À vrai dire, on attendait beaucoup de l’effectif de la Cannondale-Garmin cette année. D’une part parce que la saison 2014 avait été réussie, d’autre part car la fusion avec le jeune réservoir Cannondale ressemblait à un quitte ou double. Force est de constater que la sauce n’a que très rarement pris, et que l’équipe de Jonathan Vaugthers s’est retrouvée trop rapidement dépendante de ses meilleurs éléments, défaillants ou malchanceux.

Deux raisons d’être satisfaits

Un Tour d’Italie irréprochable. Calculer les victoires de l’équipe américaine en World Tour cette année ne prend pas beaucoup de temps. Il n’y en a qu’une à recenser, lors du Giro. Sur les routes des Cinque Terre, l’espoir transalpin Davide Formolo a connu son jour de gloire, en se détachant de ses compagnons d’échappée pour filer seul vers l’arrivée jugée à la Spezia. Dans le top 10 du général en première semaine, Formolo a brillé sur son premier grand tour, mais on retiendra surtout la venue de l’inoxydable Ryder Hesjedal. Le Canadien, grand vainqueur en 2012, paraissait largement hors jeu au soir de la treizième étape, vingtième à 6’40” de Contador. Mais sa course rose a débuté lors du chrono, et lors du sprint final montagneux, il n’a cessé d’attaquer et de reprendre du temps sur tous ses rivaux, comme sur l’étape de Verbania. Pas loin d’être le plus fort de la troisième semaine avec Aru et Kruijswijk aux temps, il termine cinquième à Milan. Sans ce Giro, Cannondale aurait coulé au classement World Tour.

Ramunas Navardauskas, le taulier. En l’absence de réussite des leaders emblématiques, le Lituanien Ramunas Navardauskas n’a pas hésité à faire parler son talent pour s’imposer un peu plus comme le capitaine de route numéro un de l’équipe. Rouleur de formation, sa pointe de vitesse travaillée ainsi que ses nouvelles aptitudes de puncheur font de lui un redoutable client quel que soit le terrain affronté. En forme toute l’année, il a entre autres pris la médaille de bronze à Richmond, terminé troisième du Grand Prix de Plouay et remporté pour la deuxième fois le Circuit de la Sarthe. Une belle assurance pour des points World Tour ou un résultat comptable. Il n’aspire qu’à plus de libertés, tout comme Nathan Haas, qui a eu le mérite d’émerger du semi-naufrage collectif.

Trois raisons d’être déçus

Andrew Talansky aux abonnés absents. Dire qu’Andrew Talansky a traversé la saison 2015 tel un fantôme est à peine exagéré. Son meilleur résultat de l’année, en dehors de son championnat national du chrono, est une deuxième place derrière le puncheur Simon Geschke au sommet de Pra-Loup sur la seizième étape du Tour. Alors qu’il restait sur une victoire remarquable au Critérium du Dauphiné et de bons résultats sur trois semaines, il a énormément déçu et nous a laissé perplexe quant à son programme de courses. À court de rythme sur Paris-Nice, il n’a jamais semblé en capacité de pouvoir combler ce retard de trois mois, et strictement rien montré, même sur sa course fétiche du Dauphiné, où il a pourtant terminé dixième. Le Tour et la Vuelta ont été synonyme de fiasco, et à 26 ans, 2016 s’annonce comme la saison à ne pas louper.

Dan Martin toujours aussi peu verni. Bien qu’avec deux Monuments et un Tour de Catalogne au palmarès, l’Irlandais semble toujours aussi maudit par les dieux du cyclisme. Quatrième de l’étape reine du Tour de Catalogne, qui lui réussit bien, il semblait paré pour réaliser une grosse campagne de classiques. Mais quinzième de l’Amstel à Valkenburg, il n’a pas eu le droit de faire mieux, tombant lourdement sur la Flèche wallonne, puis disputant le Tour de Romandie avec deux côtes cassées. Septième du Dauphiné, il a choisi de jouer les étapes sur le Tour de France, sans succès, comme sur la Vuelta, où c’est encore une chute qui l’a mis KO après une première semaine excellente – il pointait à la troisième place du général. Ce n’était pas son année, et il voudra rebondir chez Etixx, où il viendra combler le départ de Kwiatkowski aux côtés d’Alaphilippe.

Une fracture nette, et la poursuite d’un recrutement hasardeux. Cela s’est fait ressentir lors des courses d’une semaines se déroulant simultanément. Très souvent, les anciens blocs de la Garmin-Sharp courraient séparément de ceux provenant de Cannondale. Entre impératifs venant des sponsors et anciens liens difficiles à rompre, le terrain n’était visiblement pas propice à un plein épanouissement du groupe. Ainsi, les jeunes pépites comme Matej Mohoric, champion du monde espoir à Florence, Davide Villella, Ruben Zepuntke, ou Joe Dombrowski n’ont eu que trop peu d’occasions pour s’exprimer. La politique choisie pour 2016 n’en est pas moins osée, car pour palier le départ des coureurs emblématiques, présents depuis 2008 dans le cas d’Hesjedal, la direction a choisi d’empiler les recrues sans véritable cohérence. Pierre Rolland et Rigoberto Uran auront carte blanche dès que la route s’élève, mais douze nouveaux arrivants aux profils très variés, n’est-ce pas trop ?

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