqué pour Gilbert . Pour remporter ce genre de course il faut être fort mais il faut aussi un peu de réussite . Boonen a déclaré après la course qu’il a roulé à fond pour Gilbert et que lui espérait un podium mais la malchance l’a écarté de la lute finale .
Le plan était d’anticiper !!! à la pédale, gilbert aurait suivi sagan et van avermaet mais au sprint c’est la loterie .. la grande qualité de QST a toujours été la force du nombre, de durcir la course, faire du spectacle.. ils ne gagnent pas a chaque fois mais eux au moins assument leurs responsabilités !
Forcément que ce n’était pas prévu qu’un groupe de 20 coureurs se détachent à 90 kms de l’arrivée sans les 2 grands favoris.. ensuite une fois devant, gilbert était le plus fort, ses équipiers derrière jouent sur du velours en cas de regroupement et essayent de suivre les attaques.. donc on se retrouve pr QST avec le plan parfait, le meilleur devant et seul, et les lieutenants derrière qui attendent ..
Bmc et Bora se sont trompés de stratégie.. surtout Bmc qui avec leur bloc équipe n’avait pas le droit de laisser partir 20 coureurs (avec une 10 de leaders) sans un seul coureur de l’équipe, sans parler de l’équipe Lotto soudal.. Et si Gilbert se fait reprendre c’est Terpstra qui file vers la victoire !
BMC et Bora ont couru comme on l’attendait. Ils ont pas pour habitude de cadenasser la course. Si le trio ne chute pas dans le Vieux Quaremont, ils reviennent sur Gilbert et la victoire se joue entre Sagan et Van Avermaet. Dans ce cas, personne n’aurait critiqué leur tactique.
Terpstra, lui, n’est dans le coup que “grâce” à la chute. Quand Sagan et GVA partent, il n’est même pas dans ce groupe-là, mais dans celui d’après.
Bmc a couru comme on l’attendait ? on doit pas regarder les mêmes courses alors.. Terpstra n’est dans le coup que grâce à la chute, ? ok il y a chute mais c’est le seul à revenir de l’arrière.. Et si ils ne chutent pas, personne ne sait si ils seraient revenus.. Bref Gilbert a gagné avec la manière, et c’est bien là l’essentiel !
Dimanche prochain, ne vous offusquez pas si le bon coup part (comme l’an passé) aux abords de la trouée d’Arenberg avec Boonen en chef d’orchestre !
Pour battre Sagan et GVA il fallait anticiper et c’est ce qu’ont fait les coureurs de chez quick step . Gilbert remporte une victoire pleine d’audace et de panache et on s’en fou de savoir si il était le plus fort ou non . Les Dieux du vélo n’étaient décidement pas avec Tom Boonen qui n’a vraiment pas eu de chance pour son dernier Ronde . Vu sa grande forme il aurait pu espérer finir mieux que dans un certain anonymat . J’espère que la chance et la réussite seront là pour permettre à Boonen de finir sa carrière avec un feu d’artifice à Roubaix .
Ne vous inquiétez pas, le cyclisme est un sport d’équipe, et dimanche ça sera tout pour TOMMEKE !!!
Il faut arrêter de parler de “course normale” [j’ai aussi lu les commentaires et réponses aux commentaires précédents] :
– Philippe Gilbert tient ses poursuivant à 1′ pendant 50km, cela n’a rien de “normal” (dans le bon sens du terme). Il réalise un exploit.
– Sagan et GVA n’étaient pas impériaux, la chute de Sagan en est probablement le signe : pas le genre à poser la roue où il ne faut pas en temps normal.
– La chute est un “fait de course”, il y en a toutes les “courses normales”. Ça s’appelle le cyclisme.
– Sagan et GVA ont joué, ils ont perdu (le mec devant s’appelait Gilbert, pas – Ghislain – Lambert). Ça aussi ça s’appelle le cyclisme.
– Gilbert n’avait pas prémédité ce coup mais a réagi en fonction de la course. Encore une fois, ce que devrait être le cyclisme. Une chance que l’oreillette n’ait pas fonctionné.
En gros, je trouve dommage de minimiser cette énorme victoire (et j’aime bien Sagan et GVA).
Gilbert a réalisé un exploit. on avait vu qu’à La Panne, il volait.Les Quikstep qui étaient normalement inférieurs au trio Sagan Van Avermaet Naesen ont joué le meilleur coup à faire. Lancer l’offensive de loin, obliger les BMC et Bora à se dépouiller pour ramener leurs leaders, garder des munitions en réserve: Tepstra, Stybar. 4 chances sur 5 que ça ne marche pas mais la fortune sourit aux audacieux. S’ils n’avaient pas fait çà, même avec la chute, sans doute Van Avermaet gagnait. Et dans un Tour des Flandres comme à Paris Roubaix, encore plus que dans les autres courses, chutes, incidents mécaniques et crevaisons font partie de la course. Un grand bravo aux français très offensifs qui n’ont plus peur du Ronde.