Il est des garçons qui ne perdent pas de temps. Rémi Cavagna, 22 ans, a découvert le World Tour en 2017. Mais pas n’importe où : chez Quick-Step, l’une des plus grosses écuries du peloton, où il a appris à côtoyer Philippe Gilbert, Tom Boonen, Fernando Gaviria ou Julian Alaphilippe. Rien que ça. Un challenge à la hauteur des espoirs placés en lui. Révélé en 2015 avec un titre de champion de France du contre-la-montre espoirs, l’Auvergnat a vite brillé, aussi, chez les pros. Deuxième du dernier Tour de Belgique, un déclic pour lui, il se prend désormais à rêver de classement général. Des ambitions pour le moment sans limites, qu’il a livré à la Chronique du Vélo après le Tour de Guangxi, sa dernière course avant les vacances.

Rémi Cavagna, résumez-nous votre saison 2017 ?

60 jours de courses, 23 000 kilomètres parcourus au total en comptant l’entrainement et 11 pays visités en compétition.

C’est votre première saison en World Tour dans la formation la plus prolifique du peloton. Qu’est ce que vous retenez de cette saison ?

Pour moi la saison s’est plutôt bien passée. J’ai été mis dans les bonnes conditions par l’équipe, je n’ai pas chômé. J’ai toujours eu à rouler pour un de nos leaders, que ce soit Gaviria, Kittel ou (Dan) Martin.

Vous avez fait un très bon Tour de Belgique où vous passez tout près de la victoire (2e derrière Jens Keukeleire). Est-ce que vous vous destinez à terme aux courses par étapes ?

Le Tour de Belgique, c’est un déclic. J’avais des ambitions sur le chrono et j’ai réussi à prendre la bonne échappée le lendemain (sur la quatrième étape, ndlr). J’ai même enfilé le maillot de leader. Même si je le perds sur la fin, je me suis rendu compte que je pouvais rivaliser sur les courses par étapes avec des gros moteurs comme Tony Martin, Oliver Naesen ou Tiesj Benoot.

« Ca mettait presque la pression d’évoluer dans une équipe si talentueuse (Quick-Step). Désormais, je regarde tous ces champions (Gilbert, Boonen, ndlr) dans les yeux. Ils m’ont tous très vite mis à l’aise (…), c’est désormais des amis avant d’être des collègues. »

Rémi Cavagna

Peut-on dire que vous avez un physique à la Tom Dumoulin ?

Je suis encore loin du niveau de Tom Dumoulin. Pour la même taille, je pèse quatre kilos de plus que lui en pleine saison. J’ai plus le gabarit pour les classiques (1,86m, 75 kg). Après, je passe bien les bosses et grimper me plait assez. J’ai clairement un penchant pour les courses par étapes et je me suis déjà agréablement surpris dans des bosses et sur des courses dures comme le dernier Tour de Guangxi. L’an prochain, je vais essayer de travailler dans ce sens là pour être encore plus performant dans l’enchaînement des courses et des cols. Je vais aussi très certainement disputer mon premier grand tour, probablement le Giro.

Votre goût pour les bosses, c’est le côté Auvergnat ?

J’habite Clermont-Ferrand et c’est vrai que je n’ai pas à me plaindre de la topographie. Il y a de la montagne, comme le Puy-de-Dôme, qui propose déjà des altitudes intéressantes, mais aussi de la plaine comme celle de Limagne. C’est là où j’ai fait mes premiers tours de roues. En tout cas, la région semble réussir en ce moment, avec Bardet, Vachon et même « Alaf » qui viennent du coin.

Comment se passe la relation avec Julian Alaphilippe chez Quick-Step ?

Julian est un super mec qui ne se prend pas la tête. Il est frais, sympathique et on est devenus amis. En Chine la semaine dernière, on a partagé la même chambre et on a bien rigolé. Au delà de ça, j’apprends beaucoup de lui et malgré le peu d’âge qui nous sépare, son expérience est déjà très solide alors je tente de m’en inspirer.

Et avec les autres coureurs ?

