Quelques mois après son transfert de la Sky vers BMC, Richie Porte va devoir défendre sa couronne à partir de dimanche, sur Paris-Nice. S’il a le classement général comme objectif, l’Australien n’a pas montré l’étendue de son potentiel sur ce début de saison, à l’exception de sa victoire à Willunga sur le Tour Down Under. Transparent en Oman, le mystère plane sur son réel état de forme avant le prologue de la course au soleil.

Une mise en action tardive

De l’aveu même du double vainqueur de Paris-Nice, son hiver n’a pas été le plus studieux de sa carrière professionnelle. « Je n’ai pas autant travaillé que l’hiver dernier. J’étais en Tasmanie et mon nouveau coach m’a simplement dit de rouler et de me faire plaisir », déclarait t-il à L’Équipe à l’arrivée du Tour d’Oman. Au Sultanat, Porte faisait naturellement partie des favoris pour la victoire finale, sur un parcours qui propose la première grosse arrivée en altitude de la saison avec la Green Mountain. 24ème à 2’57” de Vincenzo Nibali, l’ancien feu follet de la Sky n’a absolument pas pesé sur les débats, et apparaissait déjà largué au soir de la première étape. À l’image de toutes celles ayant suivi, Porte a franchi la ligne d’arrivée dans le gruppetto. Quelque chose d’inhabituel chez le trentenaire, plutôt coutumier des départs canons. Plus surprenant, cela fait suite à un Tour Down Under une fois de plus réussi, avec pour celui qui avait tout raflé de Paris-Nice au Giro l’an passé un succès sur les hauteurs de Willunga qui devait lancer sa saison.

Interrogé dans la foulée sur ses mauvais résultats, il n’était alors pas question de s’alarmer. Insistant sur les péripéties du voyage jusqu’au Moyen-Orient, Porte confiait dans un premier temps ne pas être là avec de gros objectifs. « Au Down Under, il y avait des attentes, et je devais faire un résultat. Mais ici, en Oman, c’est plus relax. C’est presque une escale pour les courses européennes. » Comme toujours extrêmement détendu, Porte aurait-il eu envie de calmer volontairement le jeu, et de ne pas afficher sa condition devant Nibali, Bardet et Dumoulin ? Étrange, quand on sait qu’en 2015, l’ancien gregario de Contador et Froome avait étalé son punch sur les pourcentages sévères de l’Alto de Malhao, en Algarve. Il était alors arrivé déjà rôdé sur l’épreuve française, et sa victoire en haut de la Croix de Chaubouret n’avait souffert d’aucune contestation. Un passé qui balaie donc d’un revers de main la thèse d’un mois de février maudit.

Le syndrome du piriforme et un Tour à préparer

Variables, les déclarations de Richie Porte le sont auprès des différents médias l’ayant sollicité. Et ce même en l’espace d’une journée. Au matin de la dernière étape, il reconnaissait volontiers à la télévision australienne SBS avoir disputé le Tour d’Oman diminué. « Je suis venu légèrement touché physiquement, pour être honnête. Je me suis entraîné avec Will Clarke en Tasmanie, et j’ai eu une crampe. J’étais si mal qu’il a dû me ramener à la maison. » Sans langue de bois, Porte admet également avoir eu du mal à organiser son programme d’étirements et de gymnastique durant l’intersaison, même s’il espère en tirer les bénéfices très rapidement – il semble avoir contracté une déchirure musculaire, le syndrome du piriforme, irritant le nerf sciatique et causant des douleurs aux hanches et aux jambes qui deviennent rapidement irritantes assis sur la selle de sa machine. Cela va dans le sens des déclarations de Fabio Baldato, qui assurait en conférence de presse que le plan consistait à ne prendre aucun risque du côté de Richie. Alors, a t-on pour autant affaire à un coureur à 50 % de ses capacités physiques ?

Non, martèle Porte pour SBS. « Je sais que je ne suis pas aussi en forme que l’an passé pour me présenter au départ de Paris-Nice. […] Mais, ce qui compte pour moi, c’est de savoir que quand je suis venu trois années plus tôt en France et que j’ai remporté mon premier Paris-Nice, j’étais dans la même situation. » Le ton est donc donné par le spécialiste des courses par étapes, comme toujours très décidé, voire arrogant dans sa manière de faire. Rentré chez lui, à Monaco, s’entraîner dans le calme à quelques kilomètres du juge de paix de l’édition 2016, la Madone d’Utelle, Porte a toujours adoré répondre aux critiques sur le terrain. Pour ce qui est de la lutte pour la gagne, il y retrouvera Alberto Contador. Mais trouvera t-il les ressources nécessaires pour faire plier l’Espagnol le dernier week-end, sans ce fameux chrono du col d’Eze où il avait forgé ses deux précédents succès ? Il y a de quoi douter, mais tout échec ne serait pas si significatif que ça pour le « Kangourou de Launceston ». L’ancien lieutenant de luxe chez les Britanniques annonçait en début de saison vouloir profiter de deux pics de formes. L’un autour du Tour de Romandie, et l’autre pour le Tour de France, où il partagera le leadership avec Tejay Van Garderen. Car c’est bel et bien lors de la Grande Boucle qu’il jouera sa saison et voudra prouver qu’il peut tenir la distance sur trois semaines. Le feu d’artifice final pourrait alors n’être que retardé. Ou bien ne pas avoir lieu du tout. Car avec Porte, ça a toujours été tout ou rien.

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