Alors que la saison des classiques italiennes commence petit à petit à battre son plein entre le triptyque lombard, le Tour de Vénétie et la prochaine Semaine Lombarde, c’est une véritable bombe qu’a lâché Angelo Citracca au quotidien Il Tirreno. Le manager général de l’équipe Continental Pro transalpine Vini Fantini a ouvertement envisagé le retrait clair et net de ses deux sponsors durant la fin de l’année. Un énorme coup dur pour les petits lutins jaunes, qui prend la tournure d’un énorme effet collatéral suite à deux mois houleux. Tentons d’y voir plus clair…

« Tous nos coureurs en fin de contrat sont libres de signer où ils le veulent »

Rien que cette phrase nous plonge dans le contexte de l’annonce. Exceptés les quelques coureurs étant sous contrat jusqu’en 2014 au sein de la structure italienne, tels Daniele Colli, Mattia Pozzo ou encore Rafael Andriato, tout ceux voyant leur contrat expirer dans les prochains mois sont libres, voire contraints de trouver un autre employeur pour la saison future. C’est généralement très mauvais signe d’entendre les managers généraux prononcer ce type de discours envers leurs coureurs. Les précédents Euskaltel et Vacansoleil sont là pour nous le rappeler, et la situation paraît donc critique en interne dans la maison Vini. D’autant plus que le ton est très pessimiste. Citracca déclare que «  Vini Fantini et Selle Italia ont manifesté l’intention de stopper leur partenariat. J’attends jusqu’à fin septembre mais je crois que leur décision est irrévocable. » Pourtant, rien ne laissait présager pareilles mésaventures aussi subitement…

La troupe dirigée par Luca Scinto réalisa un excellent début de saison illustré par le (trop) surprenant Mauro Santambrogio. Performant partout où il passe, son parcours s’arrête lors d’un contrôle positif à l’EPO Cera au départ du Giro, à Naples. Révélé un mois plus tard, cela suffit définitivement à plonger l’équipe dans une spirale démentielle. Le retour de Stefano Garzelli mais aussi du « killer » Di Luca devait être une fête sur la course rose, ce ne sera qu’un cauchemar. Contrôlé positif à l’EPO lui aussi, une vague d’indignations se porte envers les présumés « dindons de la farce » qu’est la formation transalpine. Irresponsabilités, récidive, tout y passe, et l’équipe est obligée de renoncer à l’une des courses les plus importantes de l’année pour des raisons éthiques, le Tour de Lombardie. Depuis, plus de faits d’armes à leur actif. Les dirigeants font profil bas, les tricheurs sont licenciés et le calme tend à revenir, mais c’était sans compter sur ce nouvel élément qui rentre dans la danse. Les événements passés ont inévitablement nui à la structure « giallofluo » et laissé une cicatrice terriblement profonde qu’on en ressent encore les marques. Les hommes forts du projet ont tous pris leurs marques envers leurs collègues et les relations ne sont plus au beau fixe. Mais cette dégradation progressive était-elle évitable ?

Une réputation fortement entachée 

Depuis cette folle journée du vendredi 24 mai, tout va de mal en pis. Les rapports de force se sont inversés, et les langues se délient. La société maîtresse de la formation, Farnese Vini, à l’origine d’une longue aventure depuis 2011, a été racheté par l’historique société Benetton ; mais ces derniers ne souhaitent finalement pas apporter son soutien financier à la bande de Citracca. « La faute de Di Luca et de Santambrogio à 100% », déclare t-il. « Tous les efforts financiers ont été faits et la situation était tranquille jusqu’au Giro. » Mais, là où certains le soulignaient avec insistance, pourquoi une équipe comme la leur a-t-elle fait le pari presque suicidaire d’engager un incorrigible repenti ? Citracca pointe les volontés de Valentino Sciotti, souhaitant attirer un grand champion dans l’équipe pour son image, tout en le dédouanant d’une grave faute. Un sentiment de fatalité à travers ces propos qui ne font qu’accentuer l’importance des intérêts personnels de chacun, non conjugués à celui de l’équipe. Premier à réagir de manière virulente, le charismatique directeur sportif Scinto avait fustigé l’attitude de ses collègues pour la manière dont Di Luca avait été introduit dans l’équipe, contre ses volontés sportives. Le début de la décrédibilisation des hommes en jaune…

Les « giallofluo » sont actuellement troisièmes de la Coupe d’Italie, avec 313 points. Il reste encore pas mal de courses automnales pour remonter, mais ils accusent déjà une centaine de points de retard sur l’équipe Androni Giocattoli, et 145 sur la Lampre – Merida, certes World Tour, alors que la détentrice de la Coupe d’Italie est automatiquement invitée sur le Giro. Si l’équipe est de la partie pour la saison 2014, il faudra donc passer par les invitations pour accéder au Tour d’Italie, et sa place n’est vraiment pas assurée… Forts d’une ouverture croissante vers l’extérieur, RCS pourrait bien leur réserver une mauvaise surprise, comme en 2012 avec l’invitation de NetApp en lieu et place d’Acqua & Sapone. La remise en question est inévitable ! Mais l’avenir qui s’est récemment assombrit ne doit tout de même pas être oublié. On oublierait presque les jeunes pousses de cette équipe et les quelques valeurs sûres, qui payent les erreurs des autres, comme Rabottini, Gatto ou Taborre… Citracca nourrit tout de même de grandes ambitions en ses talents, et voit en Gatto et Rabottini les meilleures chances italiennes pour les Mondiaux. Cela en dit tout de même long sur la détermination du bonhomme, qui évoque une remise à zéro totale pour sauver le navire. Une équipe 100% italienne est envisagée avec un sponsor toscan actuellement en négociations, qui pourrait avoisiner un budget de trois millions d’euros. Mais les bases pourraient reposer sur le point fort de l’équipe, la formation des juniors. Ce ne serait pas la première fois que la structure devrait être remodelée puisque jusqu’en 2010, elle était sponsorisée par ISD, et que l’an dernier, Neri Sottoli avait arrêté son parrainage. Cela nous promet donc des prochains mois enflammés de l’autre côté des Alpes avec un nouveau feuilleton à suspense…

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