Il est l’un de ceux qu’on attendait sur cette campagne de classiques 2017. L’an passé, Alexis Gougeard avait terminé cinquième du Het Nieuwsblad et laissé présager quelques belles promesses. Seul hic, il était alors trop volubile en course. Trop souvent à l’avant. Trop rarement calculateur. On espérait donc qu’il change, juste un petit peu. Qu’il compte davantage ses coups de pédale, pour aller titiller les meilleurs. C’est d’ailleurs dans ce domaine qu’il voulait s’améliorer. Sauf qu’aujourd’hui, rien n’a changé. Chaque week-end, Gougeard, 24 ans, est à l’attaque. Et ça ne le fait pas gagner… Alors entre le GP E3 et Gand-Wevelgem, la semaine dernière, il s’est confié à la Chronique du Vélo. Pour évoquer sa philosophie, sa difficulté à rester dans le peloton et son amour de l’offensive. Avec sincérité.

Après votre printemps 2016, on imaginait que vos objectifs seraient les classiques cette année. Ce n’est pas le cas ?

L’objectif principal c’est d’être au départ du Tour de France. Après il y a aussi les classiques, où on a une belle équipe. Je veux prendre du plaisir, être devant et continuer à apprendre sur ces courses. Enfin, il y a aussi les Championnats de France qui vont arriver rapidement. Alors dans l’ensemble, j’espère continuer sur ma lancée avec l’équipe.

Sur les deux monuments pavés, quel rôle aurez-vous ? On vous a vu dans l’échappée sur le GP E3, serez-vous ensuite plus protégé, voire leader ?

Leader non, notre leader est Oliver Naesen. Mon rôle est plutôt de l’accompagner le plus loin possible, avec Stijn Vanderbergh. Oliver est vraiment sur son terrain, il nous l’a montré et depuis le début il a fait quatre top 10 sur les quatre épreuves flandriennes (Het Nieuwsblad, Kuurne, A Travers la Flandre et GP E3, le Belge a ensuite terminé 22e de Gand-Wevelgem, ndlr). Donc moi, je suis là pour l’accompagner, avec Stijn, qui est également capable de faire des numéros.

Est-ce pour ça que vous suivez la même stratégie que les années précédentes, en partant dans les échappées ?

Seul devant, forcément – Photo ASO

Oui, je ne pense pas encore avoir la jambe pour suivre les costauds quand ils accélèrent, donc j’essaie d’anticiper le coup. Je me dis qu’il faut avoir un coup d’avance pour pouvoir les suivre par la suite, quand ça roule un peu plus au tempo.

Pour essayer de répéter le scénario de l’année dernière sur le Het Nieuwsblad ?

Voilà, ce sont des choses qui peuvent arriver. Moi c’est comme ça que je peux les suivre. Bien sûr j’espère un jour pouvoir les suivre dans les coups de force et en faire partie. Mais pour le moment c’est la stratégie et ça me va, donc on va continuer.

Que vous manque-t-il pour pouvoir suivre les plus costauds à la pédale ?

Ça se joue beaucoup au placement. Je progresse un peu à ce niveau-là et c’est ce qui me manquait. Il faut vraiment que je prenne mes marques avec l’équipe. Aujourd’hui avec Oliver, c’est plus simple aussi d’être à l’avant. On est plus respectés, on a plus notre place et c’est plus facile de suivre les coups quand on court devant.

Par rapport à cet objectif de progression, vous êtes vous préparé différemment cet hiver ?

Non, je n’ai pas trop changé ma façon de faire. Avec l’équipe on a fait un peu plus de reconnaissances que l’année dernière et je pense qu’il faut qu’on continue comme ça. Pour le moment il y a des bons résultats, il faut poursuivre dans cette voie.

Quand vous partez dans l’échappée en début de course, à quoi pensez-vous ? Quel est l’objectif ?