Sur le Tour de Belgique, Cavagna a porté le maillot rouge pendant une journée, et finalement terminé deuxième – Photo Quick-Step Floors

Au début, j’étais un peu intimidé d’être avec des gars comme Philippe Gilbert ou Tom Boonen. Ca mettait presque la pression d’évoluer dans une équipe si talentueuse. Désormais, je regarde tous ces champions dans les yeux. Ils m’ont tous très vite mis à l’aise et les côtoyer tous les jours m’a permis de m’imprégner de leur science de la course. C’est désormais des amis avant d’être des collègues.

Votre restez avant tout un très bon rouleur. D’où vient cet amour pour l’effort solitaire ?

J’ai appris à aimer rouler. Le fait que j’aille m’entraîner souvent seul m’a permis de développer mes capacités dans l’exercice et du coup mon intérêt pour cet effort. Mes capacités pour le contre-la-montre ont largement évolué ces dernières années, mais je pense encore avoir une bonne marge de progression dans le domaine, à condition de sortir régulièrement le vélo de chrono. Cette saison je n’ai pas pu travailler l’exercice autant que je le souhaitais. Le vélo de chrono, normalement c’est trois fois par semaine tout en veillant à garder une bonne base de puissance tout au long de la saison. En fait, l’effort solitaire me correspond bien.

Vous incarnez d’ailleurs la nouvelle génération des prometteurs rouleurs français.

« Mon chrono aux championnats de France, c’est le pire souvenir de ma saison. Je suis complètement passé au travers. (…) C’était une énorme déception. Les France, c’est mon objectif chaque année et à chaque fois je me plante. »

Rémi Cavagna

Je ne sais pas si je fais partie d’une nouvelle génération de français bons rouleurs, peut-être aussi que certains coureurs sont déjà doués dans l’exercice mais ne s’en rendent juste pas compte. Le potentiel en France ne manque pas. Pour ma part, je suis encore jeune (22 ans) et je vais axer ma prochaine saison sur deux piliers : la préparation des courses par étapes et, surtout, les chronos. C’est quelque chose qui me tient à cœur d’obtenir de plus en plus de résultats et d’être présent sur les rendez-vous internationaux de contre-la-montre.

Vous avez pourtant terminé à une anonyme 36e place au championnat de France…

Mon chrono aux championnats de France, c’est le pire souvenir de ma saison. Je suis complètement passé au travers. Il faut dire que je ne m’étais pas vraiment préparé spécifiquement à l’exercice, mais j’étais clairement dans un jour sans. C’était une énorme déception. Les France, c’est mon objectif chaque année et à chaque fois je me plante. L’an prochain, je serai plus sérieux dans mon approche de l’échéance.

C’est votre passage chez Klein Constantia (l’ancienne réserve de Quick-Step, qui stoppe son activité à la fin de l’année) qui a forgé votre moteur ?

Rouleur qui aime bien les bosses, Rémi Cavagna se met à penser aux classements généraux – Photo Quick-Step Floors

Mon passage là-bas m’a clairement fait franchir un cap. Si j’étais resté en France, je n’aurais peut-être même pas connu le World Tour ou je ne serais même plus professionnel. Ce passage en Continental Pro m’a fait progresser et prendre conscience des conditions du rôle de leader et les exigences que comportent le cyclisme de très haut niveau. Dans l’équipe, on était treize, treize amis et tous soudés. C’est grâce à eux et cet encadrement que j’en suis là.

Quels seront vos objectifs pour la prochaine saison ?

De progresser, surtout. En fait, mis à part les championnats de France de contre-la-montre, je n’ai pas d’objectif précis en terme de course. Niveau programme, je vais commencer, comme en 2017, par l’Argentine et le Tour de San Juan. La saison dernière, j’avais commencé là-bas aussi et ça reste un de mes meilleurs souvenirs. J’étais tellement fier de porter mon tout premier maillot Quick-Step en compétition. Un an plus tard, mon statut a un peu évolué. L’équipe comptera sur moi en 2018 et me fera de plus en plus confiance. Je vais devoir confirmer cette bonne première saison.

En attendant, vous prévoyez un peu de repos ?

Oui, là je coupe jusqu’au 15 novembre. Après je vais reprendre tranquillement la course à pied et quelques sport annexes. Je remonterai sur un vélo en décembre. Ensuite, nous avons un premier stage à Calpe, en Espagne, de fin décembre à début janvier et là, la saison sera réellement lancée.

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