C’est une chute qui ne devrait pas chambouler la saison de Mark Cavendish. Victime d’une commotion cérébrale, la semaine dernière à Abu Dhabi, le Britannique devrait pouvoir reprendre l’entraînement ces jours-ci pour être au départ de Tirreno-Adriatico. Avec son état d’esprit de trentenaire, bien plus tranquille qu’il y a quelques années.

Sprinteur raisonné

Rappelez-vous les sprints suicidaires, les chutes provoquées ou les bras d’honneur en passant la ligne. Dans sa jeunesse, Mark Cavendish a endossé le costume de bad-boy du peloton, de l’homme qui gagne – beaucoup – mais parfois au péril des règles de bonne conduite. Heinrich Haussler, victime du Britannique sur le Tour de Suisse 2010, s’en rappelle encore. Mais les temps ont bien changé. Le garçon gagne un peu moins, même si son Tour 2016 a montré qu’il pouvait encore dominer le sprint mondial comme à l’époque HTC. Et surtout, il a mûri. « Il y a autre chose que le cyclisme, désormais, soulignait-il dans un entretien accordé à CyclingTips, il y a plus d’un an. Je peux débrancher. Peu importe ce que j’ai fait. Je suis toujours le père de mes enfants, je suis toujours Mark pour ma femme. Ca aide. Je peux survivre. J’aime mon sport, je peux être déçu, mais je ne suis plus vraiment énervé. »

L’évolution fut nécessaire, en partie à cause des autres. « Le sprint est l’une des choses qui a le plus changé depuis mes débuts, témoignait justement Heinrich Haussler pour la Chronique du Vélo, en mars dernier. Avant, l’emballage final, c’était Cavendish et personne d’autre. » Aujourd’hui, la densité de sprinteurs est énorme, et l’homme de Man a finalement dû accepter le fait qu’il ne pouvait pas gagner à chaque fois. « Je suis plus habitué à perdre aujourd’hui que je ne l’ai été, confiait-il, toujours pour CyclingTips. Vous vous y faites. Et vous mûrissez. Vous grandissez. Vous réalisez qu’il y a plus important dans la vie. » A 32 ans, Mark Cavendish court plus libéré, il a fui la machine à gagner Quick-Step pour la relative tranquillité de Dimension Data. « En deux mots, c’est moins de pression », même s’il reconnaît qu’avec le plus gros salaire de l’équipe, il a quand même le devoir d’assurer.

Toujours affamé

Ses coéquipiers proches, eux, Mark Renshaw particulièrement, se sentent mieux dans la formation sud-africaine. Tout bénef’ pour un Cav’ qui, même dans un environnement favorable, doit continuer à batailler. « J’ai toujours dû me battre. Et je continue de le faire. A 14 ans, les gens disaient que je ne pourrais pas être cycliste. » Puis il y a deux ans, beaucoup jugeaient impossible de briller sur le Tour puis aux Jeux Olympiques. Les choses ne changent jamais vraiment. Comme la soif de vaincre. Au Tour de Dubai, où il a fait sa reprise, Cavendish a terminé quatrième de son premier sprint et certains s’inquiétaient presque. La réponse a fusé. « Pour moi, quatrième, c’est comme si j’étais deuxième : je me rassois quand je sais que je ne vais pas gagner. Ça a toujours été comme ça. Pour moi, c’est la victoire ou rien. »

Ce jour-là, Elia Viviani a donc levé les bras. Et le lendemain, le Britannique remettait les pendules à l’heure en décrochant son premier bouquet de la saison. Symboliquement, il soulignait alors qu’il venait d’égaliser son score de 2017, année noire où il a dû composer avec une mononucléose et un abandon sur le Tour. Ce succès est venu ranger définitivement ces mois de galères au rayon des souvenirs. Malgré une commotion cérébrale et quelques douleurs au cou survenues lors de sa chute la semaine dernière à Abu Dhabi, Cavendish devrait pouvoir remonter sur le vélo dès ce lundi d’après son directeur sportif Rolf Aldag. Avec dans la tête Tirreno-Adriatico, et surtout Milan-Sanremo, dans moins de trois semaines. Pour la victoire ou rien, bien sûr.

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