« J’ai vraiment envie d’être devant, d’essayer quelque chose. Je me dis toujours qu’un jour ça sourira, qu’il y aura une ouverture et que j’y serai. Mais il faudrait peut-être que j’arrive à me canaliser. »

Alexis Gougeard

L’objectif est d’aller le plus loin possible, que les costauds me rattrapent le plus tard possible et que je puisse être le plus utile possible pour l’équipe. Si je ne suis pas utile dans l’échappée, c’est une déception. Donc quand je pars devant, je réfléchis vraiment s’il est possible d’aller loin, de passer au mieux les grosses difficultés et d’être utile pour le final.

On dirait que c’est presque un besoin pour vous d’être à l’avant, de s’échapper, de beaucoup travailler dans l’échappée ?

Un besoin je ne sais pas, mais c’est vrai que sur le départ je suis vraiment actif, je n’arrive pas vraiment à me retenir. J’arrive de plus en plus à me canaliser mais c’est vrai que je ne sais pas pourquoi, j’ai vraiment envie d’être devant, d’essayer quelque chose. Je me dis toujours qu’un jour ça sourira, qu’il y aura une ouverture et que j’y serai. Mais il faudrait peut-être que j’arrive à me canaliser.

Vous aviez pourtant annoncé vouloir changer de stratégie, être moins dans l’anticipation. Mais ça semble compliqué pour vous…

On va dire que c’est un peu contre nature. Je cours comme ça depuis toujours. C’était pareil chez les amateurs. Donc oui c’est compliqué. Mais j’y arrive de mieux en mieux quand même, j’en mets beaucoup moins au départ.

Vous n’avez pas gagné l’année dernière, contrairement aux saisons précédents. Est-ce que ça vous met plus de pression sur les courses ?

Non pas forcément. Ça faisait depuis ma deuxième année chez les cadets que je n’avais pas passé une année sans gagner. C’est un peu anecdotique mais j’aime gagner. Je fais du vélo pour ça et là, ça me manque un peu. Mais je pense que ça reviendra.

Quelle sera votre stratégie et celle de l’équipe pour le Tour des Flandres et Paris-Roubaix ?

Chez les professionnels, Alexis Gougeard n’a disputé qu’une seule fois Paris-Roubaix, en 2015 – Photo ASO

Moi je vais essayer de faire ce qu’on me dit de faire. Je veux vraiment essayer d’accompagner le plus loin possible Oliver et Stijn, pour leur être utile. On a vraiment deux gros leaders et moi, ma stratégie sera en fonction d’eux.

Un de vos rêves est de gagner Paris-Roubaix, comment allez-vous l’aborder ?

Pour moi, Paris-Roubaix est la plus belle course du calendrier. Ça a tendance à me mettre un petit peu plus de pression mais j’aime ça et j’espère prendre beaucoup de plaisir sur cette course. Je ne l’ai disputé que deux fois, une fois en amateurs et une fois chez les pros, il y a deux ans. J’ai pris du plaisir à chaque fois, même si c’est dur. Alors j’espère continuer sur cette voie, et avec le groupe qu’on a il n’y a pas de raisons qu’on ne prenne pas de plaisir tous ensemble.

Vous avez manqué Paris-Roubaix l’année dernière…

Oui, la saison passée je n’ai pas fais toutes les classiques flandriennes, j’étais malade. Du coup ça fait plaisir de retrouver ces routes.

C’est aussi pour ça que vous vous êtes lâché en prenant l’échappée sur le GP E3, pour retrouver des sensations sur ces terrains là ?

Oui, même si les sensations ne sont pas mauvaises en ce moment. Ce n’est pas exceptionnel mais pas mauvais non plus. Il y a eu une opportunité, c’était un début de course assez compliqué, l’échappée a mis longtemps à sortir, près de 80 kilomètres. Les coureurs désignés de l’équipe étaient un peu fatigués, je me suis retrouvé à suivre un coup qui était le bon. C’était mon rôle aussi de les aider et c’est moi qui me suis retrouvé devant.

Vous ne faîtes plus forcément partie des coureurs désignés au départ pour s’échapper ?

Sur le GP E3, je devais prendre les gros coups, de 8 à 10 coureurs. Les coups de 6 (comme celui dans lequel il s’est glissé, ndlr), ce n’était pas prévu pour moi. Mais comme la course s’est faite assez tard, ça devenait un coup intéressant.

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