Gagner sa première étape de grand tour sur les Champs-Élysées, c’est très fort. Réaliser cet exploit au bout d’un sprint lancé à quatre cents mètres du but, c’est tout simplement incroyable. C’est pourtant ce qu’a fait Dylan Groenewegen, après avoir avalé la dernière ligne droite à une vitesse folle.

Un rêve

Il en rêvait, il l’a fait. « Plus petit, je rêvais de courir le Tour et d’y gagner des étapes. Maintenant, j’y suis, et je fais tout pour glaner un bouquet », nous racontait-il il y a quelques jours. Dylan Groenewegen a conquis la plus belle allée du monde au forceps, résistant aux deux mastodontes Edvald Boasson Hagen et André Greipel qui déboulaient chacun d’un côté. La performance tient même de la prouesse. Parti à plus de quatre-cent mètres de la ligne, le Néerlandais a pris les choses en main, réglant à la cuisse tous ses adversaires. L’impression laissée est exceptionnelle. Monstrueux, le coureur offre une deuxième victoire à son équipe Lotto-Jumbo après celle en solitaire de Primoz Roglic à Serre-Chevalier. Pas forcément une surprise au vu de ses performances sur ce Tour. Il avait jusque-là décroché cinq top 10 et sur deux podiums d’étapes dont cette deuxième place juste derrière Marcel Kittel à Pau.

« C’est une journée vraiment incroyable », s’émouvait ce pur gamin d’Amsterdam. Au terme de la parade annuelle des courageux du mois de juillet, il entrait dans l’histoire aux côtés de noms prestigieux de l’emballage final tels que Mark Cavendish, Thor Hushovd, Djamolidine Abdoujaparov ou Freddy Maertens. Gagner sur les Champs n’est jamais un hasard, même si il y a eu quelques surprises. Très critiqué au pays ces derniers mois, ce sprinteur fluet a peut-être enfin eu le déclic. Sa performance laisse en tout cas songeur. Si cette allée infiniment longue a souvent été terre d’exploit, le doublé Cavendish-Renshaw de 2009 en étant un exemple encore vivace dans les mémoires, celui de Groenewegen est définitivement taillé dans la même pierre.

Le précédent McEwen

L’ancien champion des Pays-Bas a réussi un exploit remarquable en remportant sa première étape sur les Champs. Comme un certain Robbie McEwen… L’Australien roulait à l’époque chez Rabobank, actuellement Lotto-Jumbo. L’analogie est intéressante. Si Dylan Groenewegen pouvait faire la même carrière que son aîné, vainqueur de douze étapes et de trois maillots verts, il signerait sûrement. Mais l’Australien avait déjà 27 ans au moment de lever les bras sur les Champs, alors l’avenir semble radieux pour Groenewegen, encore très jeune. Il lui faudra néanmoins s’imposer à l’intérieur d’une génération dorée. Marcel Kittel est toujours jeune (29 ans), Arnaud Démare davantage encore (26 ans) et les jeunes pousses (Caleb Ewan, Fernando Gaviria) tapent déjà très fort à la porte. Réussir à devenir l’épouvantail du sprint dans les prochaines années sera compliqué.

« Peu importe si le début paraît petit », écrivait le philosophe engagé Henry David Thoreau. Loin d’être une lapalissade, la phrase fait sens dans la vie de beaucoup de sportifs. Pas dans celle de Dylan Groenewegen. Son premier succès sur un grand tour est signé à Paris, sur les Champs-Elysées, sur la ligne droite qui sacre les monstres sacrés du sprint et qui n’appartenait qu’au gratin mondial depuis huit ans. Mark Cavendish, Marcel Kittel et André Greipel se partageaient les victoires. Que du lourd. Mais cette année est celle de trop pour le Gorille de Rostock, qui à 35 ans, n’a pas réussi à déborder son jeune concurrent ; et ni Mark Cavendish, ni Marcel Kittel n’ont pu amener leur vélo dans la capitale française. La victoire de Groenewegen n’est néanmoins pas à classer parmi les succès par défaut, tant la qualité de son sprint fut magnifique. Si le début est grand, Dylan Groenewegen doit encore faire en sorte que son avenir ne devienne pas la trahison des promesses entrevue en cette froide soirée de juillet. Le plus dur est toujours de confirmer.

Buy me a coffeeOffrir un café
La Chronique du Vélo s'arrête, mais vous pouvez continuer de donner et participer aux frais pour que le site reste accessible.