La troisième semaine de ce Tour d’Italie est largement décrite comme exceptionnelle au niveau du menu montagneux proposé aux coureurs. Après un week-end montagneux qui nous a tous laissé sur notre faim, et des étapes de transition assez calmes, cette arrivée au sommet du sanctuaire d’Oropa devait inévitablement marquer le nouveau cap de ce Giro, à savoir les hautes altitudes. Si le spectacle fut grandiose quand à la victoire d’étape, les favoris ont également choisi de se tester une première fois sur les pentes de la montée finale, même si l’on sent une certaine retenue. Le point de départ d’un crescendo gigantesque jusqu’à Trieste ?

Quintana lance son Giro derrière Pozzovivo

Nous voilà enfin dans le grand bain des Alpes. Si la huitième étape arrivant en haut de Montecopiolo faisait suite au difficile Monte Carpegna, la plupart des difficultés introduites depuis le départ en Irlande ont été escamotées, et réduites à un affrontement de second couteaux. Mais il n’était plus possible de se cacher en ce samedi, et à travers l’Alpe Noveis, le Bielmonte et surtout treize derniers kilomètres de montée en deux temps, dont six derniers kilomètres à 8% de moyenne, atteignant la barre des 13%. Et cela, Domenico Pozzovivo l’a bien compris. Le grimpeur de poche italien a mis son équipe à contribution dès les pourcentages difficiles, et à lancé les hostilités en plaçant une belle attaque. Résultat ? Personne ne lui a laissé prendre la poudre d’escampette aussi facilement qu’à Sestola dimanche dernier, mais Nairo Quintana a fait acte de présence. Cadel Evans et Rigoberto Uran, le maillot rose, n’ont pas pu suivre, et les deux purs grimpeurs ont fait la belle opération du jour en compagnie d’un Fabio Aru de plus en plus impressionnant. Le Giro semble bel et bien lancé en ce qui concerne ces coureurs, pas forcément à leur aise lors des amuse-gueules de première semaine, mais au pic de forme précis pour les journées décisives. Les écarts importants qui se sont construits tout au long des 42 kilomètres entre Barbaresco et Barolo ont déjà forgé l’allure du classement général, et le stade critique de l’attentisme décrié était pour aujourd’hui. Pas de quoi renverser la course rose, mais cette dernière s’emballe petit à petit, du moins, fait semblant…

Car si ce sont toujours les mêmes qui tentent d’assurer le spectacle à l’avant, à savoir Pierre Rolland – qui réussit même à reprendre du temps au général – , les Bardiani survoltés par leurs deux victoires d’étapes consécutives, Julian Arredondo ou encore Jarlinson Pantano, on sent très clairement que nous sommes entrés dans une physionomie radicalement différente. Il n’est plus l’heure de compter les secondes, mais bel et bien le moment de lâcher les chevaux pour de bon, après deux semaines insoutenables nerveusement d’observation. Que cela soit pour le rose, ou même pour le maillot blanc de meilleur jeune, dont la bataille s’annonce rude, au cœur d’un Giro où la jeune génération s’exprime le mieux. Qui de Rafal Majka, Wilco Kelderman, Nairo Quintana ou Fabio Aru remportera la tunique ? On devrait déjà avoir un peu plus les idées au clair, demain en allant vers Montecampione. Cette ascension en hommage à Marco Pantani devrait également dire si les mauvais signaux envoyés par Uran, Evans ou bien Kiserlovski ne sont que passagers, ou durables.

Le prélude d’une course de côte enflammée ?

Car demain dimanche, c’est une toute autre physionomie de course qui est prévue du côté du Plan di Montecampione, en Lombardie. La quinzième étape du premier Grand Tour de l’année 2014 est tracée selon un format assez similaire à celle du Mont Ventoux, déjà la quinzième du Tour du Centenaire. 200 bornes toutes plates sans exception où il faudra s’économiser un maximum, avant d’entamer les 25 dernières de très haut niveau, là ou le Pirate avait écoeuré tout le monde en 1998. Un terrain de jeu idéal pour Nairo Quintana, en premier lieu, qui semble monter en puissance et attendre sagement pour montrer ce qu’il a vraiment dans le ventre. Mais surtout, un endroit qui sera forcément révélateur, puisque personne ne pourra se cacher. Mettre l’excuse sur un jour sans, alors qu’aucun col n’aura été franchi auparavant ? Non, clairement, c’est le premier jour de vérité du Tour d’Italie, avant une journée de repos bien méritée avant l’indigeste triplette Gavia – Stelvio – Val Martello.

Mais attention, les kilomètres de plaine ne seront pas si inintéréssants, d’autant plus que l’équipe Movistar, critiquée pour son manque de soutien envers son leader colombien a retrouvée des couleurs à Oropa. Bien entouré jusqu’à la dernière montée, et bénéficiant d’un point d’appui issu de l’échappée matinale après avoir suivi Pozzovivo, Quintana sait que son équipe est à la hauteur de l’armada OPQS avec Poels, Brambilla et De Gendt. A ce titre, la composition de l’échappée et le choix d’une équipe d’imprimer le rythme en tête de peloton pourrait nous renseigner sur les états de formes. Ivan Basso a fait rouler la Cannondale aujourd’hui, mais n’a pas été à la hauteur des espérances dans les pentes les plus dures de la montée sur les hauteurs d’Oropa. De quoi s’alarmer, pour lui comme pour un autre ? Non, puisque personne ne semble déjà s’être découvert totalement. Une ascension régulière de 23 kilomètres à 8 %. Un argument supplémentaire en faveur du premier vrai pétard non mouillé risque également d’être le beau temps. Demain, 25 degrés sont en effet annoncés de Valdengo à Montecampione, le tout sous un beau soleil, après des journées de pluie et de fraîcheur. Alors, attention à ne pas trop s’enflammer sur ce que l’on a vu aujourd’hui, même si, à ce jeu, on peut attendre longtemps avant que les choses se décantent…

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