Après avoir longuement parlé des Mondiaux de Richmond, des potentiels scénarios de course, de ses favoris et de l’atmosphère spéciale du rendez-vous de fin septembre, Gianni Savio revient plus en détail sur l’actualité récente de son équipe Androni Giocattoli – Sidermec. Marqué par un mois de suspension en août suite à deux contrôles positifs en un espace relativement court, le manager italien met les points sur les i, et n’hésite pas à analyser plus finement les problèmes actuels du MPCC.

“Tout est question de cohérence”

Comme d’habitude, je n’hésite pas à parler clairement, et nous avons eu la malchance de tomber sur de stupides criminels. Je le répète haut et voir, de stupides criminels, qui sont Appollonio et Taborre, s’étant dopés. Ceci dit, nous sommes l’une des équipes qui va le plus loin dans la lutte contre le dopage. Nous avons effectué toute une série de tests préventifs, nous avons consacré du temps à organiser des séminaires de sensibilisation avec le médecin sur les conséquences sportives et physiques ravageuses des produits dopants. Des avocats sont également venu faire des conférences sur l’engrenage pénal d’un tel choix. Et comme mesure de dissuasion, j’ai invité toute l’équipe en début d’année à signer un protocole interne dans lequel tout coureur s’exposait à payer une amende de 100.000 euros en cas de contrôle positif ! Tout cela sous le contrôle de l’avocat Napoleone et du notaire Marbassa. Je tiens également à préciser que je n’ai jamais mis la moindre pression sur ces deux coureurs. Je n’aurais donc jamais pensé devoir gérer de tels événements. Certes, nous avons eu un mois de suspension, mais nous faisons partie du MPCC (Mouvement pour un Cyclisme Crédible). En pratique, nous nous sommes donc auto-suspendus pour respecter ses règles. D’ailleurs, des polémiques ont éclaté récemment quant à cette organisation. Mais selon moi, il n’en est rien. Tout est question de cohérence. Prenons par exemple le comportement de mon équipe. La Gazzetta dello Sport selon moi ne s’y trompait pas, et avait intitulé « Virage historique de l’équipe Androni » après l’éclatement des affaires Appollonio et Taborre. C’est en effet la première fois dans l’histoire du cyclisme qu’une équipe toute entière, coureurs, managers, staff et sponsors, portent plainte de manière groupée contre ces deux imbéciles. Ce procès doit encore attendre un petit peu pour se dérouler, mais nous en connaîtrons bientôt la date.

En revanche, pour revenir au débat sur les départs internes au sein du MPCC, je pense que si l’on accepte des règles pour rentrer dans n’importe quelle association, il faut naturellement les suivre. Lorsque l’on regarde de plus près, on observe que cette institution a perdu toutes les équipes qui n’ont pas accepté l’auto-suspension dès lors qu’ils ont été mis devant leurs reponsabilités. Southeast, c’est quatre coureurs positifs en deux ans, et qu’ont-ils fait ? Quitter le MPCC. Chez Lampre, ils n’avaient pas à conserver Diego Ulissi après son contrôle positif, ils n’ont pas souhaité se plier aux conditions, et sont par conséquence partis. Du côté de Bardiani, un de leurs coureurs n’a pas respecté la règle du taux limite de cortisolémie, avait un seuil trop bas avant le Giro. Théoriquement, il ne devait pas être aligné au départ. Eux aussi ont claqué la porte, tout comme Astana qui s’est retrouvé dans la même situation avec le cas de Lars Boom sur le Tour. D’un point de vue personnel, je n’ai pas vocation à porter des accusations envers n’importe qui, mais force est de constater que ces équipes ne sont pas cohérentes envers elles-même. C’est bien trop facile de dire que l’on adhère et contribue à un mouvement défendant les valeurs d’un cyclisme crédible, de se faire une bonne image, et de se défiler complètement lorsque sa propre place est mise en jeu.

“Je n’ai pas confirmé Gianfranco Zilioli”

En cette fin du mois de septembre, le temps du mercato est bien évidemment venu. J’ai d’ores et déjà confirmé mes meilleurs coureurs, à savoir Marco Bandiera, qui est monté à deux reprises sur le podium du Giro à Milan pour les classements du sprint intermédiaire et des kilomètres en échappée. Je suis heureux de savoir que Francesco Chicchi restera avec nous, et j’ai renouvelé Alessio Taliani, un grimpeur qui était néo-pro cette année. Cette année, il a remporté l’étape reine du Tour de Sibiu, en Roumanie. Les discussions sont encore ouvertes avec Franco Pellizotti, on verra si il est toujours tenté pour continuer l’aventure. Je me réjouis aussi d’avoir pu signer un très bon coureur, en qui je place beaucoup de confiance, c’est Davide Vigano. Il a gagné trois courses en 2015, déjà roulé dans des grandes formations telles Quick Step, Lampre. L’année dernière, chez Caja Rural, il s’était bien illustré, et c’est quelqu’un de régulier sur les courses italiennes. Mais pour vous le dire franchement, je n’ai pas confirmé Gianfranco Zilioli. Les relations sont toujours excellentes entre nous, mais en deux années, il n’a presque rien fait. Après avoir gagné le Grand Prix de Prato en tant que stagiaire, il n’a malheureusement pas confirmé. Ce n’est pas une méchante critique, mais une constatation. Je suis très content qu’il ait trouvé refuge chez Nippo-Vini Fantini, et j’espère pour lui qu’il pourra retrouver une condition optimale. Je suis en train de redistribuer les cartes dans mon effectif, il fallait faire des choix.

Enfin, j’entretiens toujours des rapports cordiaux avec tous mes amis et contacts professionnels au Venezuela, mais le partenariat que je menais a capoté. J’ai décidé de changer de manière urgente de co-sponsor à la mi-saison, et de remplacer Venezuela par le groupe Sidermec. Il se trouve que nous sommes toujours en attente des sommes attendues depuis l’année dernière. Je sais qu’il y a eu de nombreux problèmes liés à la crise là-bas, et il y a eu un changement de ministre aux Sports. J’ai rencontré le nouveau nommé, et cela fait trois mois qu’il m’a confirmé qu’il aurait payé. Mais, nous n’avons toujours rien reçu. Dans cette situation, j’ai renoncé à assumer le poste de sélectionneur national du Venezuela aux championnats du Monde de Richmond. Une première pour eux, puisque depuis le début de notre collaboration, je les avais toujours emmené sur place, fait progresser. Ils ont toujours été des protagonistes, dans les échappées matinales, comme Jackson Rodriguez, Yondor Godoy. Si les versements arrivent un jour, alors, peut-être que je reprendrais mes activités dans ce pays, mais cette situation n’était plus tenable.

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