En cette fin d’année, il est l’heure de revivre les plus beaux moments de la saison. Ceux qui nous ont fait bondir de notre canapé, ému ou révolté. Ceux que l’on retiendra longtemps, malgré les années qui passeront. Au gré des articles marquants de 2016, nous vous proposons donc de vous replonger dans ces épisodes un peu à part. A chaud, comme si vous y étiez. On commence avec la victoire d’Arnaud Démare sur Milan-Sanremo.

Le sourire jusqu’aux oreilles, le regard presque dans le vide, Arnaud Démare semblait ne pas comprendre. Ne pas y croire. Pourtant, ce samedi, le drapeau bleu-blanc-rouge s’est bel et bien hissé dans le ciel de Sanremo, 21 ans après le sacre de Laurent Jalabert. Et ce malgré l’incrédulité du vainqueur.

Improbable

C’est comme si personne n’y avait jamais pensé. Bouhanni et Milan-Sanremo, c’est une histoire qui revient chaque année. Mais Démare, lui, est toujours plus en retrait, jamais véritablement annoncé comme un favori. A peine un outsider. Soit disant qu’il aurait plus de mal dans les bosses. Il faut dire qu’en trois participations, le Picard n’avait pas habitué à briller : avant aujourd’hui, il n’avait jamais fait mieux que 34e sur la « Classicissima ». Mais ce 19 mars 2016 a d’ores et déjà changé sa carrière. En 295 kilomètres, il est devenu un autre coureur : un de ceux qui ont accroché un Monument à leur palmarès. « C’était un jour de grâce », a-t-il lâché au micro de la RAI à l’arrivée. On n’aurait pas dit autrement. Si tout s’est terminé de la meilleure des façons, peu osaient ne serait-ce qu’imaginer un tel scénario ce matin. Et il n’y a avait plus personne pour même en rêver à 30 bornes de la via Roma, quand l’ancien champion de France a gouté au bitume.

Mais ce samedi ensoleillé sur la côte ligurienne devait être celui où Démare faisait mentir tous les pronostics. « Quand je suis tombé à 10 kilomètres de la Cipressa, je me suis dit que c’était fini pour moi », a-t-il confié à l’arrivée. Sauf que pas du tout. Aidé par toute son équipe, il est revenu dans le peloton au pied de la difficulté, s’est replacé, et remis en position de gagner la « Primavera » avant d’entamer le mythique Poggio. Déjà un exploit. Pour la suite, il a été légèrement aidé. Par Kwiatkowski, qui a gentiment attendu les derniers hectomètres pour se lever de sa selle, par Nibali qui lui a patienté jusqu’à la descente, par Sagan et Van Avermaet qui n’ont pas bougé d’un pouce, et par Cancellara qui est allé reprendre tout seul Kwiatkowski à l’approche de la flamme rouge. Mais il fallait encore terminer le travail, et trouver de l’énergie malgré tout ce qu’avait pu coûter à Démare sa chute et les efforts qui ont suivi.

La réussite du vainqueur

Dans un final complètement fou, Démare aurait encore pu tout perdre. La chute de Fernando Gaviria l’a obligé à faire un écart, et il a lancé son sprint de loin, à près de 300 mètres de la ligne. Et pourtant. Quand les yeux de tous étaient braqués sur Bouhanni, finalement victime d’un problème mécanique, la silhouette de Démare a jailli comme une bombe. C’était bien lui le plus costaud dans la dernière ligne droite. « Il y a des jours comme ça où tout réussit. J’avais été champion du monde espoir dans les mêmes conditions, après avoir chuté », se remémorait-il quelques minutes après avoir levé les bras. Tout un symbole. Parce que ce succès sur un Monument va changer l’homme et le coureur, comme avait pu le faire le titre mondial de 2011 décroché par le sprinteur tricolore. Inattendue jusqu’aux derniers instants, cette victoire apparaît presque comme un hold-up. Mais un de ceux dont on se rappelle pour la vie.

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