Il devait être le grand homme des classiques. Dès le week-end d’ouverture, il s’était partagé les bouquets avec Greg van Avermaet, laissant au Flamand le Het Nieuwsblad avant de s’octroyer Kuurne-Bruxelles-Kuurne. Mais depuis, plus rien. Peter Sagan a traversé la campagne de classiques avec omniprésence. Mais sans grande victoire.

Des regrets plein la tête

En franchissant la ligne, sur le vélodrome roubaisien, Peter Sagan n’avait pas spécialement la mine d’un homme abattu. Mais il avait celle d’un homme frustré. Parce qu’il le sait, il avait les jambes pour remporter un monument au cours du printemps. Sauf qu’à chaque fois, il y a eu un os. Il s’appelait Michal Kwiatkowski sur Milan-Sanremo. Il avait ensuite pour nom la malchance sur le Tour des Flandres et Paris-Roubaix. « Milan-Sanremo, c’est pour moi. C’est de ma faute, concédait-il après l’Enfer du Nord, dimanche soir. Le Tour des Flandres aussi, même s’il s’est passé un truc bizarre. Mais aujourd’hui (sur Paris-Roubaix, donc), j’ai eu de la malchance. » Par deux fois, le Slovaque a crevé juste après être passé à l’offensive. Si l’Enfer peut parfois mener au paradis – c’est en tout cas le message des banderoles affichées sur le vélodrome –, pour lui, il a surtout été le théâtre d’une grande frustration. C’était son objectif secret. Il l’a manqué.

L’esprit de Sagan sera donc autant touché que son maillot irisé était maculé de poussière, dimanche après-midi. Son premier monument, l’an dernier sur le Ronde, devait servir de déclic. Il reste aujourd’hui le seul qu’il est parvenu à accrocher à son palmarès. « Si je regarde dans le rétro ces trois classiques-monuments, je peux dire que les jambes étaient bonnes, mais pas les résultats… », a commenté le double champion du monde. Parce que la frustration vient bien de là. Avec Greg van Avermaet, aérien tout au long de la campagne, Peter Sagan était clairement le plus fort. Celui qui a dynamité la Primavera dans le Poggio, celui qui était parti à la poursuite de Philippe Gilbert lors du Tour des Flandres, et celui, aussi, qui a tenté à plusieurs reprises de décanter Paris-Roubaix. Presque avec succès. Jusqu’à ces crevaisons qui font certes partie du jeu, mais pour le coup tellement malvenues.

Des malheurs au profit d’un homme

L’équipe Bora-Hansgrohe tant pointée du doigt, pourtant, avait été irréprochable. Quand le garçon a lancé une première offensive, son coéquipier Maciej Bodnar était là pour l’accompagner. Dans le final, ensuite, Marcus Burghardt était bel et bien dans le groupe de poursuivants avec Boonen, Degenkolb et les autres. Et les semaines passées, à Sanremo et sur le Ronde, plus esseulé, Sagan avait prouvé qu’il pouvait très bien s’en sortir seul. Alors oui, la pancarte dans son dos était immense. Au moins autant que celle qu’a dû se coltiner Tom Boonen, dimanche sur les secteurs pavés du Nord de la France. Mais le Slovaque a su, la plupart du temps, s’en défaire. Même s’il restera l’image de Gand-Wevelgem, où désireux de faire perdre Niki Terpstra, il avait laissé filer Greg van Avermaet. Une sorte de symbole, tant l’histoire du Flamand est liée à celle du Slovaque. Pour certains succès, « GVA » pourrait presque remercier son rival. Même s’il n’est pas certain, comme il a aimé l’avancer ces dernières semaines, que Sagan ait « choisi » le vainqueur à chaque fois qu’il n’a pas pu l’emporter lui-même.

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