Neuvième ce mercredi au sommet du Mur de Huy et quinzième de l’Amstel Gold Race dimanche, Warren Barguil est définitivement de retour après de bien nombreuses péripéties. Sévèrement touché lors d’un invraisemblable accident collectif en stage de pré-saison, on a récemment appris que le Breton avait aussi terminé la seconde moitié du dernier Tour de France avec une fracture du genou. Ses performances actuelles, après de longs mois à l’infirmerie, en disent long sur la hargne du garçon, sur qui les espoirs d’une équipe entière reposent en ce mois d’avril.

Rattraper le temps perdu

En reprenant la compétition au Tour de Catalogne, Warren Barguil a presque perdu trois mois après avoir été fauché par une voiture sur les routes espagnoles durant l’hiver. On serait tenté de dire « seulement » trois mois, au vu du diagnostic effectué pour son coéquipier John Degenkolb, toujours hors des circuits jusqu’à mi-mai au moins. Revenu à temps quand les courses par étapes d’une semaine commençaient à s’enchaîner, le Français en a étonné plus d’un. Vingt-deuxième du général à 2’46” de Quintana en Catalogne, on l’imaginait nettement plus loin, plus proche du grupetto lors des étapes de montagne. De l’aveu même du principal concerné, interviewé après la troisième étape s’achevant à la Molina, il s’est surpris lui-même, ne lâchant prise qu’à moins de deux kilomètres de la ligne d’arrivée. Emmené par la suite au Pays Basque, c’est avec une condition nettement plus satisfaisante qu’il s’est testé face aux meilleurs sur des tracés accidentés et des cols pentus qu’il affectionne particulièrement. Huitième le lundi et troisième le jeudi, loupant de peu l’accélération de Samuel Sanchez dans le dernier raidard, Barguil semblait sereinement envisager une place parmi les dix premiers alors qu’Arrate se profilait.

Mais, encore un petit peu fragile physiquement, c’est par un abandon que sa semaine s’est terminée. Pour ne pas prendre le moindre risque, dira le staff, et la sagesse est compréhensible après toutes les galères de l’hiver. Il n’empêche qu’en dépit de cette opportunité non concrétisée, Barguil est arrivé avec une confiance maximale à l’aube des classiques ardennaises. Courir pour une équipe néerlandaise a fait qu’il était attendu au tournant sur l’Amstel Gold Race, la course qui lui convient sans doute le moins de tout le triptyque. Et pourtant, le Tricolore s’est une nouvelle fois arraché pour décrocher le meilleur résultat possible. Quinzième à l’arrivée, pouvait-il réellement faire mieux ? Sur une course cadenassée par les équipiers des leaders, où le seul Gasparotto a réussi à leur fausser compagnie, Barguil n’avait de toute manière pas les qualités pour monter sur le podium du jour en cas de sprint. Premier coureur de sa formation à l’arrivée, il évita malgré tout à l’équipe Giant-Alpecin un naufrage après que Tom Dumoulin ait été distancé dans l’avant-dernière ascension du Cauberg.

Une équipe en panne de résultats

Impliqué dans la catastrophe de janvier, le Batave accuse le coup, et donne l’impression d’être un cran en-dessous de ce que lui permettent ses aptitudes. Barguil, lui, réussit, l’air de rien, à faire oublier ses mésaventures. Pourtant, très exigeant envers lui-même, celui qui avait terminé huitième du Tour d’Espagne 2014 voit le verre à moitié-vide après course, invoquant un saut de chaîne après le Keutenberg qui lui a fait gaspiller beaucoup trop d’énergie pour se replacer. Preuve au moins que le garçon a conscience de cet élément déterminant, surtout sur les courses belges. Pourtant dans le Mur de Huy, Barguil a légèrement failli sur ce point. Il a monté à son rythme les pentes supérieures à 20 %, allant obtenir une savoureuse neuvième place. Satisfaction ou déception ? Un peu des deux, car si Valverde et le duo d’Etixx – Alaphilippe et Martin – paraissaient largement supérieurs aux autres concurrents, son positionnement à l’entame du chemin des Chapelles a laissé à désirer. Lui même estimait avoir perdu trop de places avant la flamme rouge.

Gonflé à bloc, il aura à coeur d’y remédier dimanche, sur une course faisant la part belle aux coureurs hybrides, entre spécialistes des classiques et coureurs de grands tours : Liège-Bastogne-Liège. Prévue sous des conditions météorologiques radicalement différentes de celles connues pour le début de la campagne, la 102è Doyenne mettra forcément en valeur des amoureux des gros efforts. Certes, Barguil n’y a jamais fait mieux que 29è, mais il est sur une dynamique ascendante incontestable. Avant de prendre part au Tour du Yorkshire, dernière étape avant une coupure méritée, il serait bien inspiré d’aller cueillir une performance de choix sur l’une des plus belles courses du calendrier. Et même si ce n’est pas son style, il y a toujours des points World Tour à aller récolter. Dernière du classement UCI par équipes, avec seulement seize unités au compteur, la formation Giant paye cash l’indisponibilité de ses leaders en début de saison, et pour certains encore maintenant. Hormis les valeureux de Backer et Sinkeldam sur Paris-Roubaix, personne n’a réellement repris le flambeau dans une équipe orpheline de Marcel Kittel, transféré à l’intersaison, et de John Degenkolb, blessé. Pire encore, aucune victoire n’est à signaler depuis l’ouverture de la saison 2016. Et si Warren Barguil mettait fin à la disette ?

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